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Les lobbies de la chasse en Wallonie

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 348 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 26/03/2021
    • de NEMES Samuel
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    L'investigation sur la chasse nous a interpellé, notamment, le refus de Monsieur le Ministre de répondre aux journalistes.

    Dans le reportage les journalistes mettent en avant, que le Royal Saint-Hubert Club, qu'on pourrait considérer comme le principal lobby de la chasse en Wallonie, aurait sorti un courrier interne, demandant de se méfier des journalistes de la RTBF et aurait influencé sa volonté de répondre.

    Nous sommes face à une marchandisation de la forêt, une privatisation qui rapporte et qui est réservée aux grands. À Libin, un conseiller communal de l'opposition, explique que la chasse rapporte plus de 680 000 euros/année.

    Pourtant le reportage montre que des solutions existent pour moderniser la chasse, notamment à Daverdisse ou le nourrissage est interdit ou à Butgenbach dans les Cantons de l'Est. Là, les places sont attribuées par tirage au sort au chasseur de la commune, avec une location de droit de chasse par période, à un prix démocratique et sans chasse à cor et cri, chasse qui nécessite en moyenne six balles pour abattre l'animal, favorisant la traque-affût, une chasse silencieuse, plus respectueuse de la forêt, qui demande qu'une balle et demie.

    Va-t-il généraliser l'expérience de Butgenbach en tout ou partie?

    Va-t-il limiter la chasse à cor et à cri et promouvoir la chasse traque-affût ?
  • Réponse du 07/04/2021
    • de BORSUS Willy
    Je ne m’étendrai pas sur la question de l’interdiction du nourrissage, à laquelle j’ai eu l’occasion de répondre en commission ce 30 mars 2021, ni sur l’interprétation de l’honorable membre toute personnelle de mon absence dans le cadre de l’émission consacrée dernièrement à la chasse par la RTBF. Je note simplement que nos services sont bel et bien intervenus dans cette émission et qu’ils se sont exprimés largement et librement.

    L’expérience de la chasse à licences de Butgenbach à laquelle l’honorable membre fait référence vise un mode d’exercice du droit de chasse dans lequel le propriétaire reste titulaire du droit de chasse sur ses bois. À ce titre, il demeure donc responsable :
    - de l’organisation des actions de chasse sur ses bois ;
    - du respect des impositions de tirs décidées par l’Administration pour son territoire ;
    - des dégâts causés par le grand gibier provenant de ses bois ;
    - et de la destination du gibier prélevé à la chasse sur son territoire.

    Ce mode d’exercice du droit de chasse ne permet sans doute pas de garantir au propriétaire des revenus directs aussi importants que ceux procurés par une location classique du droit de chasse à un chasseur.

    Il implique aussi pour le propriétaire d’investir au départ dans une infrastructure cynégétique conséquente pour pouvoir chasser en traque-affût, qui avec l’affût, est le procédé de chasse habituellement utilisé dans les chasses à licences. On compte par moins de 10 postes d’affûts surélevés par 100 ha à installer. Il est clair qu’un tel investissement se justifie plus dans le chef d’un propriétaire qui conserve et exerce son droit de chasse, que dans celui d’un locataire du droit de chasse qui n’est que de passage. Cette infrastructure doit être disposée selon une logique propre à la traque-affût, qui s’écarte totalement de celle de la battue à cors et à cri. En tant qu’organisateur des actions de chasse sur son territoire, il est ainsi indispensable que le propriétaire puisse disposer d’une expérience personnelle dans ce procédé de chasse par traque-affût qui est encore peu pratiqué, ou à tout le moins qu’il puisse compter sur des personnes compétentes, à même de le mettre en œuvre à sa place.

    Au vu de ces éléments, l’honorable membre comprendra aisément que la décision de recourir à l’organisation d’une chasse par licences revient en premier lieu aux communes propriétaires de bois.

    Les communes qui ont opté pour la chasse à licences tablent sur une meilleure maîtrise des populations de grand gibier et donc sur une réduction des coûts liés aux plantations et aux travaux de protection, en recourant davantage à la régénération naturelle. Elles comptent aussi sur une meilleure coexistence des différents utilisateurs de la forêt qu’autorise la chasse à licences, ainsi que l’intérêt que ce système offre pour chasser près de chez soi, à un coût raisonnable. Une commune est forcément sensible à cet aspect social.

    Cela étant, la chasse en battue à cors et à cri est un procédé de chasse traditionnel pratiqué chez nous et dans un très grand nombre de pays. Même si sous certains aspects elle se est différente de la traque-affût, elle n’en reste pas moins efficace en termes de prélèvement, particulièrement vis-à-vis des sangliers. Dans un contexte de surpopulation de cette espèce, qui pose différents problèmes, il me paraîtrait contre-productif de chercher à vouloir limiter nos procédés de chasse.

    Enfin, à titre d’exemple, les résultats d’une expérience de chasse à licences menée sur un bloc de 1 300 ha en forêt domaniale indivise d’Anlier depuis 2015, montrent que ce type d’organisation de l’exercice du droit de chasse constitue une alternative crédible à la location classique du droit de chasse pour la régulation du grand gibier, non seulement en forêt résineuse comme les expériences menées depuis 30 ans dans l’Est du pays le montrent, mais aussi sur des massifs feuillus avec une population de sangliers plus importante comme à Anlier. J’envisage donc de donner suite positive aux propositions de l’administration d’étendre ce mode d’exercice du droit de chasse à d’autres forêts domaniales en Wallonie, lorsque cela est possible et opportun. En proposant des chasses entièrement équipées, l’administration disposera aussi d’un outil de sensibilisation des chasseurs à la traque-affût, qui est un procédé de chasse qui présente ses propres avantages et qu’il est donc intéressant de faire connaître.