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L'agriculture régénérative

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 146 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 19/11/2021
    • de LEONARD Laurent
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    La société belgo-britannique Soil Capital, gestionnaire de fermes spécialisée dans l'agriculture régénérative, a développé un mécanisme de rémunération des agriculteurs qui stockent du carbone dans leurs sols. C'est le premier programme européen de rémunération carbone certifié pour l'agriculture. L'objectif de Soil Capital est de soutenir la transformation d'un million d'hectares en Europe vers un modèle plus régénératif d'ici 2025.

    La deuxième phase de son projet vient d'être lancée. Quinze agriculteurs belges y participent – 800 avaient marqué leur intérêt.

    Dans la DPR, le Gouvernement affirme son intention de soutenir « les programmes de formation et d'accompagnement vers les pratiques agroécologiques, basées sur les meilleures connaissances scientifiques agronomiques et écologiques, en vue de promouvoir les pratiques culturales visant à la fois la qualité de la production, la préservation de l'environnement, de la biodiversité et des sols et le développement de l'emploi ».

    Une des idées proposées dans « Get up Wallonia ! » est d'« investir dans la transition vers des processus de production agricole régénératifs et le développement d'installations de collecte, de redistribution et de valorisation des aliments ».

    Monsieur le Ministre a-t-il connaissance du projet de Soil Capital ?

    A-t-il déjà rencontré les membres de la société ?

    Que pense-t-il de cette initiative ?

    La Wallonie, dans l'esprit de la DPR et de « Get Up Wallonia ! » entend-elle soutenir ce genre de projets ?

    Quelles mesures va-t-il mettre en place afin de favoriser et soutenir l'émergence de pratiques régénératrices des sols wallons ?
  • Réponse du 30/11/2021
    • de BORSUS Willy
    L’agriculture, comme l’honorable membre le fait bien remarquer, est effectivement génératrice de gaz à effet de serre, mais en subit aussi les conséquences et est à même de faire partie de la solution dans la lutte contre le réchauffement climatique. L’élevage concentre certains reproches vis-à-vis de ses émissions de méthane. Or, ces émissions doivent être considérées en regard du rôle des prairies permanentes destinées à l’élevage dans la fixation du carbone si l’on veut dégager une vision plus objective. Il faut garder à l’esprit que celles-ci représentent quelque 42 % de notre surface agricole utile et compensent donc en grande partie les gaz à effet de serre des élevages wallons. Leur disparition signifierait une libération dans l’atmosphère des stocks de carbone accumulés depuis des décennies dans nos prairies. L’attention portée à notre élevage bovin reste donc primordiale.

    Avec les concepts d’agriculture durable, de conservation des sols, régénératrice … et la volonté politique de réduire les gaz à effet de serre, des opportunités privées se sont ouvertes pour la filière grandes cultures dans le secteur du carbone avec l’enjeu d’une rémunération spécifique pour service sociétal rendu.

    C’est dans ce marché naissant que la démarche « Soil Capital Carbon » de la jeune société Soil Capital a été lancée, en Belgique et en France, avec l’idée d’avoir des collectifs d’agriculteurs suffisants pour générer des crédits « carbone » attractifs pour des acheteurs potentiels.

    Même si « Soil Capital » ne bénéficie pas d’un subside public, elle bénéficie d’un prêt financier de la SOWALFIN. Elle a aussi effectué une demande de soutien à l’emploi SESAME proposé par le FOREm. « Soil Capital » est une démarche entrepreneuriale libre dans laquelle les pouvoirs publics ne peuvent directement s’immiscer.

    A contrario, il est de notre rôle d’ouvrir des perspectives et de les encourager. Ce que la Région wallonne n’a pas manqué de faire et continue de faire. Des programmes de recherche et de développement vont dans ce sens. À titre d’exemple, au travers des projets du CRA-w « Decide 2.0 » un outil de bilans de gaz à effet de serre, énergie et ammoniac des exploitations agricoles a été développé. En termes de développement sur le terrain, la Région soutient financièrement, aussi à titre d’exemple, l’association d’agriculteurs « Greenotec » pour encadrer ces derniers dans leurs développements en agriculture de conservation des sols.

    L’agriculture carbonée est un enjeu majeur global. Elle est au cœur du pacte vert de la nouvelle PAC. Ce programme européen a fixé un objectif ambitieux : celui de la neutralité climatique à l’horizon 2050.

    Les écorégimes de la PAC et principalement celui encourageant la couverture longue des sols ainsi que les mesures agroenvironnementales et climatiques dont la nouvelle mesure visant à augmenter le taux de carbone organique dans les sols et les financements privés peuvent se rejoindre pour encourager les pratiques agricoles qui aident à lutter contre le réchauffement climatique.

    Notre agriculture wallonne y a sa place. Nous en sommes bien conscients. Nous déposerons prochainement à la Commission notre Plan stratégique wallon incorporant explicitement et concrètement ces thématiques et actions allant dans le sens souhaitable : celui d’une agriculture carbonée, mais aussi durable environnementalement et économiquement.

    La Région wallonne n’a toutefois pas attendu cette PAC pour agir en faveur du stockage du carbone dans le sol. En effet, les prairies qui jouent un rôle majeur dans le maintien du carbone dans les sols, sont déjà protégées via :
    - le réseau Natura 2000 complètement mis en œuvre en 2018 ;
    - les mesures agroenvironnementales qui permettent de protéger les prairies naturelles et de haute valeur biologique, ainsi que les exploitations visant l’autonomie fourragère et la faible charge en bétail.

    Nous avons aussi directement un rôle important à jouer avec des sociétés comme Soil Capital : celui d’instaurer un cadre propice de concertation « public – privé » afin de s’assurer d’une bonne complémentarité avec effets démultipliés entre initiatives libres et réglementation.

    Je serai attentif au fait que, si les conditions belges sont propices à la demande de certificats carbone par nos industries de transformation, celle de l’offre l’est cependant moins. La taille plus réduite de nos exploitations comparativement à celles des grandes plaines de cultures françaises joue ici en notre défaveur. Elle constitue un frein financier, compte tenu du fait qu’il y a un coût d’adhésion fixe moins facilement amortissable.