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Les dégâts causés par les espèces protégées

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 362 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 26/04/2021
    • de SCHYNS Marie-Martine
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    La presse a fait écho aux dégâts de plus en plus importants causés aux cultures par des bandes de corneilles, choucas ou autres freux attirés par les semis réalisés pour certaines cultures (orge, avoine ou froment de printemps). Certaines cultures comme l'orge de brasserie subissent des pertes inquiétantes.

    Depuis trente ans, ces populations ont pratiquement doublé, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir, mais le délicat problème de la cohabitation avec les activités agricoles semble se poser avec de plus en plus d'assiduité. Les techniques utilisées pour les effrayer ou les rendre les semis moins attirants semblent bien dérisoires.

    Certaines voix plaident pour une révision de la liste des espèces protégées afin de réduire le statut de protection des intrus, alors que d'autres plaident au contraire pour maintenir ce statut.

    Dans une réponse qu'il vient de m'adresser, le collègue de Madame la Ministre en charge de l'Agriculture souligne la lourdeur de la procédure de délivrance des autorisations de destruction pour des espèces protégées, au point que cette possibilité d'intervention est pratiquement inopérante, et il indique qu'à son estime, le statut d'espèce gibier est plus adéquat lorsqu'une régulation d'une espèce est nécessaire pour éviter des dégâts. Cependant il me renvoie vers Madame la Ministre pour cette problématique.

    Sous la précédente législature, des méthodes naturelles avaient été soutenues afin de lutter contre les dégâts causés aux cultures. Envisage-t-elle de renforcer et d'amplifier ces expériences ?

    Envisage-t-elle une révision de la procédure de délivrance des autorisations de destruction en cas de danger pour des récoltes afin que celles-ci puissent être plus rapidement délivrées ?

    Envisage-t-elle une révision du statut de ces espèces pour les faire évoluer vers le statut de gibier, comme son collègue semble le suggérer ?
  • Réponse du 01/07/2021
    • de TELLIER Céline
    La forte progression des populations de corvidés n’est pas un phénomène récent. Le doublement des effectifs en trente ans, auquel il est fait référence ici, concerne une période entre 1970 et 2000 et en particulier la corneille noire. Durant cette période, les effectifs du corbeau freux et du choucas des tours ont connu une augmentation plus modérée.

    Depuis le dernier atlas des oiseaux nicheurs de Wallonie (période 2001-2007), les tendances sont à une croissance modérée voire à un léger déclin. Ainsi, sur la période allant de 2013 à 2018 :
    - la corneille noire est passée de 39 000 à 32 000 couples ;
    - le corbeau freux est passé de 15 000 à 18 000 couples ;
    - le choucas des tours est passé de 15 000 à 22 000 couples.

    Certaines espèces font preuve d’une grande faculté d’adaptation et prospèrent dans les milieux modifiés par l’homme. Singulièrement, en raison de la réduction des étendues de prairies permanentes riches en invertébrés et en graines, les corvidés se rabattent sur les graines ou les jeunes pousses, facilement accessibles.

    Les dégâts sont principalement causés par des groupes de jeunes corneilles immatures ou qui n’ont pas trouvé de partenaire sexuel ou de lieu de nidification adéquat. Très mobiles, ces bandes d’une dizaine à une centaine d’individus se tiennent en terrain découvert, surtout dans les régions d’agriculture intensive où elles peuvent faire d’importants dégâts en peu de temps.

    Au-delà des répulsifs qui enrobent les graines, des techniques plus naturelles existent et méritent d’être valorisées et d’être testées avant le recours à des techniques létales.

    Par exemple, l’implantation de structures paysagères là où elles font défaut, favorise entre autres l’installation de couples nicheurs de Corneille noire. La présence d’un couple nicheur dans les environs d’une parcelle prévient l’invasion de bandes de corneilles célibataires et protège ainsi les cultures avoisinantes dans un périmètre d’environ 10 hectares.

    Autres exemples, lors de la mise en place du maïs, une pause de quelques jours entre le travail du sol et le semis ainsi qu’un enfouissement propre des engrais de ferme réduit l’attractivité du champ pour les corneilles ; un semis tardif sur un sol réchauffé favorise une levée rapide qui laissera moins de temps aux corvidés pour leur prédation.

    Certaines méthodes d’effarouchement existent, mais doivent être alternées, voire combinées pour maintenir leur efficacité.

    Suivant la directive européenne sur la protection des oiseaux, la modification du statut des espèces de corvidés n’est éventuellement envisageable que pour la Corneille noire et la Pie bavarde. Cependant, cette directive interdit la pratique de la chasse durant la période de reproduction et de dépendance des jeunes, ce qui suppose que le tir d’individus durant le printemps, même classés comme gibier, nécessitera toujours une dérogation.

    La procédure de délivrance de dérogations prévue par la Loi sur la conservation de la nature a déjà fait l’objet d’une simplification pour, dans certains cas définis, ne plus nécessiter l’avis du Pôle ruralité sur chaque dossier individuel. Dans le cadre de la réflexion sur les adaptations à apporter à la loi sur la conservation de la nature, l’opportunité d’aller vers une simplification étendue sera examinée.