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L'utilisation de sulfoxaflor dans l'agriculture

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 139 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 10/11/2021
    • de DESQUESNES François
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Doté du même mode d'action que les néonicotinoïdes, le sulfoxaflor est un insecticide systémique qui est largement décrié depuis son autorisation européenne comme molécule en 2015. Ainsi, PAN Europe mentionne sa dangerosité pour les abeilles, l'EFSA souligne qu'il n'en existe pas d'usage sûr en extérieur et la France l'a interdit en 2019. En réponse aux inquiétudes des citoyens, Monsieur le Ministre Borsus avait garanti, en 2015, que cet insecticide ne serait jamais autorisé en plein champ en Belgique si des risques inacceptables ne pouvaient être exclus, sur base du principe de précaution !

    C'était sans compter sur le nouveau Ministre fédéral de l'Agriculture, Monsieur David Clarinval qui, en 2020, a accordé deux dérogations successives sur un nombre important de cultures (pommes de terre, fèves, féveroles, choux). Jugeant la restriction au seul usage intérieur comme « inutilement sévère », la Belgique s'opposerait maintenant à la volonté de la Commission européenne d'interdire ce dangereux produit phytosanitaire à l'extérieur et de le limiter son usage aux seules serres permanentes.

    Madame la Ministre cautionne-t-elle cette position ?

    A-t-elle agi pour s’opposer à cette position belge ? Sinon, pourquoi ?

    Que compte-t-elle mettre en œuvre à l'échelle wallonne ?

    À l'instar de l'avis de son collègue Monsieur Borsus, compte-t-elle défendre le principe de précaution et interdire l'usage de ce produit dans les champs de Wallonie ?

    Au travers des tests actuels réalisés en plein champ, la volonté du Gouvernement fédéral semble claire : remplacer les néonicotinoïdes (dont les dérogations ne seront pas éternelles) par ce produit presque « miraculeux » pour le Ministre Clarinval. Qu'en est-il pour la Région wallonne dans le cadre de son Plan de réduction des pesticides et, notamment de sa lutte intégrée contre les ennemis des cultures ? Madame la Ministre autorise-t-elle que de tels tests puissent se dérouler sur le sol wallon ?
  • Réponse du 27/12/2021
    • de TELLIER Céline
    Une question orale de Madame Ryckmans sur le même sujet a été abordée lors de la Commission. L’honorable membre trouvera ci-dessous la réponse qui lui a été apportée :

    Comme il le rappelle, bien que le sulfoxaflor ne soit pas de la famille des néonicotinoïdes, il possède le même mode d’action et présente donc des risques avérés pour les abeilles. Le sulfoxaflor est également souvent présenté comme moins toxique que les néonicotinoïdes, car la durée pour éliminer 90 % de la substance dans le sol est relativement courte : 12 jours. Mais, ceci n’en fait pas pour autant un produit sûr et inoffensif ; c’est un pesticide dont il faut se débarrasser. Il convient dès lors de travailler à sa réduction et de développer des alternatives. Je regrette donc fortement la décision du Ministre Clarinval, que je considère clairement comme un retour en arrière. Ses deux prédécesseurs s'étaient rangés à l'avis de la Commission européenne de faire usage de ces produits uniquement en serre. Je déplore ce relâchement des règles alors que nous assistons à une perte massive de la biodiversité, ici comme ailleurs.

    Au sein du Comité d'agréation fédéral, la Wallonie n'a évidemment pas apporté son soutien à l'autorisation des deux produits à base de sulfoxaflor actuellement agréés en Belgique.

    Ceci me permet de faire un bref rappel sur la répartition des compétences en la matière en Belgique. L'autorisation des substances actives se fait au niveau européen sur base du règlement 1107/2009 après évaluation du dossier par l'EFSA. L'autorisation des produits phytopharmaceutiques contenant la substance active se fait, quant à elle, au niveau fédéral après évaluation du dossier par le SPF Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement. La Wallonie ne peut donc agir, dans tout dossier relatif à un pesticide, qu'en fonction de ses compétences propres, à savoir la réglementation d'usage des produits.

    Concernant la réalisation de tests sur le sol wallon, à partir du moment où ces tests font partie de la procédure d'autorisation de produits contenant du sulfoxaflor, cela relève d'une compétence fédérale.

    Pour ce qui est du Programme wallon de réduction des pesticides, plusieurs mesures permettent de faciliter la mise en œuvre des principes généraux de lutte intégrée contre les ennemis des cultures : amélioration des systèmes d'avertissement, encouragement à utiliser des produits présentant un moindre risque. Dans le cadre du prochain programme 2023-2027, la Wallonie entend bien définir ses propositions sur base des objectifs européens de la stratégie Farm to Fork, à savoir la réduction de 50 % des utilisations et des risques liés aux produits phytopharmaceutiques de synthèse d'ici 2030.

    Je soulignerais que le sulfoxaflor est une substance utilisée dans la culture de betteraves notamment ; une filière qui doit régulièrement faire face à un certain nombre de contraintes telles que la jaunisse ou les ravageurs. À mon initiative, la Wallonie a financé une étude, menée au sein de L'Université catholique de Louvain, afin de dresser un état des lieux de la filière betteravière spécifiquement, qui tiendra compte de ses difficultés propres et dressera, aussi et surtout, un inventaire des solutions et des évolutions envisageables en termes de production et d'utilisation de pesticides. L'étude est en cours et les résultats sont attendus dans le courant de l'année prochaine.

    Je terminerais par attirer l'attention sur le fait que l'utilisation des produits contenant du sulfoxaflor est conditionnée par le respect strict de certaines pratiques visant à protéger les pollinisateurs.

    Ainsi, en attendant que ces produits soient exempts d'autorisation de manière générale, sachez qu'il est déjà interdit de les utiliser sur les cultures des fleurs, et plus généralement, dans tous les endroits où les abeilles sont actives pour se nourrir. De manière générale, ils sont donc également interdits d'usage à proximité de plantes. Tout écart à ces trois règles constitue, par conséquent, une infraction susceptible d'être sanctionnée.