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Les objectifs de la stratégie européenne "farm to fork" concernant la réduction de la dépendance de la Wallonie aux engrais chimiques

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 135 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 10/11/2021
    • de KELLETER Anne
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    L'Union européenne défend sa stratégie pour la sécurité alimentaire et vise une réduction des pesticides et des engrais, ainsi qu'une augmentation de la part du bio.

    Elle défend sa stratégie « De la ferme à la fourchette » pour la sécurité alimentaire qui vise notamment à diminuer fortement l'usage des pesticides.

    Parmi les objectifs à échéance 2030, on trouve la volonté de réduire de 20 % l'usage d'engrais chimiques

    D'après des études, les agriculteurs wallons produisent suffisamment d'engrais (surtout du fumier et du lisier) pour satisfaire nos besoins, mais nous continuons à en importer, dont surtout des engrais chimiques.

    Quelles actions Monsieur le Ministre met-il en place pour réduire notre dépendance aux engrais chimiques ?

    Quelles initiatives a-t-il prises pour promouvoir les engrais naturels ?

    La Région wallonne poursuit-elle les mêmes objectifs que l'UE ? Ou sommes-nous plus ambitieux, comme nous le sommes déjà en termes de surface à atteindre en agriculture biologique ?

    Dans quelle mesure la nouvelle PAC est-elle adaptée à ces objectifs et contribue-t-elle à leur mise en œuvre ?
  • Réponse du 30/11/2021
    • de BORSUS Willy
    La fumure azotée n’est conçue en Europe, en agriculture conventionnelle, que comme un complément à la fumure au moyen d’engrais naturels. L’application de ces engrais naturels, issus des déjections animales, est d’abord gouvernée par une directive européenne et sa transposition en droit régional : le Plan de Gestion durable de l’azote en agriculture. L’application d’engrais chimique en agriculture conventionnelle n’est pas interdite, mais son application sera dépendante du rendement marginal : le prix de la production supplémentaire que l’on espère obtenir doit compenser les coûts supplémentaires consentis pour l’obtenir. Cette autorégulation limite le recours aux engrais chimiques à leur minimum.

    L’actuel Plan de Gestion de l’Azote contient une série de dispositions :
    - sur terres arables en pente de 15 % et plus, il y a une contrainte d’enfouissement pour les engrais organiques rapides et les engrais minéraux ;
    - les fertilisants organiques lents ne sont pas interdits sur sols gelés, contrairement aux minéraux ;
    - pour vérifier les seuils d’application d’engrais, il y a nécessité de conserver les documents relatifs à l’achat ou la livraison de fertilisants minéraux ;
    - quand il y a destruction de prairie, les fertilisants minéraux sont interdits durant l’année qui suit ;
    - en zone vulnérable, les engrais minéraux sont interdits sur les parcelles de cultures sarclées ou assimilées.

    Le futur Plan de gestion de l’azote, en finalisation, complétera ce dispositif :
    - il y aura renforcement d’un contrôle sur les fertilisants minéraux par l’inscription de leur application dans un registre de fertilisation ;
    - les fertilisants organiques lents pourront être épandus sur une parcelle en classe de risque d’érosion très élevé, contrairement aux fertilisants minéraux.

    Concernant l’agriculture biologique, un des objectifs de ce Plan bio approuvé en juin 2021 est d’arriver à 30 % de SAU en agriculture biologique en Wallonie, en 2030. Étant donné que le cahier des charges de l’agriculture biologique n’autorise pas d’engrais chimique, cet objectif devrait permettre de réduire l’utilisation des engrais chimiques et promouvoir les engrais naturels.

    Le futur Plan stratégique PAC 2023-2027, en cours de discussion au sein du Gouvernement wallon, consolidera le soutien à l’agriculture biologique, ce qui aura comme conséquence de privilégier l’usage des engrais naturels.
    Il faut toutefois noter que, vu la limitation des ressources organiques disponibles en agriculture biologique sans engrais minéraux, ceux-ci sont souvent dépendant d’engrais organiques importés afin d’assurer leur productivité.

    En combinant ces objectifs de superficie convertie en agriculture biologique à l’agriculture de précision, la Wallonie a pour objectif de réduire au minimum de 20 % son utilisation d’engrais chimiques.

    En ce qui concerne les initiatives prises pour promouvoir les engrais naturels, il faut savoir qu’une bonne mise en œuvre des engrais de ferme nécessite une bonne connaissance de leur valeur fertilisante.

    Une collaboration entre le CRAW et le Centre de Michamps a permis de développer :
    -​des outils de caractérisation et d’estimation de la valeur fertilisante des engrais de ferme ;
    -​la mise en place d’essais de longue durée sur les avantages apportés par ce type de fertilisants (lisier, fumier, compost …) ;
    -​la mise en lien des pratiques de gestion du pâturage et des engrais de ferme et des pertes encourues.

    De son côté, la valorisation des déchets organiques biodégradables par épandage permet également d’éviter ou de restreindre l’usage d’engrais de synthèse. Ainsi, le Plan wallon Déchets-Ressources vise le tri, la collecte séparée des déchets organiques, la valorisation de ces derniers avec un encadrement adéquat de l’utilisation des matières organiques en agriculture et horticulture, un complément au cadre sur le compostage et la biométhanisation et l’établissement et l’exploitation d’un bilan d’azote régional.

    Enfin, le nouveau règlement fertilisant de 2019 établissant les règles relatives à la mise à disposition sur le marché des fertilisants intègre dorénavant l’ensemble des engrais et des amendements de sol, que leur origine soit issue de l’extraction, de procédés chimiques ou de matières recyclées ou organiques, et ne vise donc plus seulement les fertilisants minéraux.

    La circulation des fertilisants organiques conforme à ce règlement se voit donc encouragée en Europe, avec un impact non négligeable sur les fertilisants organiques qui seront utilisés en Wallonie ainsi que sur les différentes législations agricoles et environnementales qui les encadrent au niveau régional.