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L'intérêt de l'agriculture urbaine

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 541 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 18/06/2021
    • de BELLOT François
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    L'agriculture verticale pourrait compenser le changement climatique et permettre de cultiver des fruits et légumes qui ne seront plus présents en pleine terre en 2050. Le changement climatique et la démographie urbaine sont des catalyseurs de projets agricoles urbains.

    Les modèles d'agriculture urbaine varient notamment en fonction du profil des villes. En Belgique, l'accent est porté sur le circuit court.

    Si l'intérêt est réel pour cette agriculture délocalisée, la taille des projets reste modeste.

    Ainsi, Delhaize et Colruyt ont développé des potagers de toits dont les produits se trouvent dans leurs commerces et ont développé des fermes verticales dont la culture d'herbes aromatiques requiert 90% d'eau en moins et 20 fois moins de surface qu'en agriculture classique.

    Dans notre pays, les projets d'agriculture urbaine augmentent puisque 40 entreprises se sont activées dans ce secteur en 10 ans.

    Monsieur le Ministre soutient-il ce type d'activités agricoles ?

    Dans quelles limites éventuelles ? Quels sont les projets wallons dans ce domaine ?

    Pour la Wallonie, privilégie-t-il des fermes urbaines aux installations modestes ou soutient-il l'idée de l'"indoor farming" plus intensive ?

    Le C-RAU s'est donné la mission d'identifier des modèles économiques de l'agriculture urbaine.
    A-t-il d'ores et déjà contact avec ce centre afin de suivre l'évolution de ses analyses ?

    L'agriculture en pleine terre nourrira l'expansion démographique.

    Selon des experts du secteur, il est possible que certains fruits et légumes ne seront plus présents en pleine terre en 2050.

    L'agriculture verticale pourrait être une alternative. L'agriculture verticale peut permettre de cultiver des fruits et légumes qui ne seront plus présents en pleine terre en 2050.

    N'est-il pas judicieux de déjà penser les lieux de culture de ces légumes et fruits ?
  • Réponse du 12/07/2021
    • de BORSUS Willy
    L’agriculture urbaine est de nature à participer aux enjeux d’un développement durable basé sur les trois piliers que sont l’économie, le social et l’environnement.
     
    Bien qu’elle soit toujours en phase de développement, et forcement émergente, elle n’a pas pour finalité d’entrer en concurrence avec l’agriculture rurale telle que nous la connaissons aujourd’hui, mais de lui être complémentaire.  Elle a en tout cas le mérite de rapprocher les producteurs et consommateurs et de revaloriser nos produits locaux. C’est ce qui justifie mon soutien à ce secteur.
     
    J’ai inauguré en septembre 2020, la plateforme «  WASABI ». Cet outil pédagogique, développé avec le support du Spin off « Green Surf » de Gembloux Agro Bio Tech, est à la pointe de l’éco-innovation et a pour vocation de familiariser ses usagers avec de nouvelles formes d’agriculture urbaines et périurbaines.
     
    Au sein de cette même faculté, notons aussi le projet « SMART AQUAPONIC » et le projet « GROOF(Greenhouses to reduce CO2 on roofs) ». Des recherches sont également en cours à l’UCLouvain. Plusieurs projets de recherche d’envergure internationale sont également cofinancés par la Région wallonne.
     
    Il ne s’agit pas du seul projet en agriculture urbaine en Région wallonne. Le Centre de Recherche en Agriculture urbaine de l’Université de Liège Gembloux Agro-Bio Tech a également développé et mis en place, plus de 150 bacs potagers (système BAcUp) sur les toits et au pied de divers bâtiments à Bruxelles, à Gembloux et à Mons.
     
    Des initiatives consistant à mettre à disposition de candidats des surfaces de terrains communaux ont vu le jour via les couveuses d’entreprises comme CREaFarm.
     
    Deux projets en aquaponie ont été cofinancés par la Wallonie, l’un sur la valorisation innovante des effluents de pisciculture par la méthode aquaponique. (Gembloux Agro-Bio Tech – ULg - Pr H. Jijakli), et l’autre « AquaLoci » ayant pour objectif le développement d’un pilote d’aquaculture intégrée associé à un circuit court de distribution.
     
