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Les contrôles des captages d'eau

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 422 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 26/05/2021
    • de DEMEUSE Rodrigue
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Les autorisations d'effectuer des captages d'eau sont soumises à l'avis de l'administration et lorsque le débit envisagé est important, des tests spécifiques sont réalisés. Il en va à la fois du respect de l'environnement et des nappes phréatiques, mais également de la sécurité puisque en cas de pompage inadapté, des dégâts peuvent être causés aux constructions en surface.

    Je souhaiterais connaître les vérifications qui sont effectuées a posteriori pour contrôler la quantité d'eau extraite des sous-sols.

    Il existe en effet des cas d'agriculteurs, fruiticulteurs plus spécifiquement dès lors que leurs besoins en eau sont importants, qui connectent les installations d'irrigation de plusieurs terrains bout à bout, et d'un seul captage, pouvant alimenter une grande superficie. La quantité d'eau extraite ne correspond alors plus du tout aux besoins de la parcelle sur laquelle le puits est établi.

    Pareilles connexions sont-elles autorisées ? Peuvent-elles s'étendre au-delà du territoire de l'autorité qui autorise le puits : la commune ou la Région ?

    Les évolutions climatiques amenant plus de sécheresse et rendant les agriculteurs plus fragiles, on peut imaginer que recourir à une irrigation artificielle devient nécessaire pour beaucoup, mais cela ne se fait pas sans impact environnemental et on rentre alors dans un cercle vicieux. Quelle est l'analyse de Madame la Ministre de la situation ? Comment en sortir ?
  • Réponse du 16/09/2021
    • de TELLIER Céline
    Chaque permis impose à l’exploitant des débits (horaire, journalier et annuel) qu’il est tenu de respecter.

    Ces débits, notamment pour les prises d’eau destinées à l’irrigation, sont généralement fixés (et donc parfois limités) sur base des résultats de pompages d’essais, réalisés préalablement. Ils permettent de quantifier les potentialités de l’ouvrage de prise d’eau par rapport aux besoins projetés du demandeur et de vérifier les éventuelles incidences quantitatives de la prise d’eau projetée aux débits demandés et susceptibles d’être autorisés sur les autres ouvrages existants à proximité et sur la ressource en eau souterraine.

    Lors du traitement de la demande de permis, l’on tient compte également des surfaces à irriguer et des types de cultures envisagées. Au besoin, un contact est établi avec le demandeur afin de mieux cerner ses besoins en eau pour l’irrigation.

    En plus de débits maximums autorisés à ne pas dépasser, des conditions particulières peuvent être imposées dans les permis accordés (sur base de l’analyse du contexte hydrogéologique local à régional) afin notamment de limiter les prélèvements, à savoir :
    - fixer un niveau dans l’ouvrage de prise d’eau sous lequel le niveau d’eau ne pourra descendre ;
    - imposer un piézomètre de contrôle superficiel si une incidence limitée est constatée sur le réseau hydrographique et/ou la nappe superficielle ;
    - réduire la durée de validité du permis afin de revoir les volumes autorisés après quelques années seulement.

    Dans ce cadre, il est demandé à l’exploitant de communiquer annuellement à l’Administration un rapport de suivi permettant, si nécessaire, de réduire les prélèvements autorisés.

    La condition particulière suivante est généralement reprise dans les permis accordés à savoir : « Le volume peut être réduit si le prélèvement autorisé est susceptible d’affecter la sécurité des personnes et des biens, la qualité de l’eau de la nappe aquifère exploitée, de produire une réduction du volume prélevé dans d’autres ouvrages de prise d’eau ou de provoquer une sollicitation excessive de la nappe aquifère par rapport à son alimentation et à ses fonctions naturelles ».

    L’exploitant est par ailleurs tenu de déclarer annuellement à l’Administration et au plus tard pour le 31 mars le volume d’eau prélevé sur l’ouvrage de prise d’eau souterraine au cours de l’année précédente (en application et conformément aux conditions intégrales et sectorielles prises d’eau souterraines).

    Enfin, une prise d’eau et son dispositif obligatoire de comptage des volumes prélevés peuvent toujours être contrôlés par le Département de la Police et des Contrôles.

    Chaque dossier est traité au cas par cas. Il n’est pas impossible qu’un puits serve à irriguer plusieurs terrains qui pourraient se trouver dans des communes différentes. Mais les débits maximums autorisés tiendront toujours compte de la situation réelle. Il est parfois préférable de ne réaliser qu’un seul puits pour plusieurs parcelles plutôt que plusieurs forages, chacun d’eux représentant toujours un risque de contamination de la nappe à partir de la surface.

    Sur base des déclarations de superficies 2020, 1 692 hectares de superficie ont été déclarés comme irrigués dans le cadre de la conditionnalité. Cela ne représente que 0,23 % de la superficie agricole totale wallonne. Ce sont sans surprise les légumes qui prennent la plus grosse part avec 55 % de ces superficies (essentiellement carottes, haricots, pois et légumineuses, le tout pour près de 75 % des légumes), puis les pommes de terre et betteraves (plantes sarclées) avec 26 % suivies des céréales (11 %) et des prairies (y compris fourrages) pour 7 %.

    Il est possible que des parcelles non déclarées, qui concernent des cultures ne donnant pas droit à des primes du premier pilier PAC (droits au paiement de base), soient aussi irriguées, mais comme il n’y a pas de déclaration pour celles-ci, elles ne sont pas quantifiables. Cela concerne notamment tous les vergers qui représentent 1 700 ha en 2019, dont 51 % de poires et 35 % de pommes, essentiellement sur la province de Liège. Les pommiers ne sont pas irrigués. Les poiriers peuvent l’être via un système d’irrigation au goutte-à-goutte, mais cela reste rare.

    L’impact environnemental de l’irrigation telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui reste faible, mais il y a bien une augmentation de la demande. On constate en effet une augmentation des demandes de permis en vue de réaliser des forages pour l’irrigation depuis 2018.

    L’utilisation des ressources en eau pour l’agriculture devra se faire à l’avenir avec résilience et innovation. Les aspects « demande agricole » et « nouvelles ressources » sont notamment pris en compte dans la mise en œuvre de la stratégie intégrale sécheresse (SIS). Les réponses à ces enjeux s’inscrivent également dans le concept d’économie circulaire.

    Concrètement, les ressources aquifères de notre Région ne peuvent pas être utilisées pour de l’irrigation à grande échelle. En fonction des besoins, l’offre pourrait être complétée par le recours à des ressources alternatives, comme par exemple la valorisation des eaux usées traitées (RE-USE), des eaux de pluies ou de démergement, qui sont des solutions complémentaires et durables pour préserver l’état quantitatif de nos eaux souterraines. De plus, des réseaux décentralisés pourront être développés à partir de ressources locales, mais aussi, de l’eau retenue ou réutilisée comme le stockage d’eau de pluie ou de surface, l’eau de carrières désaffectées, la recharge ciblée à partir d’excédents d’eau ou de réservoirs d’orage, la filtration en berges, la RE-USE, et cetera.

    Enfin, d’un point de vue agronomique, l’agriculture devra s’adapter aux conditions climatiques avec la mise en place de cultures ou variétés plus résistantes à la sécheresse et des techniques limitant l’utilisation de l’eau ou l’évapotranspiration des sols, comme par exemple les techniques de conservation des sols, l’agroforesterie ou encore le goutte à goutte.