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L'accès à la propriété en Wallonie et les exigences de la Banque Nationale de Belgique

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 177 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 15/03/2021
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Les Belges ont une brique dans le ventre, c'est bien connu et acquérir son logement est une sécurité majeure pour l'avenir. Pourtant, de nombreuses personnes sont écartées de ce projet de vie, suite aux mesures d'une BNB, soudain plus soucieuse de l'endettement des citoyens les moins fortunés.

    Les mesures de la BNB peuvent être considérées comme bienveillantes, mais elles créent toujours un peu plus d'inégalités entre des personnes qui n'ont pas de fortune ou de tiers pouvant couvrir les apports personnels demandés par les banques. À cela, il faut ajouter que si les intérêts sont bas, les prix ont une tendance à la hausse, éloignant toujours un peu plus les « jeunes » candidats-propriétaires de l'acquisition d'un bien.

    Dans sa Déclaration de politique régionale, le Gouvernement est conscient des enjeux qui sont liés au logement, et la Wallonie ne manque pas d'infrastructures pouvant accompagner les candidats-propriétaires à obtenir leur propre logement, tels que le chèque habitat, les garanties pour les prêts hypothécaires ou encore les primes à l'acquisition.

    Comment ces aides sont-elles sollicitées par les candidats-acheteurs ?

    Constate-t-on une augmentation du nombre de demandes ?
    Si oui, comment y est-il répondu ?

    Quelle est l'analyse de Monsieur le Ministre par rapport aux exigences de la BNB et des banques pour obtenir un prêt ?

    Les budgets alloués à cette politique s'avèrent-ils suffisants ou la demande est-elle supérieure aux moyens disponibles ?

    Dispose-t-on d'une estimation à ce sujet ?
    Et le cas échéant, d'une marge de manœuvre ?
  • Réponse du 13/04/2021 | Annexe [PDF]
    • de COLLIGNON Christophe
    Depuis le 1er janvier 2020, la BNB a imposé une règle restrictive pour les crédits hypothécaires limitant la somme maximale empruntée à 90 % de la valeur du bien immobilier, afin de minimiser le risque de défaillance des crédits. Cette restriction n’est pas absolue, car il est toujours possible d’octroyer des crédits supérieurs à 90 % de la valeur du bien immobilier (35 % des prêts accordés par les banques sont dans ce cas) et même dépassant 100 % de cette valeur (5 % des prêts bancaires sont dans ce cas).

    En Wallonie, on constate que l’évolution des nouveaux crédits hypothécaires octroyés en 2020 est à la hausse par rapport à l’année 2019 : le nombre de nouveaux crédits a augmenté de 1,9 %, le montant total (en euros) a augmenté de 4,1 % et le montant moyen (en euros) a augmenté de 2,2 % (cf. tableau 1). Il n’y a donc pas d’effet négatif de la nouvelle règle sur les statistiques annuelles globales des crédits dans la région.

    Les données de la Centrale des crédits aux particuliers de la BNB sont disponibles par groupes d’âge des emprunteurs des crédits hypothécaires à l’échelle de toute la Belgique (cf. graphique 1). Au cours des années précédentes (2014-2020), la proportion des nouveaux emprunteurs ayant moins de 35 ans reste stable, entre 35,4 % (en 2015) et 38,7 % (en 2014). En 2020, cette proportion était de 37,5 %. Le pourcentage des plus jeunes emprunteurs (de 18 à 24 ans) reste stable aussi : 3,6 % en 2020, alors qu’il oscillait entre 2,6 % et 4,2 % les années précédentes.

    Si on considère les nouveaux emprunteurs par année, le nombre de très jeunes emprunteurs (moins de 25 ans) des crédits hypothécaires en Belgique (cf. graphique 2) a diminué de 20,8 % entre 2019 et 2020 ; la diminution est de 16,1 % pour les jeunes âgés entre 25 et 34 ans. Il faut rester prudent dans l’interprétation des chiffres même s’il ne faut pas nier la difficulté de franchir le premier pas dans l’accession à la propriété. Une telle évolution correspond, en effet, à une contraction annuelle qui s’est déjà produite par le passé alors qu’il n’y avait pas les mesures restrictives de la BNB.

    Pour expliquer en partie ces chiffres, il faut souligner que les acteurs privés du marché du crédit hypothécaire jouent encore un rôle important pour multiplier les dispositifs financiers permettant de prêter aux jeunes tout en respectant les balises de la BNB.

    Il ne faut évidemment pas sous-estimer la proportion de jeunes qui reçoivent des apports des parents, ce qui renvoie à la problématique de la reproduction des inégalités sociales et des écarts de patrimoine de génération en génération. Ainsi, on observe l’apparition sur le marché de formules telles que :
    - le crédit à la consommation qui permet aux parents qui le souhaitent et le peuvent d’aider leurs enfants à acheter une habitation, en finançant jusqu’à 125 % du montant ou à des parents de se porter garants sur un crédit à la consommation pris par le jeune. Profitant des taux bas, le coût pour les parents reste supportable ;
    - la mise en garantie hypothécaire d’un bien immobilier supplémentaire (la maison des parents, par exemple). Le montant du crédit hypothécaire peut alors s’élever à maximum 90 % de la valeur vénale des deux biens mis en garantie. Pour libérer les parents de leur hypothèque, il faut que les enfants aient payé sept à huit ans de leur crédit ;
    - l’achat en indivision avec ses parents ;
    - un report différé du remboursement du capital (sorte de crédit ballon).

    Les courtiers indépendants en crédits hypothécaires sont de plus en plus actifs sur ce marché. Ce n’est pas pour autant une solution miracle, car elle vise juste à partager le risque sur plusieurs ménages proches des jeunes emprunteurs ou à en reporter le coût sur des crédits classiques aux taux d’intérêt plus élevé. Il importe donc que la BNB évalue les effets sociaux de ces mesures, compte tenu des formes de « contournement » de ces règles macro-prudentielles qui existent sur le terrain.

    Comme le sait l'honorable membre, les deux OIP prêteurs de crédits hypothécaires sociaux en Wallonie ne sont pas soumis à ces restrictions de la BNB compte tenu de la garantie de la Région sur leur portefeuille de crédit. Il ne devrait pas y avoir de recul en ce qui concerne l’octroi aux jeunes comparativement aux autres emprunteurs de catégories d’âges plus élevés.

    Ces deux OIP prêteurs de crédits hypothécaires sociaux en Wallonie visent des catégories différentes de population : les ménages avec moins de trois enfants pour la SWCS et ceux ayant trois enfants ou plus pour le FLW. Parmi les emprunteurs des crédits hypothécaires du FLW en 2019, 38 % ont moins de 35 ans. Cette proportion correspond à celle dans les banques commerciales. En revanche, parmi les emprunteurs de la SWCS, presque deux tiers ont moins de 35 ans (65,6 % en 2019).

    Les chiffres des rapports 2020 d’activités des OIP (qui sont généralement disponibles vers l’été de l’année suivante) n’ont pas encore été rendus publics.