    Le projet « Verdir » de l’ULg à Herstal, cofinancé par le FEDER et la Wallonie, au sein du plan « Green life », pour la réhabilitation de la friche industrielle en bord de Meuse, consiste à aménager entre autres des aires de culture destinées à alimenter un circuit court de distribution, mais aussi une pépinière de containers « Smart Box » pour l’extraction de molécules destinées aux biotechnologies.
     
    On recense quelques projets professionnels hors-sol dont ceux portés par un producteur wallon spécialisé en plantes aromatiques en pots, un producteur de tomates sous 7 ha de serres et un couple d’agriculteurs utilisant la chaleur résiduelle de leur unité de cogénération pour produire des tomates sous 1 ha de serres.
     
    D’autres projets avec une finalité sociale ont vu le jour en Wallonie : Les projets de Ceintures Alimen’Terre, existent à Liège, Charleroi, Ath, Verviers, Tournai, et dernièrement à Namur. Favoriser ces ceintures alimentaires fait partie des objectifs de la Wallonie via la DPR. L’appel à projets « Verdissement des places publiques » lancé en 2017 par la Wallonie, a permis  d’installer des  Potagers communautaires, des plantations de verger, dans 32 communes.
     
    « Terres en vue » met à disposition des terrains agricoles pour les candidats maraîchers.
     
    L’ASBL « Nos Oignons » organise dans le Brabant wallon des ateliers collectifs hebdomadaires de jardinage en entreprise agricole, sous la forme d’un échange de services.
     
    Toutes ces initiatives démontrent un intérêt grandissant pour cette agriculture dans notre région.
     
    L’agriculture urbaine ne peut se résumer à de l’indoor farming. Je préfère parler de l’agriculture urbaine et périurbaine. Le périurbain est propice à la culture pleine terre tout comme à la campagne.
     
    L’idée n’est pas de concurrencer, mais de compléter ce qui se fait à la campagne. Il y a beaucoup de mouvements de citoyens qui cultivent sur leur balcon, en intérieur d’ilots. Tous ces mouvements et d’autres font redécouvrir la production agricole et plus particulièrement à la production horticole.
     
    Quand on s’éloigne du centre et que l’on trouve des interstices des villes ou des parcelles de terre plus grandes, il est bien entendu important que cette terre soit préservée.
     
    En urbain et même périurbaine, où il y a peu de places et beaucoup de gens, on doit produire avec peu de ressources et recycler. Cela contraint à de l’innovation qui peut être inspirante dans les campagnes.
     
    Soutenir cette innovation ne doit pas se faire au détriment des exploitants plus classiques que sont les producteurs agricoles et horticoles conventionnels ou bio, confrontés à des défis d’adaptation permanents. Il faut aussi que la recherche poursuive son travail pour arriver à mieux préciser ce qui est réellement durable au niveau de ces spéculations innovantes.
     
    Les travaux menés par le C-RAU sont en cours, d’abord au niveau des techniques et des recommandations à faire dans leur application selon le contexte urbain, périurbain et rural. Ensuite, le C-RAU est effectivement en train d’identifier les modèles économiques, mais il est au début de l’étude. Ces études devraient aboutir à des recommandations permettant la stimulation du développement de la filière.
     
    Une piste sérieusement envisagée est d’intégrer la production primaire et la transformation au sein d’une même entreprise. Nous savons que la marge bénéficiaire est surtout obtenue sur le produit fini. La création des outils de transformation mutualisés s’ils sont trop coûteux pour une seule entreprise doit être encouragée, s’ils sont économiquement viables.
     
    Quant à la nécessité de déjà penser les lieux de culture de ces légumes et fruits, il y a lieu de garder toutes les solutions possibles que ce soit du hors-sol et de la pleine terre. La résilience ne se fera que si l’on a une palette d’outils à disposition (donc différents systèmes de production possibles). Il faut en tout cas que tous ces systèmes utilisent moins de ressources naturelles, recyclent davantage et s’inscrivent donc dans une économie circulaire et locale.
     
    Au-delà des menaces sur la production, nous savons que, selon le Collège des Producteurs, la Wallonie n’est autonome qu’à 17 % en fruits et légumes « indigènes », et l’objectif est d’arriver à 30 % en 2028. Ce chiffre ambitieux ne tient pas compte d’une tendance à consommer plus de fruits et légumes. Cette tendance est encouragée par les revues médicales telles que « Eat-Lancet » qui recommande de doubler la ration quotidienne en fruits et légumes.