/

La technique agricole du "sniper des champs"

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 480 (2020-2021) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 21/05/2021
    • de SOBRY Rachel
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Afin de limiter l'utilisation de pesticides, le Centre wallon de recherches agronomiques de Gembloux (CRA-W) a lancé un projet de « spot-spraying », également appelé technique du « sniper des champs ». L'idée étant de ne cibler que les mauvaises herbes dans les champs et ainsi de réduire grandement la quantité de pesticides.

    Deux méthodes permettent cette pulvérisation sélective. La première nécessite d'établir une cartographie de la terre à pulvériser via des données collectées par un drone à basse altitude. Le résultat est alors intégré dans un pulvérisateur dont les buses ne ciblent que les zones à pulvériser. La seconde méthode consiste en l'utilisation d'un pulvérisateur « intelligent », muni de capteurs qui donnent l'ordre, en temps réel, de pulvériser ou non selon la présence de mauvaises herbes.

    Les résultats semblent concluants puisqu'une économie de 65 à 95 % de pesticides a pu être observée sur une série de cultures. Hélas, un pulvérisateur « intelligent » muni de capteurs coûte environ le double d'un appareil classique. L'utilisation d'un drone implique également des coûts supplémentaires ainsi qu'un fort investissement en temps.

    Le Gouvernement s'étant engagé à promouvoir les pratiques de protection des sols et à sortir progressivement des pesticides, conformément aux décisions européennes, j'ai plusieurs questions à poser à Monsieur le Ministre.

    Quelle est sa position quant à l'utilisation de cette technique du « sniper des champs » ?

    S'agit-il d'une réelle option pour réduire l'utilisation de pesticides ?

    Comment rendre cette technique économiquement abordable ?

    Des aides ou primes régionales sont-elles envisagées ?
  • Réponse du 18/06/2021
    • de BORSUS Willy
    Afin de limiter l’utilisation de pesticides, le Centre wallon de recherches agronomiques de Gembloux (CRA-W) a, en effet, lancé un projet de « spot-spraying », également appelé technique du « sniper des champs ». L’idée étant de ne cibler que les mauvaises herbes dans les champs et ainsi de réduire grandement la quantité de pesticides.

    Deux méthodes permettent cette pulvérisation sélective :
    • La première nécessite d’établir une cartographie de la terre à pulvériser via des données collectées par un drone volant à basse altitude et qui détecte les endroits du champ où il y a des problèmes. Le résultat est alors intégré dans un pulvérisateur dont les buses ne ciblent que les zones à pulvériser ainsi détectées.
    • La seconde méthode consiste en l’utilisation d’un pulvérisateur « intelligent », muni de capteurs qui détectent la présence d’adventices et donnent l’ordre, en temps réel, de pulvériser ou non selon la présence de mauvaises herbes.

    Les résultats semblent concluants puisqu’une économie de 65 à 95 % de pesticides a pu être observée sur une série de cultures. Hélas, un pulvérisateur « intelligent » muni de capteurs coûte environ le double d’un appareil classique. L’utilisation d’un drone implique également des coûts supplémentaires ainsi qu’un fort investissement en temps.

    Ces nouvelles technologies visant à réduire drastiquement l’usage de produits de protection des plantes – de synthèse ou non – doivent s’envisager en combinaison avec d’autres voies pour réduire l’usage de produits de protection des plantes.
    Je pense en particulier à de nouvelles techniques culturales (comme les couvertures des interlignes ou des cultures associées) ou de désherbage mécanique ainsi qu’aux sélections et améliorations de toutes natures afin de disposer de variétés plus résistantes aux maladies et donc moins exigeantes en traitements phytosanitaires.
    Le CRA-W travaille en parallèle sur ces trois approches et les combine sur ses plateformes multidisciplinaires de comparaison de système de culture afin d’apprécier jusqu’où il est possible de réduite l’usage de pesticides tout en conservant des rendements et des niveaux de rentabilité corrects.

    Le projet de recherche InnovEau (financé par la SPGE) permet au CRA-W d’étudier, cette technique récente de spot spraying depuis 2020. Les premiers résultats montrent que cette technologie a permis des réductions importantes (jusque 90%) dans le cas de traitements foliaires spécifiques comme la lutte contre les chardons dans les cultures de betteraves ou prairies, des repousses de pommes de terre ou encore des graminées dans les cultures de colza. Pour ce genre d’interventions, cette technologie est extrêmement prometteuse.

    Cependant, des défis technologiques et agronomiques doivent encore être surmontés tels que la gestion des grandes quantités de données en un temps très court (délai de réaction du pulvérisateur) et le développement des algorithmes pour l’ensemble des cultures et des adventices quels que soient leurs stades de développement. Enfin, l’efficacité du désherbage par rapport à une pulvérisation classique doit encore être évaluée.

    Reste donc la question du coût de ces technologies et de leur appropriation par les exploitants de toutes tailles et de toutes natures.

    Une piste pour répondre à ce défi est de mutualiser les équipements qui en effet coûtent plus cher et nécessitent également une plus grande technicité de l’opérateur. Ces investissements doivent s’envisager pour du matériel de pulvérisation de grande capacité et disposant de la technologie lui permettant de couper les buses à la demande, comme on en rencontre dans les entreprises agricoles ou dans des CUMA/coopératives agricoles.

    Ce type de matériel a un débit de chantier très important (vitesse et largeur de travail importantes) ce qui permet des utilisations annuelles sur plus de 1 500 ha. Le coût d’investissement élevé est donc supporté par un nombre d’ha plus important et un grand nombre de fermiers bénéficient de ces avancées technologiques. Bien entendu une telle mutualisation implique soit de sous-traiter le travail soit une mise en commun de matériel agricole. C’est donc en termes d’évolution de l’organisation du travail des exploitations qu’il faut aussi apprécier l’appropriation de ces technologies nouvelles.

    La Région offre déjà des primes à l’investissement en matériel agricole, primes qui sont renforcées en cas de CUMA. Ces primes seront bien entendu accessibles à ceux qui souhaitent acquérir ce type de matériel.