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Les conséquences du jugement de la Cour de Justice européenne du 2 septembre 2021 sur le Traité sur la charte de l'énergie (TCE)

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 11 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 21/09/2021
    • de BIERIN Olivier
    • à DI RUPO Elio, Ministre-Président du Gouvernement wallon
    Dans un arrêt datant du 2 septembre 2021 dans l'affaire Komstroy contre la Moldavie, la Cour de justice de l'Union européenne ("CJUE") a jugé que le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et État de l'article 26(2)(c) du Traité sur la charte de l'énergie (TCE) ne s'appliquait pas aux différends intraeuropéens.

    La Cour de justice de l'Union européenne confirme via cet arrêt que les accords bilatéraux d'investissement (ABI) entre États membres de l'Union européenne sont illégaux, comme elle l'avait déjà indiqué dans l'arrêt Achmea.

    En réponse à l'arrêt Achmea, les représentants permanents de 23 États membres avaient d'ores et déjà signé un accord le 5 mai 2020. L'Autriche, la Finlande et la Suède n'ont pas encore signé cet arrêt et sont tenues de mettre fin à leurs accords bilatéraux d'investissement par la voie bilatérale. L'Irlande quant à elle n'est pas partie prenante de l'Accord, car elle n'a jamais signé d'accord bilatéral d'investissement intra-UE.

    Quelles sont les conséquences de cet arrêt du 2 septembre sur le TCE ?

    Quelle influence cet arrêt a-t-il dans les négociations sur la réforme du TCE ?

    Modifie-t-il la position défendue par la Wallonie, par la Belgique, ou par la Commission européenne, dans le cadre de ces négociations ?

    Monsieur le Ministre-Président a-t-il pris contact avec le Gouvernement fédéral à ce sujet ?

    Le Gouvernement wallon a-t-il déjà approuvé l'accord du 5 mai 2020, et celui-ci concerne-t-il aussi le TCE ?
  • Réponse du 09/11/2021
    • de DI RUPO Elio
    L’arrêt que l’honorable membre évoque stipule ceci. Un « accord international ne saurait porter atteinte à l’ordre des compétences fixé par les traités et, partant, à l’autonomie du système juridique de l’Union dont la Cour assure le respect ».

    L’article 26 du Traité sur la Charte de l’énergie (TCE) doit dès lors être interprété comme suit. Il n’est pas applicable aux différends opposant un État membre à un investisseur d’un autre État membre.

    Le TCE peut imposer aux États membres de respecter les mécanismes d’arbitrage du traité. Cela concerne seulement les relations avec les investisseurs d’États tiers qui sont parties au traité.

    Par contre, le TCE ne peut imposer les mêmes obligations aux États membres entre eux. La préservation de l’autonomie et du caractère propre du droit de l’Union s’y oppose.
    Cet arrêt aura donc inévitablement des conséquences.

    Par exemple, les litiges en cours liés au TCE représentent 21 milliards d’euros. Approximativement, 9,45 milliards concernent des investissements intra-UE.

    Les litiges déjà résolus représentent quant à eux un montant de 1 milliard.
    Toutefois, il est trop tôt pour tirer des conclusions.

    Le sort qui sera réservé aux litiges déjà réglés n’est pas non plus clair. Tout comme l’effet rétroactif de cet arrêt du 2 septembre.

    Il est également trop tôt pour une éventuelle modification de notre position sur le TCE.

    Les négociations pour sa modernisation sont en cours. Deux réunions techniques se déroulaient la semaine dernière.

    Un cycle complet s’est déroulé fin septembre. Il ne fait aucun doute que les conclusions de cet arrêt feront partie des discussions.

    La position de la Belgique est toujours de soutenir le travail de l’Union européenne.

    C’est aussi le cas de la Wallonie. L’Union cherche activement une modernisation du TCE.

    Il est par contre évident que ce processus ne pourra pas durer indéfiniment. Il doit offrir des perspectives de résultat. Dans le cas contraire, il conviendra de réfléchir à une sortie ordonnée du traité.

    Les résultats devront correspondre aux aspirations wallonnes en matière de développement durable.
    Je l’ai déjà indiqué précédemment.

    Dans sa forme actuelle, le TCE remet en cause notre capacité à atteindre nos objectifs climatiques. Ce n’est pas acceptable.

    Je continuerai à suivre de près les différents cycles de négociations prévus jusque fin 2021.
    Pour l’instant, je n’ai pas pris contact avec le Gouvernement fédéral.

    L’accord du 5 mai porte, lui, sur l’extinction des traités bilatéraux d'investissement conclus entre États membres. Il a été signé par 23 États membres, dont la Belgique. Il ne concerne pas le TCE, traité de nature multilatérale.

    Cet accord fera l’objet d’une proposition de ratification dans les prochaines semaines au Parlement. Nous espérons avoir terminé le processus complet d’ici la fin de l’année. À l’instar des autres entités fédérées.