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L'impact environnemental du principe d'économie circulaire appliqué à la construction

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 468 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 18/06/2021
    • de LENZINI Mauro
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Il est notoire que l'industrie cimentière est une grosse productrice de CO2 et plus largement tout le domaine de la construction est dans la même situation. Récemment, la presse évoquait la possibilité de développer en Basse Meuse liégeoise un centre d'excellence en économie circulaire. Parmi les quelques idées évoquées dans cet article, deux, en relation avec la construction, ont retenu mon attention : le béton circulaire et la réutilisation des terres d'excavation en matériaux de construction.

    L'approche béton circulaire est déjà mise en œuvre depuis de nombreuses années, notamment, à Liège par INTRADEL via Recyliège, avec un problème de « fin de chaîne » pour les particules plus fines.

    Il y a exactement 12 mois, je questionnais Madame la Ministre sur une technologie prometteuse, développée en région bruxelloise, sur l'utilisation de terres d'excavation pour la construction de blocs destinés à la construction.

    Aujourd'hui, d'aucuns envisageraient la mise en œuvre à grande échelle, sur le site de Chertal, de ces technologies circulaires liées aux matériaux de construction.

    A-t-elle connaissance de ces projets ?
    Le cas échéant, quel est selon elle l'impact environnemental de ces procédés ?

    Envisage-t-elle d'ajouter une étape supplémentaire à cette technique circulaire où les résidus ultimes du traitement des bétons récupérés, les particules plus fines que j'évoquais ci-avant, pourraient être incorporés dans les blocs fabriqués à partir des terres d'excavation ?

    Enfin, dans le respect et l'application de la DPR, qui prévoit de soutenir les initiatives favorisant l'économie circulaire, quelles actions envisage-t-elle de mettre en place pour le développement de ce type d'initiative ?
  • Réponse du 10/08/2021
    • de TELLIER Céline
    L’accélération de la réutilisation et du recyclage des déchets de construction-démolition et de la circularité dans le domaine de la construction est à l’agenda tant de l’Union européenne que de la Wallonie.

    Le Plan wallon des déchets ressources adopté par le Gouvernement dans une optique de circularité comporte diverses mesures relatives aux travaux de construction et de démolition et à leurs déchets. Il ambitionne de développer le tri et la valorisation maximale de ceux-ci, en ce compris les terres excavées, par différents biais tels que la réglementation, la recherche et le soutien aux acteurs.

    Par ailleurs, le Gouvernement wallon a adopté la stratégie Circular Wallonia qui entend promouvoir et accélérer la transition vers une économie circulaire en Wallonie. Cette stratégie contient 6 feuilles de route sectorielles, dont une est entièrement consacrée au secteur de la construction. Ce secteur représente à lui seul plus de 35 % des déchets produits, alors que ces derniers pourraient dans de nombreux cas soit être évités, soit être réemployés ou recyclés. C’est pourquoi il est essentiel de prévenir la production de déchets dans le secteur de la construction et de trouver des opportunités pour transformer un déchet en ressource.

    Afin de concrétiser les mesures prévues dans le Plan wallon des Déchet-Ressources et Circular Wallonia, la Wallonie a mobilisé un budget de 184 millions d’euros dans le cadre de son plan de relance pour favoriser l’économie circulaire. Parmi ces montants de l’ordre de 50 millions seront consacrés à l’écoconception, à l’upcycling, à la réutilisation et au recyclage des matériaux de construction-démolition, via notamment le lancement de divers appels à projets.

    En ce qui concerne plus particulièrement les activités envisagées sur le site de Chertal, les démarches relatives à la déconstruction du site sont en bonne voie. Cependant, une fois les autorisations octroyées et les analyses effectuées, notamment en ce qui concerne les sols, la déconstruction prendra quelques années. On ne peut que se réjouir de la possibilité d’y installer des entreprises en lien avec la prévention des déchets, leur réutilisation et l’économie circulaire.

