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Le gaspillage alimentaire

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 285 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 18/03/2021
    • de CLERSY Christophe
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Selon la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture), 14 % des aliments produits sont perdus entre la récolte et la vente au détail. Pour la Belgique cela équivaut en moyenne à 345 kilos d'aliments par an et par habitant. Cela signifie qu'un Belge gaspille en moyenne 1 kilo d'aliments par jour.
     
    Et pourtant, de plus en plus, nous voyons se développer des applications, des start-ups, des ASBL et même de grands groupes commerciaux qui s'engagent à lutter contre le gaspillage alimentaire. Test Achat a même affirmé que 80 % des consommateurs belges sont préoccupés par le gaspillage alimentaire et se déclarent prêts au changement pour réduire ce gaspillage. Le confinement a également été bénéfique grâce à une meilleure planification des repas et des courses.
     
    Alors comment expliquer, malgré ces nombreuses initiatives qui ont vu le jour ces deux dernières années, que ces chiffres restent tout de même alarmants ?
     
    La lutte contre le gaspillage doit être, certes, menée à la maison, mais également hors du foyer, par exemple en emportant les restes au restaurant.
     
    Quelle analyse politique Madame la Ministre fait-elle de cette situation interpellante ?
     
    Quelles sont les mesures qu'elle a prises pour éviter ce type de gaspillage alimentaire ?
     
    Est-elle en contact avec les entreprises alimentaires, commerces de proximité, pour éviter un tel gâchis ?
     
    Des actions de sensibilisation sont-elles prévues pour 2021 ?
  • Réponse du 07/04/2021
    • de TELLIER Céline
    La valeur moyenne de 345 kg/hab.an de pertes et gaspillages alimentaires rapportée pour la Belgique dans le rapport de la FAO est très probablement surestimée.

    En effet, cette donnée, qui est fréquemment utilisée par les médias, est issue d’anciens rapports comparant et classant les performances des pays européens en matière de gaspillage alimentaire total.

    Pour la plupart, ces rapports ont pour source une étude de 2013 de l’Institut européen des politiques environnementales, elle-même basée sur un rapport technique de la Commission européenne de 2010 intitulé « Preparatory study on food waste across EU 27 », dont les principales sources d’informations sont des estimations produites par EUROSTAT en 2006.

    Les données figurant dans ces anciens rapports sont donc souvent obsolètes et de nombreuses hypothèses et scénarios ont été appliqués, ceux-ci étant fort critiquables quand on les analyse en détail, ce qu’a fait l’administration wallonne dans le cadre de la préparation du plan REGAL.

    Ainsi, selon les données les plus récentes produites dans le cadre de l’élaboration du référentiel de calcul des pertes et gaspillages alimentaires en Wallonie, le niveau de ces pertes et gaspillages (comestibles) était estimé à ± 255 kg/hab.an pour l’année 2018. Une valeur assez similaire a également été calculée pour la Flandre.

    Par ailleurs, selon le rapport du PNUE de 2021 sur l’indice du gaspillage alimentaire, la Belgique se situe sur le podium des pays européens qui affichent les plus faibles valeurs de gaspillage alimentaire à domicile, derrière la Slovénie et l’Autriche, avec une valeur de 50 kg/hab.an, alors que la moyenne est de 79 kg/hab.an, si l’on ne tient compte que des pays les plus riches.

    Quoi qu’il en soit, ces valeurs apparaissent encore trop élevées. C’est pourquoi le plan REGAL 2015-2025 et le Plan wallon des Déchets-Ressources visent à faire diminuer davantage les pertes et gaspillages alimentaires, par le biais de différentes actions.

    Il s’agit d’actions spécifiques à chacun des maillons de la chaîne alimentaire ou d’actions transversales telles que la facilitation des dons aux associations d’aide alimentaire, le développement d’un site Internet de référence ou encore l’intégration de la thématique du gaspillage alimentaire dans l’enseignement obligatoire et dans les formations professionnelles qui touchent à l’alimentation.

