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La déforestation au Brésil et la COP15 de Kunming

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 188 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 05/02/2021
    • de FLORENT Jean-Philippe
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    J’interrogeais Madame la Ministre en séance plénière sur le dernier rapport du WWF sur la déforestation dans le monde, avec en point de mire la diplomatie climatique à mener en vue de la COP15 qui aura lieu à Kunming en octobre de cette année.

    L'un des points noirs de cette déforestation reste le Brésil. La production de viande y est le premier facteur de déforestation. Selon l'Inpe, la déforestation en Amazonie brésilienne a atteint son plus haut niveau depuis 12 ans et d'après Greenpeace, l'équivalent de 626 millions d'arbres a été détruit au cours des 12 derniers mois.

    De nombreux États membres affirment qu'ils ne ratifieront pas l'accord UE-Mercosur en l'état. Par exemple, la France et l'Irlande menacent de ne pas le ratifier si le Brésil ne protège pas la forêt amazonienne.

    Je pourrais également citer le rapport « Planète vivante » du WWF qui déplore un déclin sans précédent de la biodiversité planétaire : une perte de 68 % en 40 ans. Là encore, les points noirs sont identifiés en Amérique latine et dans les Caraïbes (baisse de biodiversité de 94 %).

    Madame la Ministre peut-elle nous détailler les leviers diplomatiques à sa disposition et à la disposition de nos partenaires européens pour endiguer cette perte mondiale de la biodiversité et en particulier stopper la déforestation dans le monde, singulièrement au Brésil ?

    En vue d'assurer les accords de Paris, quelles sont les forces et les faiblesses de nos outils juridiques pour interdire l'import de produits générateurs de déforestation de la forêt amazonienne ?
  • Réponse du 06/05/2021
    • de TELLIER Céline
    Voici les différents leviers diplomatiques dont dispose la Wallonie pour endiguer la perte mondiale de biodiversité.

    Lors de la future 15e Conférence des Parties à la Convention sur la Diversité biologique, la Wallonie soutiendra un accord sur un cadre mondial pour la biodiversité post 2020 prévoyant des mesures urgentes et ambitieuses en réponse aux multiples défis auxquels nous faisons face.

    La Wallonie soutient notamment la Coalition Haute Ambition (HAC) pour la nature et les peuples qui demande aux dirigeants mondiaux à s'engager à protéger au moins 30 % des terres et des mers d'ici 2030.

    Outre la protection, la Wallonie soutient également la gestion et l’utilisation durable de tous les écosystèmes, afin de garantir la multitude de services écosystémiques dont l’humanité dépend, et l’évitement des impacts négatifs sur la biodiversité dans les pratiques de production et les chaînes d'approvisionnement.

    En partie en réponse à la deuxième question de l’honorable membre, la Belgique est, depuis décembre dernier, membre du Partenariat des Déclarations d’Amsterdam qui est donc composé aujourd’hui de 9 pays européens ayant l’ambition d’éliminer la déforestation associée à l’importation de produits agricoles d’ici 2025. La Wallonie soutient ce partenariat.

    Au niveau de l’Union européenne, nous soutenons également la proposition législative prévue dans la stratégie européenne pour la biodiversité visant à éviter ou à limiter la mise sur le marché de l’Union de produits associés à la déforestation ou à la dégradation des forêts, ainsi qu’à promouvoir des importations et des chaînes de valeur respectueuses des forêts.

    La Région wallonne soutient le renforcement de l'action de l'Union européenne pour la protection et la restauration des forêts du monde délimité dans la Communication de l’Union européenne de 2019 et en particulier :
    - la réduction de l'empreinte de la consommation européenne sur les sols ;
    - l’encouragement de la consommation de produits issus de chaînes d'approvisionnement exemptes de déforestation dans l'UE.

    La Commission européenne procède actuellement à l'évaluation d’éventuelles mesures réglementaires et non réglementaires en la matière.

    Enfin, je partage son inquiétude quant à la déforestation spécifique au Brésil, en particulier dans le cadre des négociations entre l’UE et le Mercosur. Cet accord UE-Mercosur suscite encore plus d’inquiétudes depuis l’arrivée de Jair Bolsonaro au pouvoir. Depuis son arrivée, la déforestation s’est aggravée et des importations agricoles pourraient encore plus fragiliser les agriculteurs européens. Le Brésil représente 80 % du PIB du Mercosur, loin devant l’Argentine à 17 %, le Paraguay et l’Uruguay ne comptant ensemble que pour 3 %.

    L’Amazonie est un écosystème essentiel au maintien de la vie sur la Terre, connue pour être le « poumon de la Planète ». Son rôle de puits de carbone s’amenuise au point qu’elle pourrait très bientôt devenir elle-même une source de carbone. Depuis le début des négociations il y a près de 20 ans, l’Amazonie a été déforestée d’une superficie équivalente à celle de l’Espagne. La forêt s’étend sur 9 pays. Le Brésil en abrite 62 % et est responsable de 85 % de la déforestation.

    La communauté internationale avait réagi vivement à l’occasion des méga-incendies de l’été 2019 et les Européens qui venaient de conclure l’accord UE-Mercosur cherchaient à obtenir des engagements du président Bolsonaro. Alors que, pour sécuriser l’accord, celui-ci aurait dû prendre des mesures pour au moins donner l’impression aux Européens qu’il prenait le problème au sérieux, il n’en fit rien.

    Avec une hausse de 10 % de surfaces déboisées, 2020 fut une année pire encore que la précédente si bien que le Brésil pourrait être le seul pays du monde à avoir augmenté ses émissions de CO2 alors que toute l’économie mondiale est paralysée et que les émissions ont plongé partout ailleurs de ce fait. Les Européens ont une part de responsabilités puisqu’on estime que 20 % des exportations brésiliennes de soja et de viande bovine vers l'Union européenne proviennent de terres déboisées illégalement.

    De plus, le sort des populations autochtones, les protections des travailleurs, la mise en œuvre du principe de précaution, les mécanismes visant au respect de divers engagements sociaux et environnementaux sont également de réelles préoccupations.

    Enfin, les analyses d’impact de ce traité UE-Mercosur sont toujours incomplètes. Il manque notamment l’étude d’impact de durabilité. Cette situation a poussé de plus en plus d’États européens à émettre des doutes sur ce traité considéré comme obsolète.

    En raison de ses liens historiques avec le Brésil, l’actuelle présidence portugaise de l’UE veut néanmoins aboutir à la ratification de cet accord. Depuis plusieurs mois, la Région wallonne émet de vives réserves sur la ratification de cet accord, notamment en raison de ses impacts sur l’environnement, lors des coordinations intrabelges.