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L'artificialisation des sols et la problématique des inondations

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2021
  • N° : 604 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 26/08/2021
    • de CLERSY Christophe
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Ces dernières semaines, la Wallonie a subi des inondations sans précédent. Plusieurs communes des arrondissements de Thuin et de Charleroi, notamment, ont dû faire face à des dommages majeurs.

    Pas mal de citoyens directement impactés par ces inondations ont mis en avant l'artificialisation des sols comme une des causes majeures de ces phénomènes.

    Dans ce cadre, quelles sont les précautions prises pour l'octroi ou le refus des permis en cas de risque d'inondation par les fonctionnaires délégués lors de la délivrance de permis  ?

    Quels sont les chiffres des permis octroyés ou au contraire refusés pour ces raisons, pour les bassins hydrographiques dans les arrondissements de Charleroi et de Thuin ?

    Puis-je disposer du détail de ces statistiques pour les communes de ces deux arrondissements ?

  • Réponse du 20/09/2021
    • de BORSUS Willy
    Toute construction de bâtiments ou d’infrastructures induit une artificialisation des sols. Des incidences sur l’environnement et le cadre de vie en découlent. Mais l’artificialisation procure aussi des gains pour l’habitat, le développement économique, les services, le loisir. Tout est évidemment question d’équilibre. Par ailleurs, tous les sols artificialisés ne sont pas imperméabilisés. Et cette considération est déterminante dans la problématique des inondations.
    À titre liminaire, je souhaite donc clarifier quelque peu le débat en produisant certains chiffres.
     
    Selon les données de l’IWEPS, en 2020, la forêt occupe 29,3 % du territoire contre 28,5 % pour les terres arables et cultures permanentes et 23,2 % pour les surfaces enherbées et friches agricoles. Les terrains artificialisés couvrent, quant à eux, de 11 à 16 % de la superficie de la Wallonie (si l’on inclut les superficies non cadastrées qui représentent, en 2020, 5,2 % du territoire et dont une partie, de l’ordre de 85 %, correspond à des routes, chemins, voiries ou chemins de fer et leurs espaces associés, alors que le solde correspond à des voies d’eau).
     
    Toujours selon l’IWEPS, entre 1985 et 2020, les terrains artificialisés ont connu une croissance d’environ 552 km², ce qui correspond à une artificialisation moyenne de 15,8 km²/an. Cette artificialisation s’est faite principalement au détriment des terres agricoles, avec, d’après des chiffres issus du cadastre, une perte de superficie de 596 km² entre 1985 et 2020 (soit -6,4 % en 35 ans).
     
    Durant cette période de 1985 à 2020, la croissance des terrains artificialisés a été la plus intense entre la fin des années 1980 et la fin des années 1990, avec une artificialisation moyenne de plus de 18 km²/an. Durant les années 2000, l’artificialisation a été évaluée à 16 km²/an et elle diminue sur la période 2010-2014 à 12,7 km²/an et pour la dernière période de 5 ans (2015-2019) à 11,2 km²/an.
     
    C’est donc manifestement sur une trajectoire descendante que nous nous situons.
     
    En ce qui concerne la gestion des permis, qui aujourd’hui, sont à 90 % des permis délivrés par les collèges communaux, l’article R.IV.35-1 du CoDT impose une consultation obligatoire des services compétents à propos de tout projet relatif à un bien immobilier qui, de par sa localisation ou sa nature, est susceptible de produire un impact sur un cours d’eau ou est soumis à l’aléa inondation au sens de la cartographie adoptée par le Gouvernement en application de l’article D.53-2 du Code de l’eau. Pour rappel :  
    - pour un cours d’eau navigable, il s’agit du SPW MI - Département des Voies hydrauliques ;
    - pour un cours d’eau non navigable de 1re catégorie, il s’agit du SPW ARNE- Département de la Ruralité et des Cours d’eau ;
    - pour un cours d’eau non navigable de 2e ou non classé, il s’agit du service technique provincial ;
    - pour un cours d’eau non navigable de 3e catégorie, il s’agit du collège communal concerné.
     
