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Les incitants visant à encourager la consommation d'énergie renouvelable en circuit court

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 453 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 23/04/2021
    • de JANSSEN Nicolas
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie et de la Mobilité
    Monsieur le Ministre me répondait en mars dernier que les communautés d'énergie ne financent pas le réseau qu'elles utilisent pour partager l'électricité entre ses membres. Si l'on accorde une réduction des frais de réseau pour ces membres, cela signifie qu'elle doit être compensée par l'augmentation des frais pour les autres personnes. Il a choisi de ne pas intégrer dans le futur décret un avantage exclusif au profit des communautés mais d'inciter, via la méthodologie tarifaire, l'ensemble des utilisateurs du réseau à consommer l'énergie lors de sa production.

    L'essentiel des frais de réseaux sont fixes et dépendent de la capacité maximale requise par les utilisateurs durant l'année. Si l'autoconsommation locale est maximale à certains moments mais inexistante à d'autres, ça ne va rien changer à ces coûts fixes donc il n'y a pas de ristourne à octroyer aux auto-consommateurs. Cependant, les coûts variables, essentiellement des pertes en ligne, sont très limités. L'électricité consommée en circuit court devrait donc être exonérée de ceux-ci.

    La décentralisation de la production et l'électrification des besoins pourraient conduire à des besoins de renforcement des réseaux considérables sauf si on incite les prosumers à consommer « sur place » ces productions décentralisées. Un coût vérité qui pourrait montrer que l'économie en termes de renforcement des réseaux n'est pas si significative, c'est se donner une chance de limiter ces renforcements de manière économiquement justifiée. Pour les coûts de l'énergie en général, les mécanismes de garantie publique restent utiles selon l'Iddri et l'ADEME, malgré la baisse des coûts du renouvelable.

    Quels seront les incitants à générer et à consommer le renouvelable et, dans le cas des communautés d'énergie, l'électricité « en circuit court » ?

    Quand est-ce que la nouvelle méthodologie tarifaire sera mise en place ?
    Par qui ?

    Des experts indépendants et des représentants du renouvelable participeront-ils ?
  • Réponse du 15/10/2021
    • de HENRY Philippe
    Au vu de la nécessité de se diriger vers un parc de production globalement décentralisé et renouvelable, l’électrification grandissante et les besoins de renforcements de réseaux, il est primordial de trouver un équilibre entre ces différents enjeux.
     
    Les directives européennes 2019/944 et 2018/2001 instaurant de nouvelles formes de partage d’énergie, dont les communautés, prescrivent que « le partage d'électricité, lorsqu'il a lieu, se fait sans préjudice des redevances d'accès au réseau, tarifs et prélèvements applicables, conformément à une analyse coûts-avantages transparente des ressources énergétiques distribuées élaborée par l'autorité nationale compétente. » De ce fait, les communautés d’énergie participeront bel et bien au financement du réseau public qu’elles utilisent pour le partage d’électricité.
     
    Ce principe est par ailleurs confirmé dans les lignes directrices du décret tarifaire, qui prévoit que les utilisateurs contribuent de manière transparente et équitable aux frais de réseau, et aux taxes, surcharges et autres frais régulés.
     
    Ce même décret établit que la méthodologie tarifaire doit contribuer au développement des communautés d’énergie en assurant un équilibre entre la solidarité de la couverture des coûts de réseaux et la contribution aux taxes, surcharges et autres frais régulés d’une part, et l’intérêt d’y participer d’autre part. Il appartiendra à la CWaPE de veiller à cet équilibre dans le cadre de l’établissement de sa méthodologie tarifaire et d’évaluer périodiquement les impacts des communautés d’énergie sur les réseaux. Ce décret est actuellement en cours de modification, mais ces principes conformes aux prescrits européens devraient être maintenus.
     
    La révision en cours a également pour objectif de favoriser la transition énergétique. Les lignes directrices du décret tarifaire visent à ce que les tarifs de distribution soient moins chers lorsque la production d’électricité est abondante et favorisent ainsi les déplacements de charge et les mécanismes de flexibilité. Les GRD pourront définir des plages horaires à prix attractifs, sur base de spécificités locales, pour favoriser les déplacements de charge électrique vers des périodes où la production locale est intense, par exemple l’été en début d’après-midi là où il y a une forte concentration de panneaux photovoltaïques. Cette méthodologie tendra donc à inciter à autoconsommer de manière « locale » et simultanée en fonction aussi de l’abondance d’électricité sur les réseaux.
     
    Ce projet de décret servira de base à la nouvelle méthodologie tarifaire pour la période régulatoire 2024-2028 que la CWaPE, dans le cadre de sa compétence exclusive en la matière, proposera dans les prochains mois et dont la fin des travaux devrait aboutir en 2022-2023.
     
    Pour respecter la nouvelle orientation politique, la CWaPE pourrait ainsi approuver des tarifs comprenant des termes proportionnels (plusieurs plages horaires tarifaires) et des termes capacitaires (comprenant le cas échéant des composantes fixe et flexible selon les disponibilités du réseau, et ce afin d’éviter les investissements trop importants dans celui-ci). Le dossier arrivera bientôt au stade de la première lecture.
     
    Quant à la participation des experts indépendants et des représentants du renouvelable à la confection de la méthodologie tarifaire, il revient au régulateur de consulter les parties intéressées et experts en question. De mon côté, j’ai également organisé durant ce premier trimestre 2021 une large concertation avec toutes les parties prenantes (six rencontres au total), en ce compris les producteurs d’électricité d’origine renouvelable et les associations faisant la promotion de ces énergies.
     
    Le décret concernant les communautés d’énergie, à savoir le décret électricité, visant à transposer les directives précitées est en cours d’adaptation afin de prendre en compte différents aspects soulevés dans les avis remis suite à son adoption en première lecture mi-décembre.
     
    Nous réfléchissons actuellement au moyen le plus pertinent pour inciter les participants aux communautés d’énergie à consommer localement et simultanément ce qui est produit au sein de la communauté.
    Ces incitants peuvent prendre différentes formes et seront analysés dans le cadre facilitateur à mettre en place. Ils devront tendre à favoriser une autoconsommation locale et simultanée pour favoriser les circuits courts et faciliter l’intégration du renouvelable dans les réseaux. Parmi ces incitants, une place particulière sera donnée au « partage d’électricité d’origine renouvelable » qui pourra se faire directement entre membres d’une communauté d’énergie, sans devoir passer par des contrats de fourniture ni être soumis aux contraintes associées.
     
    Un autre mécanisme visant à faciliter l’intégration des productions renouvelables dans les réseaux est celui de la flexibilité technique mise en place par l’article 26, §2 à §2 quinquies du décret électricité, ainsi que ses actes d’exécution. Ce cadre légal vise à assurer un équilibre pérenne entre la maximisation de l’injection et le renforcement du réseau. Ce système est également en phase de révision afin d’en renforcer les mécanismes et de les aligner notamment sur les objectifs en termes de production d’électricité renouvelable.