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Le retour aux critères de Maastricht en matière de déficit

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 175 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 02/07/2021
    • de SAHLI Mourad
    • à DI RUPO Elio, Ministre-Président du Gouvernement wallon
    Dans le cadre de la gestion de la crise liée à la propagation du Covid-19, la Commission et le Conseil de l'Union européenne ont enclenché en mars 2020 la clause dérogatoire du pacte de stabilité et de croissance du Traité de Maastricht. Cette mesure inédite a permis aux États membres de déroger temporairement aux normes budgétaires, les autorisant à s'écarter de la règle des 3% de déficit du PIB.

    Bouffée d'oxygène essentielle, elle a permis aux entités d'injecter les fonds nécessaires au soutien de leur système de santé et au maintien de leur économie. À ce titre, les différents gouvernements - dont lcelui du Monsieur le Ministre-Président - ont pu adopter une série de mesures de soutien pour limiter, tant que possible, les dommages économiques et sociaux immédiats.

    Pourtant, à l'heure où le plan de relance est au centre de toutes les politiques, certains se disent favorables à un retour à la règle des 3% de déficit.

    Cette option est-elle envisageable avec les mesures prévues dans le cadre de la poursuite du Plan de relance ?

    Quelle est la position du Gouvernement wallon quant à cette proposition de retour aux critères de Maastricht en matière de déficit ?
  • Réponse du 25/08/2021
    • de DI RUPO Elio
    Comme précisé dans la question écrite, l'activation de la clause dérogatoire générale a permis à la Belgique, et aux entités, de répondre rapidement, avec force et de manière coordonnée à la crise Covid-19. Cette politique, conforme aux recommandations par pays formulées par le Conseil européen en mai 2020, est poursuivie en 2021.

    En effet, à court terme, la Commission a recommandé que les États membres maintiennent, en 2021, leur politique de soutien à l’économie, compte tenu des risques élevés qui découleraient d’une réduction prématurée des mesures prises.

    Plus précisément, la Belgique doit « dans le respect de la clause dérogatoire générale, prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter efficacement contre la pandémie, stimuler l’économie et soutenir la reprise qui s’ensuivra ; lorsque les conditions économiques le permettront, à mener des politiques budgétaires visant à parvenir à des positions budgétaires à moyen terme prudentes et à garantir la soutenabilité de la dette, tout en favorisant l’investissement »

    Ainsi, pour l’ajustement du budget 2021, le Gouvernement wallon a appliqué la même méthode de travail que pour le budget initial 2021, celle d’un triple budget : un budget ordinaire, une enveloppe Covid et une enveloppe destinée à la relance, la résilience et la transition.

    Cette approche permet de donner un objectif clair de retour à l’équilibre à l’horizon 2024 pour ce qui concerne les dépenses ordinaires de la Région, mais tient compte, néanmoins, des dépenses nécessaires à la relance et aux investissements stratégiques et aux inconnues liées à la crise de la Covid-19.

    En effet, les effets de la crise sanitaire se poursuivront certainement en 2022.
    Il convient donc de ne pas prendre en compte dans le calcul de la trajectoire ni les dépenses directes et indirectes liées à la Covid-19 ni les baisses de recettes qui peuvent être directement imputées à la Covid-19. Et ce, sous réserve de maintien de la clause de sauvegarde générale.

    À partir de l’année prochaine, et pour autant que la conjoncture économique le permette, ce soutien devra être progressivement supprimé. Sa levée nécessitera la mise en œuvre de mesures favorisant la reprise et la résilience de l’économie, plus particulièrement en matière de promotion de l’emploi et d’investissements. La Commission européenne précisera, lors du prochain Semestre européen, les éléments sur lesquels elle se fondera pour apprécier le respect de ces recommandations par les États membres.

    Dans sa communication, la Commission européenne n’indique pas dans quelle mesure la désactivation de la clause générale dérogatoire à partir de 2023 imposera aux États membres de respecter à nouveau les quatre critères budgétaires (à savoir une trajectoire vers l’équilibre structurel, une évolution limitée des dépenses primaires nettes, un rythme de désendettement, et un déficit nominal de financement limité à 3 % du PIB) qui sont requis en situation normale, en raison essentiellement de la dégradation significative des taux de déficit et d’endettement public ainsi que de la volonté de promouvoir l’investissement.

    La position du Gouvernement quant aux critères de Maastricht est claire en la matière. Nous plaiderons pour donner plus de flexibilité au pacte de stabilité européen une fois que sa suspension pour cause de pandémie aura été levée.

    De ce point de vue, la dernière communication de Christine Lagarde va dans ce sens : « L'Europe a besoin d'un cadre modernisé avec des règles budgétaires transparentes, flexibles et crédibles qui permettront des politiques budgétaires contracycliques et durables ».

    Une révision à mi-parcours des règlements européens qui complètent le Pacte (« two-pack » et « six-pack ») était initialement prévue en 2021. L’avènement de la pandémie mondiale et l’activation de la clause dérogatoire générale a repoussé ce débat à plus tard. Cette négociation devrait toutefois resurgir en 2022. La décision de désactiver la clause et de revenir à une application « habituelle » des règles budgétaires européennes pourrait être conditionnée aux avancées dans les discussions relatives à la révision du Pacte qui auront lieu entre les grands argentiers européens au niveau du Conseil économique et financier de l’UE.

    Par ailleurs, La Commission s'est dite favorable à une réforme de ce mécanisme de limitation des déficits publics nationaux (3 % du PIB par an) et de la dette publique (60 % du PIB).

    Ainsi, une des pistes à l'étude dans le cadre de cette réforme serait de relever les plafonds de déficit et de dette, aujourd'hui dépassés dans de nombreux pays européens du fait des coûts de la pandémie.

    De plus, le Comité budgétaire européen, groupe d’experts mandaté par la Commission européenne pour examiner plusieurs pistes de réforme du Pacte, a préconisé l’introduction d’une règle d’or pour les dépenses d’investissements dans le domaine de la transition climatique et numérique. Cette règle introduirait la possibilité d’immuniser ces dépenses d’investissement de la méthode de calcul de déficit structurel.

    La Wallonie s’inscrit depuis longtemps dans cette démarche. Un retour à une politique budgétaire draconienne nous semblerait contradictoire avec l’action de la Commission européenne qui consiste à soutenir les économies en sortie de crise de la Covid-19. Par ailleurs, les besoins en investissement dans la transition climatique sont abyssaux dans la mesure où nous ambitionnons de respecter nos engagements à cet égard.

    Dès lors, immuniser les dépenses d’investissement consenties dans le cadre des Plans de reprise et résilience de la trajectoire budgétaire nous semblerait être de bon sens et par-dessus tout, cohérent avec l’objectif sous-jacent du Plan de relance européen « Next Generation EU » qui vise à accélérer la reprise et la transition des économies des États membres.