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Le secteur des biotechs wallonnes

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 308 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 12/03/2021
    • de LIRADELFO Julien
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Les biotechs wallonnes sont souvent citées comme un secteur de pointe, pourvoyeur d'emplois et de création de valeur. On observe cependant une tendance inquiétante, depuis un an, des sociétés wallonnes de pointe dans le domaine des thérapies géniques et cellulaires passent entre les mains de sociétés américaines. On a évoqué le cas Diagenode en plénière, mais ce n'est pas un cas isolé.

    En un an, trois groupes américains et une entreprise canadienne ont déboursé un milliard d'euros, plus une transaction au montant non communiqué, pour acheter 5 entreprises wallonnes (MaSTherCell, Delphi Genetics, ImmunXperts, Henogen et Diagenode). Comme avec Diagenode, on observe une logique de privatisation des bénéfices. Maintenant que l'entreprise est rentable, on la laisse se faire racheter par une grande entreprise privée, mais les coûts de développement et de recherche ont été assumés en partie à l'aide de moyens publics.

    Nous pensons qu'il est impératif de garder les technologies et l'emploi en Wallonie, mais aussi d'y développer un secteur public fort. Vous avez évoqué la mobilisation de fonds européens dans le cadre du prochain programme Horizon-Europe. Mais d'autres pistes de solutions existent, la Région wallonne possède tout un arsenal d'outils économiques et d’Invests dont les budgets et la force de frappe sont considérables, ceux-ci doivent être mis au profit du collectif.

    Quelle est l’analyse de Monsieur le Ministre de cette vague d'achat des biotechs wallonnes ?

    Envisage-t-il une stratégie publique pour développer les biotechs wallonnes avec les outils économiques et les Invests ?
  • Réponse du 07/04/2021
    • de BORSUS Willy
    Comme l’honorable membre le mentionne, les différents cas qu’il cite sont assez similaires. Si des sociétés étrangères viennent effectivement racheter ces entreprises wallonnes, ce n’est pas dans un but de délocaliser l’activité, mais d’installer en Wallonie leurs centres de production européens et de poursuivre le développement et le recrutement au sein de ces sites industriels, au bénéfice de l’activité économique et de l’emploi en Wallonie. Nous pouvons donc noter le fait que ces rachats révèlent l’attractivité grandissante de notre territoire pour ces sociétés étrangères qui choisissent notre Région pour y investir des moyens considérables et confortent ainsi notre positionnement comme une des régions leader en Europe dans le domaine des biotechnologies.

    Nous pouvons certes regretter par contre que cela résulte en une perte de contrôle, le centre décisionnel n’étant plus localisé en Wallonie, même si néanmoins la plupart du temps, l’ancien CEO reste à la tête de l’entité wallonne. Un point important est que ces rachats ne prémunissent pas ces entreprises d’assumer le remboursement des aides publiques reçues sous forme de prêts ou d’avance récupérable et donc que la poursuite des activités résultera également en retours pour la Région par rapport aux aides octroyées. Par ailleurs, les investisseurs tant publics que privés qui ont participé au développement de ces sociétés ont réalisé une plus-value qui représente autant de moyens qui pourront, le cas échéant, être réinvestis dans des sociétés wallonnes.

    Pour l’avenir néanmoins, il est aussi important d’essayer de garder les centres névralgiques de ces sociétés en Wallonie. Comme l’honorable membre le mentionne, ces entreprises étrangères ont déboursé plus d’un milliard d’euros pour acquérir nos entreprises wallonnes, et même si la Wallonie dispose d’outils économiques et d’invests performants pour aider nos sociétés dans leur développement, nous ne pouvons pas rivaliser à l’échelle de notre Région avec les moyens qui peuvent être mobilisés de la sorte. Notons aussi que la Commission européenne développe à son tour des outils permettant d’atteindre une masse critique qui n’est pas atteignable au niveau d’une région isolée.

    Dans ce cadre, en 2018, la Banque européenne d’investissement (BEI) a rendu disponible près de 200 millions d’euros en Belgique pour des projets de ce type, classifié « financements à risque », dans des secteurs variés, dont celui du BioTech. Notons par exemple, en 2019, la société Univercells, qui a pu bénéficier d’un prêt appelé « Venture-debt » à hauteur de 20 millions d’euros provenant de la BEI à travers le programme « InnovFin - EU-finance for innovators ». Ce mécanisme a permis à l’entreprise wallonne de limiter les sorties de trésoreries pour se concentrer sur ses investissements et son développement.

    L’avantage d’un tel dispositif que représente Venture-debt est qu’il constitue un financement non dilutif des parts de la société, sur mesure et se contente d’une approche indirecte, c’est-à-dire que la BEI ne s’implique pas directement dans la gestion quotidienne de l’entreprise bénéficiaire du prêt. Aussi, à titre informatif, ces prêts peuvent monter jusqu’à 75 millions d’euros. Il est important également de signaler qu’un soutien de la part de la BEI envoie un signal puissant pouvant inciter davantage d’investisseurs à investir en Région wallonne. Le nouveau plan européen « Horizon Europe » annonce une augmentation budgétaire de 30% par rapport à la programmation précédente. Il sera dès lors essentiel que nous puissions capitaliser sur cette expérience pour inciter et aider d’autres PME wallonnes à bénéficier de ce type de financements.

    Solliciter l’aide de la Commission européenne et les outils qu’elle met à disposition est nécessaire et judicieux afin de pouvoir rivaliser avec les grandes puissances qui sont actuellement en train d’investir massivement dans notre Région et renforcer encore l’ancrage de celles-ci.

    Enfin, afin de renforcer les fonds propres et quasi-fonds propres des entreprises, un Fonds de solvabilité et de relance d’un montant total de 400 millions d’euros a été mis en place au départ des outils économiques et financiers en mutualisant leur expertise financière et sectorielle de pointe.

    Le Fonds sera composé de deux volets. Un premier volet dédié à la solvabilité des entreprises qui vise à renforcer les fonds propres des entreprises wallonnes par une augmentation de leur capital ou de leur quasi capital. Ce volet concerne les entreprises actives dans des secteurs qui ont été fortement impactés par la crise et qui ont un besoin criant de solvabilité pour pouvoir redémarrer. Notons que ce volet s’articulera avec le Fonds de relance et de transition du Fédéral.

    Le second volet dédié à la croissance et à la transition pourra véritablement trouver à renforcer la croissance des entreprises wallonnes puisque cette phase est destinée aux entreprises ayant des projets d’investissements, qui souhaitent s’étendre ou modifier leurs processus (numérisation, transition énergétique…).