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L'ONG "Kiss Ecology"

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 229 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 09/02/2021
    • de MAUEL Christine
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie et de la Mobilité
    La pollution, l'effet de serre, les émissions de CO2 et, plus globalement, le changement climatique, sont autant de défis auxquels nous devons aujourd'hui faire face. De plus en plus de personnes se préoccupent de ces problématiques ce qui a donné lieu à des projets et des rassemblements visant à faire changer les choses et à sensibiliser encore davantage le monde politique.

    Deux personnes travaillant pour la Région wallonne ont créé l'ONG "Kiss Ecology" qui propose d'utiliser la technologie blockchain afin d'atteindre la transition écologique et sociétale. Cette initiative permet d'une part la fixation d'un but collectif positif pour le climat et, d'autre part, une adhésion plus libre de contraintes, notamment logistiques, via l'outil numérique développé.

    Monsieur le Ministre peut-il préciser sa position sur le sujet ? Peut-il également indiquer quelle place occupent les nouvelles technologies dans le cadre de la transition écologique ? A-t-il eu des contacts avec les cofondateurs de cette ONG ? D'autres initiatives similaires existent-elles en Wallonie ?
  • Réponse du 10/03/2021
    • de HENRY Philippe
    La question des blockchains est complexe et mérite quelques éléments d’analyse.

    Les blockchains, comme les autres cryptomonnaies utilisent énormément d’énergie pour sécuriser le réseau. En effet, plus la consommation énergétique est importante, plus le réseau est sécurisé. A cet égard, plusieurs études ont clairement mis en évidence la forte consommation énergétique des blockchains.

    Par exemple, une étude conclut que l’énergie nécessaire pour le minage du Bitcoin est comparable à la consommation énergétique annuelle de l’Irlande.

    Une étude sénatoriale française de 2018 arrivait aux conclusions que la consommation des blockchains publiques était comprise entre 30 et 200 Terawattheures par an, soit la production de 4 à 30 centrales nucléaires. 

    Selon certains auteurs, la consommation d’énergie pour une transaction représente l’équivalent de 165 kg de CO2. Pour situer cette consommation, ceci est l’équivalent d’un trajet de 1650 km avec une voiture émettant 100g CO2/km.

    Les partisans des blockchains mettent en évidence la diversité des estimations de consommations et avancent certains arguments pour les relativiser, comme par exemple que le bilan dépend de la source d’énergie utilisée et diminue s’il s’agit d’électricité renouvelable. On note cependant que ce constat peut s’appliquer à toutes les consommations d’électricité et ne concerne donc pas le fond de la question, qui serait plutôt la consommation par rapport au service rendu.

    D’autres auteurs partent du fait que le bitcoin est qualifié d’or moderne pour comparer son bilan à celui de l’extraction d’or, plus énergivore. Considérant que la parité or-dollar a été abandonnée en 1971 et que les transactions actuelles ne se font plus jamais en or, il aurait sans doute été beaucoup plus pertinent de comparer le bitcoin au système financier actuel, pour lequel je ne dispose pas de comparaison.

    Enfin, plusieurs auteurs comparent la consommation des blockchains à diverses actions sur internet (diffusion de mails, recherche sur google, et cetera), ce qui semble assez pertinent.

    Au niveau wallon, une brève analyse exploratoire réalisée en 2020 par CLIMACT à la demande de l’administration relève que la consommation électrique wallonne actuelle liée à l’usage des TIC (technologies de l’information et de la communication) est de l’ordre de 1,3 TWh (soit l’équivalent de la consommation électrique de 325 000 ménages, ou encore 83% de la production éolienne wallonne en 2017) et parmi ces 1,3 TWh, la consommation liée aux réseaux mobiles a été évaluée à environ 0,4 TWh. La consommation d’électricité des TIC pourrait tripler d’ici 2030 selon un scénario tendanciel. Les émissions de GES associées pourraient, elles, tripler voire quintupler (+900 kt CO2-eq en 10 ans, sur base d’estimations à facteurs d’émissions tenant compte de la sortie prévue du nucléaire en 2025 et l’augmentation progressive de la part des énergies renouvelables).

    En outre, des risques d’effets rebonds existent. Par exemple, l'amélioration de l'efficacité de production des équipements permet une baisse de leur prix et pourrait avoir comme conséquence d’augmenter les usages des TIC et donc leur consommation d’énergie.

    Pour conclure sur ce point, soulignons que les partisans de la blockchain admettent généralement la forte consommation énergétique, même s’ils la relativisent.

    Cependant, Mr Janneau, expert des blockchains, souligne un élément intéressant : « si les blockchains et les cryptomonnaies sont autant critiquées pour leur coût énergétique, c’est également parce que leur utilité, et en particulier leur utilité sociale, reste incomprise ».

    Ce constat me parait pertinent et m’amène à la seconde partie de ma réponse.

    Je découvre avec l’honorable membre l’initiative de Kissecology et force est de constater qu’il n’est pas aisé pour le néophyte de comprendre en quoi l’utilisation de cette cryptomonnaie va favoriser in fine l’atteinte des objectifs de développement durable, car les mécanismes ne me semblent pas expliqués en détail.

    De même, il est difficile de trouver des exemples concrets et documentés de résultats positifs en ce domaine, même si cette technologie est prometteuse selon plusieurs auteurs, notamment en matière de gestion des énergies renouvelables (certificats verts).

    Vu l’initiative positive proposée par Kissecology, je suis bien sûr ouvert et je pense qu’il serait intéressant de les rencontrer comme l’honorable membre le suggère, afin de mieux comprendre leur proposition.

    Néanmoins, je resterai attentif aux aspects de consommation énergétique et aux possibilités de réduire cette empreinte, par exemple via des protocoles moins gourmands en énergie ou encore la mise en place de réseaux de chaleur pour valoriser l’excédent de chaleur des serveurs.

    Par rapport à la problématique plus générale de limitation de la croissance de la consommation d’électricité liée aux TIC, dont font partie les blockchains, plusieurs autres mesures sont envisageables.

    Par exemple, il s’agirait tout d’abord d’avoir une meilleure connaissance de la consommation liée aux différents équipements des TIC et suivre les évolutions des consommations. Ensuite, des mesures visant à informer les usagers par rapport à une optimisation de leur consommation d’appareils numériques (rédaction de fiches d’informations par type de produit) pourraient être envisagées. Et enfin, des mesures à caractère normatif pourraient être mises en place afin par exemple de limiter la bande passante disponible pour certaines applications (ex : limiter la résolution vidéo par type de terminal) ou encore limiter la quantité totale de contenu accédée par jour.