    Dans ce contexte, l'utilisation de terres excavées pour la construction de blocs destinés à la construction pourrait constituer un type d’entreprise répondant au besoin de valoriser des déchets en ressources. Toutefois, l’utilisation de ces blocs dans la construction présente certaines limites. Ils peuvent être utilisés en murs intérieurs de cloisons par exemple. Ces blocs peuvent être rendus plus résistants via l’ajout de chaux ou de particules fines en très petites quantités, mais en aucun cas, ils ne pourront être utilisés en blocs de structure. L’ajout de particules fines dans les blocs en terre crue n’est envisageable qu’en petites quantités, ce qui en soi demeure une approche intéressante de synergie industrielle entre deux entreprises situées sur un même site.

    Cependant, l’objectif étant de pouvoir recycler ou de valoriser ces blocs en fin de vie, l’ajout de particules fines doit rester minime pour qu’il ne devienne pas un frein à leur valorisation ou leur élimination en fin de vie, sous la forme de restitutions aux sols. Dans le même ordre d’idée, l’origine et la composition des terres excavées doivent être connues avec précision pour qu’elles puissent être valorisées à bon escient, sans risque de pollution ou de contamination.

    Le processus de fabrication de ce type de blocs fait appel à très peu d’énergie, les blocs étant pressés et ensuite séchés à l’air libre. Il faut donc s’attendre à ce que l’impact environnemental de ce type de procédé soit bien moindre que celui utilisé pour fabriquer des blocs « classiques ».

    Ce type de blocs a également été inséré comme matériau de construction durable dans le cadre du cahier des charges type bâtiment, parallèlement à plus d’une centaine d’autres matériaux wallons innovants jugés de conception durable.

    En ce qui concerne le béton, si les granulats recyclés peuvent être utilisés facilement dans les bétons pour devenir des bétons circulaires tout en conservant des bonnes caractéristiques, la valorisation des fines particules n’est pas aussi aisée. Leur utilisation dans des blocs de terre crue n’est pas recommandée.

    Concernant le recyclage du béton, des recherches ont été menées sur le sujet en Wallonie, notamment à l’Université de Liège. Dans le cadre du projet Interreg France-Wallonie-Flandres Valdem qui vient de se clôturer, des granulats recyclés ont été réincorporés dans du béton. Un autre projet Interreg North West Europe Cirmap vient de démarrer, avec pour ambition de produire du béton pour l'impression d’objets en 3D, au départ également de l’incorporation de granulats recyclés.

    Par ailleurs, dans la fabrication du béton, c'est le ciment qui est le plus impactant du point de vue des émissions de CO2 et divers projets en Wallonie visent à incorporer des matières alternatives dans les ciments pour réduire leur impact environnemental. On peut également citer le projet Greenwin Monocrete qui vient de démarrer et qui vise à développer des revêtements monocouches épais en béton, à base de liants alternatifs et de granulats recyclés.

    Pour ces projets, deux équipes de l’Université de Liège sont particulièrement actives notamment sur les aspects de composition et de formulation des ciments/béton ainsi que sur la vérification des impacts environnementaux de ces nouveaux procédés.
    Pour soutenir ce type d’initiatives, des appels à projets sont progressivement lancés en Région wallonne. Ainsi, le 11 juin 2021, la SRIW a diffusé un appel à projets visant à favoriser l’émergence d’installations industrielles de production de matériaux de construction ou d’éléments préfabriqués ou modulaires.

    Fin juin 2021, un appel à projets a été lancé par le SPW-ARNE dans le cadre du PWD-R. Il vise principalement la réutilisation de certains types de déchets. Un second appel à projets est en préparation sur les déchets de construction et de démolition, en tenant compte des priorités du PWD-R et des nouvelles dispositions réglementaires du paquet de directives européennes en cours de transposition.

    Deux autres appels à projets seront par ailleurs lancés par la Direction du Développement durable du SPW dans le cadre de Circular Wallonia. Le premier, « Go Circular » visera à stimuler la mise en place de projets en économie circulaire en Région wallonne, à faire mieux connaître l’offre des services de la Région et à soutenir les projets ambitieux d’achats circulaires.

    Le deuxième, « Chantiers et services circulaires » visera à stimuler la conception de bâtiments et l’exécution de chantiers innovants en économie circulaire en Région wallonne, à faire émerger des pratiques pilotes en termes de services accompagnant les chantiers et à faire connaître les outils financiers et d’accompagnement en matière d’économie circulaire dans le secteur de la construction.

    D’autres actions de ce type seront soutenues dans le cadre du Plan de relance de la Wallonie.