    La mise en œuvre des différentes mesures du plan REGAL a fait l’objet d’une évaluation et d’une note au Gouvernement wallon le 15 février 2019. Depuis 2019, les principales actions menées sont :
    - l’élaboration d’un référentiel de calcul des pertes et gaspillages alimentaires, en prévision du rapportage obligatoire de données vers l’Europe à l’horizon 2022 ;
    - le soutien aux organisations d’aide alimentaire par le biais d’un appel à projets spécifique. Neuf projets ont été retenus dans ce cadre, pour un montant total d’un peu plus de 120 000 euros. Ils ont notamment permis de réaliser des aménagements ou de mettre en place de nouveaux modes de fonctionnement. Une subvention a aussi été accordée à la Fédération des services sociaux, qui est devenue l’Organisme wallon de concertation de l’aide alimentaire agréé depuis 2018 ;
    - la réalisation d'audits sur les pertes alimentaires dans le secteur de la production et de la première transformation agricole, suivie ensuite de l’élaboration d’un guide de bonnes pratiques à mettre en œuvre ;
    - la prise en charge, au bénéfice d’organisations d’aide alimentaire, de certaines problématiques liées à la Covid-19, en particulier l’écoulement grâce à la Bourse aux dons d’un stock important de pommes de terre, résultant de la fermeture soudaine des établissements HORECA lors du premier confinement ;
    - l’octroi d’une subvention à la Fédération HORECA Wallonie afin de promouvoir le système Rest-O-Pack et d’intégrer la problématique des pertes et gaspillages alimentaires dans le cadre des formations professionnelles ;

    - la prise en compte des aspects liés aux pertes et gaspillages alimentaires dans le cadre de la stratégie « Manger demain » et du Green Deal « cantines durables » ;
    - la préparation d'un accord-cadre avec le secteur de la distribution en matière de prévention des déchets, alimentaires en particulier ;
    - la préparation d’un cahier des charges visant à confier à un prestataire externe une mission de services « facilitateur pertes et gaspillages alimentaires » en vue d’accélérer la mise en œuvre du plan REGAL ;
    - la mise à disposition de conseils pratiques sur le Web, en lien avec la planification des achats, la conservation des aliments, la gestion du frigo et du congélateur, la valorisation des restes, et cetera ;
    - la nécessité de clarifier la signification des dates limites de consommation, en collaboration avec l’AFSCA et le secteur de la distribution ;
    - la majoration des subventions accordées aux communes qui s’inscrivent dans une démarche zéro-déchet, la mise en place d’actions de lutte contre le gaspillage alimentaire étant obligatoire pour obtenir un subside majoré.

    Le site Web « moinsdedéchets.wallonie.be » fera prochainement l’objet d’une refonte complète afin de mieux mettre en évidence les actions « anti-gaspi ». Par ailleurs, une nouvelle campagne de sensibilisation sera menée en 2021, dès que la crise sanitaire se sera estompée.

    Elle s’adressera spécifiquement aux 18-24 ans, étant donné que le baromètre 2018 de la prévention des déchets ménagers avait mis en évidence que la tranche des 18-24 ans, composée d’étudiants, de jeunes travailleurs et de jeunes ménages, pouvait faire mieux en matière de lutte contre le gaspillage alimentaire.

    Cette campagne, qui sera confiée à un prestataire spécialisé, aura pour objectifs de sensibiliser le public cible à des habitudes de consommation « anti-gaspillage » (faire une liste des courses, décoder les dates limites de consommation sur les produits, ranger adéquatement le frigo (individuel ou partagé dans un kot), accommoder les restes, réaliser des conserves, et cetera).

    Dans les messages qui seront notamment relayés par des influenceurs sur les réseaux sociaux, sera intégrée la dimension du « consommer local », l’objectif étant aussi de faire passer le message que l’on peut lutter contre le gaspillage alimentaire, tout en achetant et en consommant mieux.