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L'impact de la hausse des prix des métaux de base sur l'industrie wallonne

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 485 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 21/05/2021
    • de FONTAINE Eddy
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    La reprise économique dans le secteur industriel peut déjà se faire ressentir au niveau des prix des métaux de base, tels que le cuivre et le fer, qui ont plus que doublé en moins d'un an.

    Cette augmentation des prix est liée au fait paradoxal que dans le cadre de la transition énergétique en cours, la consommation des métaux et d'énergie du secteur industriel dans son ensemble explose.

    Cette forte demande met une grande pression non seulement sur les prix, mais aussi sur l'approvisionnement industriel, souvent à flux tendu pour éviter un important coût de stockage.

    Par ailleurs, la Commission européenne souhaite réduire la dépendance des États membres aux métaux en proposant de renforcer la collecte et le recyclage des batteries, contenant notamment du cuivre. Il serait question d'un taux de 70 % de collecte obligatoire d'ici 2030.

    Dans sa transition énergétique en cours, l'industrie wallonne dans son ensemble voit-elle sa consommation en métaux augmenter ?

    La disponibilité de l'approvisionnement des ressources est-elle garantie et suffisante pour les entreprises en Wallonie ?

    Quels sont les éléments de la politique économique de Monsieur le Ministre qui permettront à l'industrie wallonne de continuer sa transition énergétique malgré l'explosion des prix de matériaux de base ?

    La reprise des exportations et du commerce extérieur permettra-t-elle de compenser l'impact lié à celle-ci ?

    Enfin, quel développement entend-il mettre en oeuvre pour la filière du recyclage de métaux en Wallonie dans le cadre de l'approvisionnement des entreprises en Wallonie ?
  • Réponse du 14/06/2021
    • de BORSUS Willy
    Effectivement, la transition verte et numérique de l’Europe et de la Wallonie reposera en partie sur le leadership industriel dans la production de batteries, de véhicules électriques, de panneaux solaires et d’éoliennes.
     
    Toutefois, cet objectif est compromis par notre dépendance croissante à l’égard de la Chine et d’autres régions pour l’approvisionnement en volumes plus importants des métaux et des minéraux nécessaires à ces technologies - des matières premières essentielles (par exemple, le cobalt, le lithium, le silicium, les terres rares), de celles pour lesquelles l’Europe dispose d’une base industrielle durable, mais affaiblie (par exemple, l’aluminium, le cuivre, le nickel).
     
    L’augmentation de la demande mondiale en matières premières a engendré une augmentation importante du prix des métaux et des minéraux industriels, imposant des coûts supplémentaires considérables pour l’ensemble de l’industrie européenne. Dans le même temps, l’Europe est un exportateur important de ferrailles, de véhicules en fin de vie et de déchets d’équipements électriques et électroniques (« DEEE »). Ceux-ci représentent un flux de métaux significatif quittant le territoire européen à destination de l’étranger. À l’heure actuelle, les taux de recyclage de produits en fin de vie pour de nombreux métaux sont très faibles en Wallonie.
     
    Toutefois, la gestion de certains types de déchets contenant des métaux (DEEE, piles et accumulateurs, batteries de traction des véhicules hybrides et électriques, panneaux photovoltaïques, véhicules hors d’usage…) est soumise au système de responsabilité élargie des producteurs (REP). Dans ce cadre, diverses conventions environnementales liant la Région et les organismes de gestion des obligations de reprise (FEBELAUTO, PV Cycle…) viennent d’être élaborées ou renouvelées pour une durée de deux ans. Ces conventions visent à renforcer la prévention, la collecte sélective et le recyclage de ces types de déchets, et à déterminer les modes d’organisation, de mise en œuvre et de financement de l’obligation de reprise. Elles constituent dès lors un moteur pour développer de nouvelles filières de recyclage en Wallonie.
     
