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L'exercice de professions réglementées par des associations sans but lucratif

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 389 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 15/04/2021
    • de MAUEL Christine
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Toute personne voulant réparer ou vendre des cycles en Région wallonne doit prouver, à côté des connaissances de gestion de base, la compétence professionnelle sectorielle.
     
    Dans le cadre de la vente et de la réparation de cycles par exemple, cette disposition semble ne pas s'appliquer aux ASBL qui ne sont pas obligées de passer auprès d'un guichet d'entreprise agréée pour faire enregistrer leurs activités auprès de la Banque-Carrefour des Entreprises.
     
    Cette situation peut ainsi engendrer une concurrence déloyale vis-à-vis d'une PME qui a dû passer par ce cheminement.
     
    Il apparaît que des discussions ont eu lieu afin de mettre fin à cette situation et ainsi rendre les guichets d'entreprises compétents pour toutes les professions réglementées en Wallonie en ce compris les ASBL. Monsieur le Ministre confirme-t-il cela ?
    Dans l'affirmative, peut-il établir un état des lieux ?
     
    Est-il prévu que les ASBL doivent également passer par une agrégation d'accès à la profession ?
     
    Quelles en seraient les conditions ?
  • Réponse du 06/05/2021
    • de BORSUS Willy
    L’article 1er, alinéa 3, de la loi du 27 juin 1921 stipulait que l’association sans but lucratif est celle qui ne se livre pas à des opérations industrielles ou commerciales, et qui ne cherche pas à procurer à ses membres un gain matériel. Il en découlait qu’en principe, les ASBL ne pouvaient pas exercer d’activités commerciales.

    Toutefois, cette règle a été nuancée dans la jurisprudence et la doctrine en ce que les ASBL ont le droit d’exercer quelques activités commerciales complémentaires, pour autant que leurs activités principales ne soient pas de nature commerciale.

    Il en a résulté que les ASBL ont échappé historiquement au champ d’application de la loi-programme du 10 février 1998 relative aux capacités entrepreneuriales (ou accès à la profession) et n’ont donc pas été tenues de prouver qu’elles possédaient les capacités entrepreneuriales, à savoir les connaissances de gestion de base et de compétence professionnelle spécifique à certaines activités réglementées.

    Le nouveau Code des sociétés et associations, entré en vigueur le 1er mai 2019, reformule la définition des associations et ASBL dans son article 1:2. Dorénavant, aucune interdiction d’exercer des activités commerciales et industrielles n’est plus appliquée aux ASBL.

    Le statut d’association est fondé sur deux éléments : la poursuite d’un objectif désintéressé et l’interdiction de distribuer ou procurer directement ou indirectement un quelconque avantage patrimonial à ses fondateurs, ses membres, ses administrateurs ni à aucune autre personne sauf dans le but désintéressé déterminé par les statuts. C’est surtout au niveau de ce dernier élément que les associations se distinguent des sociétés, dont l’objectif est de distribuer ou procurer à ses associés un avantage patrimonial direct ou indirect.

    Il s’ensuit que les associations et ASBL ont donc bel et bien le droit d’exercer des activités commerciales et industrielles, pour autant qu’elles le fassent dans un objectif désintéressé et qu’aucune répartition n’ait lieu.

    Vu ce qui précède, on est effectivement en droit de se demander si, depuis le 1er mai 2019, les ASBL sont également tenues de prouver les capacités entrepreneuriales si elles exercent une activité commerciale.

    L’article 4, § 1er, alinéa 1er, de la loi-programme du 10 février 1998, définit le champ d’application comme suit : « Toute P.M.E., personne physique ou personne morale, qui exerce une activité exigeant une inscription au registre du commerce ou de l’artisanat ».

    Les personnes tenues d’inscrire leurs activités au registre du commerce étaient définies, avant la réforme du droit des entreprises, comme « toute personne qui dispose d’une unité d’établissement sur le territoire belge et y exerce des actes qualifiés commerciaux tels que décrits au Code de commerce, et qui est ainsi présumée avoir la qualité de « commerçant » ».

    Il existait donc un lien clair avec les actes commerciaux, tels que décrits au Code de commerce. L’article 2 du Code de commerce, à présent abrogé, énumérait les actes commerciaux de manière exhaustive, sans faire mention d’un but lucratif quelconque. Néanmoins, il existait un large consensus dans la jurisprudence et la doctrine selon lequel le but lucratif constituait bien un élément indispensable d’un acte de commerce.

    Ce n’est donc pas parce qu’une ASBL exerce des activités commerciales qu’elle pose par définition des actes de commerce tels que visés au Code de commerce. En effet, il y a lieu de faire une distinction entre les deux notions, car les actes de commerce sont posés dans un but lucratif alors que les activités commerciales peuvent avoir un objectif désintéressé.

    En vertu du Code des Sociétés et des Associations, les ASBL peuvent rechercher le « profit » dans un sens large du terme, à savoir une certaine rentabilité pour l’association en question. L’absence de but lucratif dans une ASBL réside plutôt au niveau de l’interdiction de distribuer un avantage patrimonial aux fondateurs, membres, administrateurs ou autres personnes. En effet, les fondateurs, membres et administrateurs d’une ASBL n’ont pas le droit de rechercher un avantage patrimonial direct.

    Cela explique pourquoi les ASBL, même après l’entrée en vigueur du nouveau Code des Sociétés et des Associations au 1er mai 2019, échappent toujours au champ d’application de la loi-programme du 10 février 1998 et ne sont donc pas tenues de prouver qu’elles possèdent les capacités entrepreneuriales.

    En conséquence, le Guichet d’Entreprise ne peut pas aujourd’hui enregistrer les connaissances de gestion de base et les compétences professionnelles des activités réglementées lors de l’inscription d’une ASBL dans la Banque-Carrefour des Entreprises.

    De manière plus générale, nous devons constater que les dispositions légales en matière d’accès à la profession en Wallonie doivent être dépoussiérées et adaptées au contexte économique, juridique et sociétal actuel. C’est donc l’ensemble de la législation qui doit être évaluée, ce que je prépare.

    La problématique de l’extension éventuelle du champ d’application de ces dispositions aux ASBL devra être évoquée au cours du processus d’évaluation.