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Les "new breeding techniques" (NBT)

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 138 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 18/11/2021
    • de MAUEL Christine
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Encouragé par l'assouplissement réglementaire post-Brexit, un institut de recherche anglais (l'institut Rothamsted Research) lance une expérimentation de blé génétiquement édité.

    À la différence des organismes génétiquement modifiés classiques (OGM), cette nouvelle technique de sélection des plantes (new breeding techniques, NBT) n'intègre pas l'ADN d'une autre espèce pour parvenir au résultat souhaité. Concrètement, il s'agirait uniquement d'accélérer le processus d'évolution naturelle d'un organisme.

    Le Gouvernement britannique, qui soutient ce programme, vient d'annoncer qu'il allait alléger la réglementation de l'édition génomique afin de permettre un plus grand nombre de cultures de ce type.

    De plus, en début d'année, le Ministre français de l'Agriculture, Julien Denormandie, a ainsi affirmé que « les NBT, ce ne sont pas des OGM. Il faut que ces NBT aient une réglementation conforme à ce qu'elles sont, et pas à ce à quoi on voudrait les associer. » Dans la foulée, la Commission européenne a publié un rapport favorable, qui ouvre la voie à une révision partielle de la loi votée en 2001 sur les OGM. Les Ministres européens de l'Agriculture ont salué fin mai les conclusions de ce rapport, tout en rappelant le principe de précaution.

    Monsieur le Ministre peut-il nous dire si ce genre de technique est d'ores et déjà d'application en Wallonie ?

    La Wallonie compte-t-elle promouvoir les NBT ?

    En tant que Ministre wallon de l'Agriculture, a-t-il reçu des directives particulières en la matière de la Commission européenne ?
  • Réponse du 09/12/2021
    • de BORSUS Willy
    Ce qui est qualifié de « new breeding techniques » (NBT) ou encore de « new genomic techniques » (NGT) consiste principalement à la mise en œuvre d’une mutagénèse ciblée qui utilise la technologie dite CRISPR-CAS, protéine qui permet de couper l’ADN de façon très précise pour ôter une séquence spécifique de l’ADN et y insérer éventuellement une autre séquence spécifique puisée dans le génome d’un individu de la même espèce.

    Cette technique entre juridiquement dans le périmètre de la législation européenne sur les OGM depuis la décision de la Cour de Justice européenne prise en juin 2018.

    A la question de savoir si cette technique est aujourd’hui d’application en Wallonie, la réponse est non, selon les informations qui m’ont été transmises par le SPF Santé publique, la compétence étant fédérale. Il m’est précisé que deux essais utilisant cette technologie CRISP-CAS ont eu lieu en Flandre sur du maïs, l’un en 2018 et l’autre en 2019. Des informations sur ces deux essais sont disponibles pour tout un chacun sur le site https://www.biosafety.be /search-gm-plants .

    Comme l’honorable membre le sait, la Commission est chargée de mener une étude d’impact sur la possibilité d’adopter une nouvelle législation européenne adaptée aux NBT. Aussi longtemps que ce processus n’aura pas abouti à une modification de la législation, c’est bien le cadre réglementaire existant applicable aux OGM qui s’applique aux NBT.
    Les discussions tenues au niveau européen sur la question des NBT montrent que de nombreuses questions restent sans réponse à l’heure actuelle et que des investigations sont nécessaires.

    Un colloque fort intéressant s’est tenu à l’initiative de la Commission européenne ce 29 novembre 2021. Les échanges entre les panellistes ont mis au jour de nombreuses zones d’ombre qui nécessitent des investigations approfondies et qui seront à prendre en compte et à clarifier dans l’étude d’impact. Je cite ici quelques sujets parmi les plus significatifs mis en exergue par les experts à cette occasion : comment assurer le contrôle et la traçabilité des produits issus des NBT sachant que ces modifications génétiques ne laissent pas de trace visible et que les méthodes d’analyse sont encore à développer ? Quel est l’impact de ces nouveaux produits sur l’environnement, le milieu naturel et la biodiversité ? Comment garantir l’intégrité des filières biologiques compte tenu du fait que cette technique n’est pas compatible avec les pratiques de l’agriculture biologique ? Comment assurer la traçabilité de ces produits pour garantir le libre choix pour les producteurs et les consommateurs ? Dès lors que l’adaptation du cadre réglementaire est motivée par la plus grande durabilité alléguée des produits issus de ces nouvelles techniques pour notre agriculture, comment cette durabilité va-t-elle être évaluée et prise en compte dans l’évaluation des demandes d’autorisation ? Comment les exigences imposées au sein de l’Union européenne vont-elles pouvoir être répercutées sur les produits issus des pays tiers ?

    Les conclusions, certes provisoires, de ce colloque à haut niveau, ont été tirées par la responsable de la DG Santé de la Commission européenne, qui a déjà épinglé certaines orientations qui seront prises en compte pour la suite des travaux : une évaluation des produits NBT au cas par cas, produit par produit, semble préférable à une autorisation globale ; la sécurité de ces produits pour la santé humaine et animale et pour l’environnement est une condition sine qua non ; le cadre réglementaire doit prendre en compte le maintien de l’intégrité du secteur biologique ; le contrôle et la traçabilité des produits NBT doivent être possibles et assurés.

    Pour la Commission, le calendrier de la suite des travaux consiste à boucler l’évaluation d’impact courant 2022 et à déposer une proposition législative courant 2023, sachant que tous les scénarios restent ouverts en fonction du résultat de l’évaluation d’impact, y compris un statu quo législatif.

    Je n’ai reçu aucune directive particulière de la part de la Commission européenne, et je reste très vigilant vis-à-vis de ce processus décisionnel, du contenu des propositions qui seront émises et des conséquences potentielles pour nos agriculteurs et pour nos citoyens consommateurs.