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L'attitude des sociétés privées en matière de lutte contre le réchauffement climatique

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 176 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 10/11/2021
    • de LEONARD Laurent
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie et de la Mobilité
    Des chercheurs français se sont récemment plongés dans les archives du groupe pétrolier Total afin de mettre en lumière la manière dont l'entreprise a réagi aux résultats des recherches sur le réchauffement climatique durant les 50 dernières années.

    Leur étude révèle que, dès 1971, Total a connaissance des effets néfastes de ses activités sur le climat, mais a œuvré pour empêcher la limitation du recours aux énergies fossiles et minimiser l'impact de ses activités sur notre climat. Toujours selon l'étude, les groupes pétroliers français ont fait pression sur les politiques visant à réduire les gaz à effet de serre, avec succès.

    Ce n'est pas vraiment une surprise. Si les sociétés pétrolières tentent aujourd'hui de « verdir » leur image, les énergies fossiles restent un des plus gros polluant à l'échelle mondiale. Et des voix de plus en plus nombreuses s'élèvent pour réclamer justice.

    Il y a quelque temps, la Belgique a d'ailleurs été condamnée pour inaction climatique ; la justice néerlandaise a condamné le groupe Shell pour inaction climatique. À ce sujet, suite à une de mes questions, Monsieur le Ministre me répondait que ses services étudiaient le jugement néerlandais et ses implications.

    Cette étude est-elle terminée ? Monsieur le Ministre peut-il m'indiquer les conclusions de cette dernière ?

    Le jugement néerlandais ne pourrait-il pas servir de jurisprudence à l'échelle européenne ?

    Selon un sondage YouGov, les citoyens belges sont largement favorables à une meilleure législation permettant de tenir les entreprises légalement responsables des atteintes à l'environnement et estiment que les victimes des abus doivent pouvoir poursuivre les entreprises devant les tribunaux européens.

    Le citoyen aura beau produire moins de déchets, utiliser moins d'énergie, si les grands groupes comme Total ou Shell ne prennent pas leurs responsabilités afin d'agir effectivement et concrètement pour diminuer leurs émissions de gaz à effet de serre, on va droit dans le mur. Ce sont tous les acteurs de la société qui doivent faire des efforts, les politiques, les citoyens, mais également le monde industriel et économique.

    Monsieur le Ministre a-t-il déjà pris connaissance de l'étude française concernant Total ? Quelle en est son analyse ?
  • Réponse du 02/12/2021
    • de HENRY Philippe
    Je ne peux que déplorer l’attitude des groupes pétroliers et, de manière générale, de tous les semeurs de doute sur le changement climatique et sur ses causes.

    Au niveau de la société Shell, celle-ci a fait appel du jugement néerlandais qui l’a condamnée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Il faudra voir si ce jugement qui consacre une obligation de vigilance des entreprises est confirmé en appel.
    Pour reprendre une analyse doctrinale récemment publiée sur ce jugement, je cite Monsieur Jean-Marc GOLLIER, Maître de conférences à l’UCLouvain :
    « La principale leçon de cette décision pourrait être la suivante. Toute entreprise dont l’activité implique une émission significative de CO2 à un point ou l’autre de sa chaîne de valeur doit identifier et surveiller cet impact négatif (devoir de vigilance). Si cet impact négatif n’est pas compatible avec les objectifs de l’Accord de Paris, elle doit, le cas échéant, adapter son activité pour s’y conformer ».

    Pour ce qui est de tenir les entreprises légalement responsables des atteintes à l’environnement, il faut aussi souligner le travail réalisé au Fédéral avec la proposition de résolution visant à reconnaitre le crime d’écocide dans le droit pénal international.

    Je rejoins entièrement l’honorable membre sur sa conclusion : ce sont tous les acteurs de la société et tous les secteurs qui doivent faire des efforts pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, y compris donc les sociétés pétrolières.

    Celles-ci sont régies par le système européen d’échange des quotas d’émission de gaz à effet de serre (ETS) qui les incite de plus en plus, avec la mise en œuvre de la phase IV, à réaliser des réductions d’émissions.

    Au niveau wallon, la ligne directrice qui prévaut dans la confection du nouveau Plan Air-Climat-Energie est de trouver de justes équilibres pour que tous les secteurs contribuent de manière suffisante à l’objectif commun, tout en veillant à ne pas mettre à mal la compétitivité de notre industrie.
    Ce sont aussi ces principes qui s’appliquent dans la construction actuelle des nouveaux accords de branche.

    De plus, le cadastre des subventions aux combustibles fossiles constitue un outil très intéressant en vue de permettre au Gouvernement d’établir, conformément à la DPR, le plan d’action visant à l’élimination des subsides aux combustibles fossiles d’ici 2025 au plus tard, pour autant qu’il existe des alternatives durables.