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Le transfert de compétences liées à la santé dans le milieu carcéral

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 12 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 03/09/2021
    • de JANSSEN Nicolas
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    Les Standard Minimum Rules for the Treatment of Prisoners des Nations Unies stipulent que les soins aux détenus doivent être de bonne qualité. Elles édictent trois principes : l'équivalence des soins par rapport à ceux prodigués dans la société, la continuité des soins et l'indépendance des prestataires de soins dans leur travail clinique. Il semblerait que dans beaucoup de pays, la réalisation de ces principes nécessite que les soins de santé en prison soient sous la responsabilité du Ministre de la Santé publique.

    Chez nous, il y a une volonté de transférer la responsabilité des soins de santé en prison du Ministre de la Justice à celui de la Santé publique. Nos détenus consultent en moyenne 18 fois par an un médecin généraliste et 3 fois un psychiatre. Les professionnels des soins en prison affrontent de nombreux problèmes : manque de ressources financières et humaines, de coordination, de continuité des soins, de formation et fragmentation des compétences entre niveaux de pouvoir. Le transfert des compétences du Ministre de la Justice à celui de la Santé publique est une opportunité unique de se pencher sur la réorganisation et l'amélioration des soins pénitentiaires. Pour l'instant, les régions financent des acteurs externes au milieu carcéral pour les aspects de prévention et de promotion de la santé, mais pourraient y être compétentes pour davantage de choses liées à la santé avec ce transfert.

    Interpellé sur ce transfert, le Ministre de la Justice a évoqué des groupes de travail. Dans quelle mesure les régions et communautés sont associées à cette réflexion ?

    Enfin, il m'est revenu que la concertation interministérielle prison pourrait être plus efficiente et qu'il y aurait un manque de coordination entre Régions et Fédéral, ce qui ne facilite pas le travail des ASBL et médecins.

    À quelle fréquence ont lieu ces réunions ?

    Quelles actions ont été prises récemment dans ce cadre ?

    Le transfert de compétence y a-t-il fait l'objet de décisions ?
  • Réponse du 15/10/2021
    • de MORREALE Christie
    Il y a quelques mois, mon attention avait été attirée par un des collègues de l’honorable membre sur un cri de détresse et une demande pressante venant des médecins de la prison de Lantin qui réclament le transfert de la compétence « santé des personnes détenues » du SPF Justice vers le SPF Santé publique. Ceci exactement dans le sens des recommandations produites par le KCE qui datent de 2017 et des travaux qui avaient été entamés à l’initiative du Cabinet du Ministre de la Justice, Koen Geens, en vue d’établir un plan stratégique. Son Successeur, Vincent Van Quickenborne a souhaité prendre le relais dans ce sens. Le programme du Gouvernement fédéral comporte d’ailleurs cette annonce d’une réforme en profondeur des soins de santé en milieu carcéral, en collaboration étroite avec le SPF Santé publique et les entités fédérées.
     
    Actuellement, ce travail a abouti à un texte de vision et à des recommandations élaborées par les groupes de travail que l’honorable membre évoque. C’est sur cette base - en collaboration avec les partenaires fédéraux et les partenaires des entités fédérées concernées – qu’a été défini un plan d'action intégré par étapes contenant des mesures concrètes pour améliorer les soins de santé en milieu carcéral. Ce plan d'action devait être finalisé et soumis à l'approbation de la CIM Santé publique à l'automne 2021. Mais, compte tenu du fait que les travaux ont été mis sur pause durant une longue période et n’ont repris qu’au début de cet été, cette perspective est sans doute peu réaliste.
     
    Quant à la répartition des compétences en matière de santé publique, l’art de guérir et de soigner relève bien du niveau fédéral et la santé dans les prisons n’a fait l’objet d’aucun transfert même partiel de la Justice à la Santé publique fédérale. Un transfert de compétences en matière de justice a bien eu lieu, mais il concerne principalement les maisons de justice. Les entités fédérées sont compétentes pour prendre des initiatives en matière de prévention (entre autres, par exemple, en matière d’assuétudes, de sevrage tabagique ou de vaccination, mais sans que nous ayons dû intervenir dans la vaccination contre le coronavirus), le SPF Justice s’en étant chargé moyennant la mise à disposition des vaccins grâce à l’accord de toutes les entités.
     
    Je reste préoccupée par la situation sanitaire dans les prisons. Et c’est pourquoi, nonobstant la répartition des compétences en la matière, mon cabinet participe au groupe de travail mené par le Fédéral. Une réunion de reprise a eu lieu au début juillet et la suivante a été programmée le 15 septembre 2021.
     
    Comme déjà évoqué par ailleurs, je ne manquerai pas de rappeler les principes fixés lors de la CIM Santé publique du 24 mai 2019 en matière de réforme des soins de santé en prison, à savoir l’équivalence et la continuité des soins, l’indépendance clinique des prestataires de soins ainsi que l’intégration maximale de la politique de soins de santé pénitentiaire dans une politique de santé plus large.
     
    En tant que Ministre wallonne de la Santé, je veillerai à ce que l’accompagnement des détenus ayant une consommation problématique de drogues soit abordé en CIM. Il est central d’améliorer la continuité des soins, mais aussi la prévention et la réduction des risques essentielles à une approche intégrée et globale de la santé et de l’usage de drogues. Préparer la sortie de prison est tout aussi indispensable pour réduire les risques de récidive et de rechute. Pour rappel, la Région wallonne soutient un projet-pilote de promotion de la santé et d’accompagnement des détenus en matière de santé mentale, de gestion des assuétudes et de réduction des risques dans les prisons wallonnes. L’objectif général du projet porté par l’ASBL Un Pass Dans l’Impasse (UPDI) est d’améliorer la santé globale des personnes incarcérées, de favoriser la continuité des soins et de promouvoir la réinsertion sociale par le biais de l’autonomisation et de la responsabilisation. Actuellement, Un Pass Dans l’impasse (UPDI) œuvre à l’organisation d’activités de prévention et de promotion de la santé au sein des prisons wallonnes.