    Il est donc évident que dans ce contexte, l’économie circulaire représente un enjeu important pour la filière métallurgique en Wallonie. Ainsi, derrière les tonnes de ferrailles et d'objets issus notamment de nos déchets électroniques et de nos véhicules, des projets d'exploitation du cuivre, du zinc, des terres rares, etc. se mettent en place en Wallonie. D'aucuns évoquent même une « réindustrialisation de la Wallonie ». Celle-ci s’appuie sur un grand savoir-faire industriel, technologique et scientifique ainsi que sur des compétences multiples. Elle repose sur un maillage d’entreprises (fournisseurs, sous-traitants, clients) qui a permis la création et le développement des industries de base et de transformation « du minerai aux produits finis ou semi-finis ».
     
    Cette expertise est à présent mise au service de la filière inverse, de la valorisation du produit fini usagé à l’élaboration de nouvelles matières de base, constituant à leur tour les « minerais » de nos industries de transformation. C’est la « métallurgie à l’envers », la « Reverse Metallurgy ».
     
    Le potentiel de valorisation des métaux présents au sein des déchets est très important. D’une part, les gisements de métaux existent localement et sont ou ont été générés par nos propres modes de consommation en produits finis ou semi-finis et par les fabrications des industries wallonnes. Les métaux à revaloriser se trouvent dans nos centres d’enfouissement techniques, centres de récupération divers, terrils, flux issus de nos fabrications industrielles, etc. D’autre part, à ce flux interne s’ajoute un flux très important résultant de la balance import-export de déchets divers contenant des métaux.
     
    Le recyclage et la maîtrise du cycle de l’efficience des matières constituent un moyen clé pour réduire la dépendance de la Wallonie à un approvisionnement extérieur actuellement synonyme de facteur impactant négativement la performance d’un secteur industriel important en Wallonie.
    C'est ainsi que suivant le principe de l'économie circulaire, le projet « REVERSE METALLURGY » a débuté fin 2014 avec pour objectif de créer, en Wallonie, une plateforme d’excellence industrielle, technologique et scientifique en « Reverse Metallurgy », créatrice de valeur ajoutée et d’emploi et reconnue au niveau international. Elle associait divers partenaires industriels (grandes, moyennes et petites entreprises), scientifiques (universités et centres de recherches) et autres organismes actifs dans le domaine.
     
    Cette initiative tend à s’amplifier avec un positionnement de la Reverse Metallurgy sur un nouveau portefeuille de projets en cohérence avec les politiques actuelles (DPR, spécialisation intelligente, Circular Wallonia, Green Deal, Plan de Relance...) et en particulier les transitions énergétique et numérique.
     
    Ces nouveaux projets viseront à poursuivre une métallurgie du futur fondée sur l’économie circulaire pour favoriser d'une part l'upcycling des matériaux et accroître d'autre part, la collecte sélective et la valorisation des déchets métalliques. Ils permettront de positionner la Région wallonne comme pôle d'excellence en matière de recyclage, mais aussi comme productrice de matières premières et exportatrice de technologies liées à ces matériaux.
     
    En outre, afin de favoriser les partenariats interrégionaux sur cette question et activer les leviers européens au bénéfice des entreprises wallonnes, la Wallonie a récemment adhéré à l’Alliance européenne des matières premières (ERMA). Cette participation à l’ERMA aidera notre Région à faciliter les partenariats et les relations clés sur l’ensemble du continent européen, ce qui permettra à la Wallonie de faire face aux transitions verte et numérique. Cette alliance fédère 500 organisations issues de l’industrie, des agences gouvernementales ainsi que des ONG et organisations professionnelles. L’ERMA vise à sécuriser l’accès européen en matériaux stratégiques (métaux et minéraux critiques) et à développer le savoir-faire ainsi que les écosystèmes industriels européens. Lancée en septembre 2020 dans le cadre du plan d’action européen sur les matières premières critiques, l’ERMA contribue à assurer un approvisionnement sûr et durable de matières premières en Europe.