    Il impose aussi que tout projet situé sur un axe de ruissellement concentré au sens de l’article R.IV.4-3, alinéa 1er, 4°, du CoDT fasse l’objet d’un avis du SPW ARNE – Département de la Ruralité et des Cours d’eau. C’est la cellule GISER de la Direction du Développement rural qui délivre ces avis.
     
    Par ailleurs, l’article D.IV.57 du CoDT permet soit de refuser un permis, soit de le subordonner à des conditions particulières de protection des personnes, des biens ou de l’environnement, lorsque les actes ou travaux se rapportent à « des biens immobiliers exposés à un risque naturel ou à une contrainte géotechnique majeurs tels que l’inondation comprise dans les zones soumises à l’aléa inondation au sens de l’article D.53 du Code de l’Eau, l’éboulement d’une paroi rocheuse, le glissement de terrain, le karst, les affaissements miniers, affaissements dus à des travaux ou ouvrages de mines, minières de fer ou cavités souterraines ou le risque sismique ».
     
    Je rappelle, par ailleurs, l’existence d’une circulaire du 3 mai 2018 visant la « prise en compte des aspects de prévention et de lutte contre les risques d’inondation par débordement de cours d’eau, par ruissellement et coulées boueuses dans la délivrance des permis ». Elle est d’application depuis le 1er juillet 2018.
     
    Cette circulaire expose la manière de prendre en compte les aspects de prévention et de lutte contre les risques d’inondation par débordement, ruissellement et coulées de boue dans la délivrance des permis. Y sont notamment explicités les outils cartographiques permettant de définir les zones sensibles aux risques d’inondation par débordement, par ruissellement et aux coulées boueuses. Dans le contexte des obligations introduites par le CoDT, la circulaire clarifie également les modalités des procédures de demande d’avis sur permis et autorisations tant en présence de ruissellement que de débordement de cours d’eau.
     
    Quelle que soit l’autorité compétente pour délivrer le permis, collège communal ou fonctionnaire délégué, un avis est donc demandé à un service spécialisé lors de l’instruction de la demande. L’autorité compétente n’est pas tenue par cet avis, mais elle doit motiver sa décision si elle s’en écarte.
     
    Selon les statistiques établies sur la base des encodages dans GesPer (logiciel de gestion des permis de mon administration), 9 permis sur 10 sont délivrés par les collèges communaux. En 2019, 62 % de ces décisions communales se sont effectuées sans avis du fonctionnaire délégué. Je ne dispose cependant pas de données spécifiques quant au nombre de permis qui ont dû être analysés au regard des conséquences que les travaux peuvent engendrer sur l’écoulement et l’infiltration des eaux, lorsque l’on se situe dans une des zones à risque. 
     
    En effet, il y a lieu de signaler que le logiciel de gestion des permis a été conçu initialement uniquement pour gérer l’instruction des demandes de permis pour les diverses catégories des dossiers du CoDT.
     
    Ce logiciel permet à l’agent traitant de disposer d’un agenda qui reprend l’ensemble des événements et échéances des permis d’urbanisme (sous CoDT) et de divers écrans (arborescence) pour indiquer les caractéristiques du dossier en ce compris l’objet de la demande, les actes et travaux, etc.
     
    Complémentairement, les agents disposent d’un outil cartographique intégré à GesPer qui permet de situer géographiquement le bien qui fait l’objet de la demande et de le représenter sous la forme d’un ou de plusieurs points (ligne ou polygone).
     
    Cette représentation est utilisée pour « traverser » les diverses couches cartographiques et obtenir ainsi les contraintes juridiques liées au terrain.
     
    Aujourd’hui pour pouvoir disposer de statistiques, il faut extraire les tables « brutes » de GesPer et les manipuler sous Excel afin de « filtrer » les informations relatives à la statistique souhaitée et éventuellement produire des graphiques.
     
    L’objectif de Gesper « stat » est d’exploiter les données présentes dans la base de données GesPer de manière automatique sur la base des informations souhaitées.
     
    Néanmoins, il y a lieu de préciser que certaines données ne sont pas présentes et le cas échéant pourraient nécessiter un encordage supplémentaire et une surcharge de travail auprès des agents.