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La condamnation de l'État belge dans le cadre du financement des zones de secours et son impact sur les finances communales

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 24 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 22/09/2021
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Le Tribunal de première instance de Namur a condamné l'État belge, ce mercredi 8 septembre, dans le contentieux qui l'oppose à la zone de secours NAGE.

    Le tribunal a estimé que le mécanisme de financement des zones de secours n'était pas respecté par le Fédéral. La fameuse clé de financement 50/50 n'étant pas respectée, le tribunal laisse 9 mois à l'État pour prendre l'arrêté royal permettant le respect de la clé de financement 50/50.

    C'est là une décision qui a toute son importance. Elle donne enfin raison aux communes et pourrait permettre un rééquilibrage du financement des zones de secours, dont le coût pèse lourdement sur les finances locales.

    Monsieur le Ministre a-t-il pris connaissance de cet arrêt ?

    Ne serait-il pas opportun d'inscrire ce point au prochain Comité de concertation afin de connaître les intentions du Fédéral en la matière ?

    De manière générale, où en est-il dans le cadre de la reprise du financement des zones de secours par les provinces ?
  • Réponse du 23/09/2021
    • de COLLIGNON Christophe
    Le tribunal de première instance de Namur s’est effectivement prononcé, ce 8 septembre, sur le recours de la zone de secours NAGE. Pour rappel, il s’agit d’une action « collective » intentée contre l’État belge par les villes d’Andenne, de Gembloux et de Namur et les communes d’Assesse, d’Éghezée, de Fernelmont, de Gesves, de la Bruyère, d’Ohey et de Profondeville.
     
    Les parties demanderesses sollicitaient du Tribunal :
    - qu’il dise pour droit que l’abstention de l’État belge d’adopter l’arrêté royal d’exécution de l’article 67, alinéa 3 de la loi du 15 mai 2017 relatif à la sécurité civile est fautive ;
    - qu’il condamne, en conséquence, l’État belge à adopter cet arrêté royal d’exécution dans un délai de six mois à dater du jugement à intervenir, et ce sous peine d’une astreinte de 50 000 euros par jour de retard ;
    - qu’il condamne l’État belge à supporter les surcoûts liés à la réforme de la sécurité civile opérée par la loi du 15 mai 2007 pour le financement de la zone de secours NAGE ;
    - et qu’il condamne, de ce chef, l’État belge à leur verser, à titre de dommages et intérêts, à titre provisionnel, la somme totale de 1 500 000 d’euros ; augmentée des intérêts compensatoires et légaux à dater de la survenance du dommage, et à réserver à statuer pour le surplus.
     
    Le tribunal a donné raison aux communes, estimant que l’État fédéral était en défaut d’avoir pris les mesures nécessaires pour mettre en œuvre la loi de 2007, le condamnant à adopter l’arrêté d’exécution nécessaire dans un délai de neuf mois, sous peine d’astreintes.
     
    Pour rappel, l’alinéa 1er de l’article 67 de la loi du 15 mai 2007 relative à la sécurité civile prévoit que « les zones de secours sont financées notamment par :
    1) les dotations des communes de la zone ;
    2) les dotations fédérales ;
    3) les éventuelles dotations provinciales ; »
     
    L’alinéa 2 précise qu’« aussi longtemps que le ratio entre les moyens des autorités communales et fédérale prévus en application de cette loi n’est pas égal à un, les communes d’une zone ne devront pas, ensemble, contribuer davantage en termes réels que leur apport actuel.
    Le Roi détermine, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, après avoir entendu les représentants des villes et communes, ce ratio au 31 décembre 2007 ainsi que les postes des revenus et des dépenses qui entrent en ligne de compte pour calculer ce ratio ».
     
    Il s’agit donc bien, pour le fédéral d’adopter, dans un délai de neuf mois, l’arrêté royal d’exécution de l’article 67, alinéa 3 de la loi du 15 mai 2017.
     
    Même si nous pouvons collectivement nous réjouir de cette décision, il faut rester mesuré à ce stade, car il est aujourd’hui impossible de dire quel sera l’impact de cette décision sur les finances communales et provinciales. D’une part, c’est toujours à l’autorité communale qu’il appartient de supporter les frais nécessaires à l’exécution des missions de la zone lorsque ces frais ne découlent pas de la loi du 15 mai 2007. De l’autre, les autorités communales doivent supporter intégralement les frais qui sont la conséquence du sous‑investissement des communes avant l’exécution de loi du 15 mai 2007. Seuls les surcoûts liés à la réforme doivent donc être pris en considération, mais on peut légitimement espérer que des moyens reviendront aux communes.
     
    À ce stade, il convient de laisser la ministre de l’Intérieur faire son travail, avant d’envisager la saisine du Codeco ou le déclenchement de la procédure de règlement de conflits d’intérêts. Selon moi, cette décision de justice vient accélérer le processus, en demandant au fédéral de finaliser le travail dans un délai de neuf mois, ce qui est une bonne chose.
     
    Concernant la reprise du financement des zones de secours par les provinces, au cœur de la question de l’Honorable Membre, j’ai eu l’occasion d’expliquer, en commission, que le Gouvernement wallon a décidé, le 14 juillet dernier, de fixer une trajectoire budgétaire 2021-2024 pour ce qui concerne, d’une part, la reprise du financement communal des zones et, d’autre part, l’octroi d’un soutien régional aux provinces dans le cadre de cette reprise.
     
    Cette décision a été notifiée aux provinces le 3 septembre, via une circulaire comportant un tableau reprenant le financement des zones de secours que les provinces devront reprendre à leur charge d’ici à 2024. Pour chaque province, on retrouve également le détail de la reprise par zone de secours.
     
    Cette décision a pour ambition de répondre au souhait légitime de prévisibilité exprimé par les provinces étant donné que seuls des pourcentages avaient été arrêtés lors des précédentes décisions du gouvernement.
     
    Aujourd’hui, une trajectoire en montant est figée, mais le Gouvernement a souhaité tenir compte d’une croissance certaine des dépenses entre 2021 et 2024 ; croissance néanmoins très limitée quant à son impact sur le niveau de participation des provinces au financement des zones de secours.
     
    Cette trajectoire budgétaire par la fixation de montants en numéraire était attendue et nécessaire pour donner de la prévisibilité aux provinces, tout en soulageant les finances communales.
     
    Enfin, sur la participation des provinces dans la gestion des zones, j’ai plaidé, lors de ma rencontre avec la ministre fédérale de l’Intérieur, en faveur d’une modification de la loi du 15 mai 2007 en vue de conférer automatiquement la qualité de membre du conseil à un membre du conseil provincial lorsque la province participe au financement des zones de secours. La ministre a déclaré ne pas être favorable à une telle adaptation de la loi, étant donné que cette dernière prévoit déjà que le conseil zonal peut conférer la qualité de membre à un membre du conseil provincial. Le législateur aurait prévu une faculté, et non une obligation, vu le fait que, contrairement aux communes, les provinces ne disposent pas de compétence matérielle en matière de sécurité civile. La ministre s’est toutefois engagée à rédiger une circulaire pour rappeler que le texte de loi n’empêche pas qu’un membre du conseil provincial, lorsque la province participe au financement de la zone de secours, puisse être à la fois membre du conseil et du collège de zone.