/

Le projet d'usine de kérosène synthétique

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 205 (2021-2022) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 22/11/2021
    • de BELLOT François
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie et de la Mobilité
    Un groupe d'industriels wallons a l'objectif de produire un kérosène synthétique en combinant de l'hydrogène avec du CO2.

    En attendant que la propulsion des avions soit technologiquement envisagée autrement, le projet nommé N-Kéro permettrait aux avions de devenir « neutres » sur le plan climatique grâce à un kérosène bien loin du combustible fossile actuel.

    Ce projet est boosté par l'ambition de l'Europe d'atteindre 28 % de kérosène « propre » en 2050.

    Le consortium à l'initiative de N-Kéro se compose de Resa, du groupe industriel Hamon, du groupe d'ingénierie De Smet ainsi que de l'ULiège.

    La Wallonie a toutes les compétences et les acteurs pour se placer en précurseur dans cette filière industrielle novatrice.

    La production annuelle ciblée pour N-Kéro est de 250 000 m3 de kérosène à destination de Liege Airport. Cela correspond à 1 million de tonnes de CO2 et à 150 000 tonnes d'hydrogène.

    L'avantage du CO2 est qu'il est disponible en quantité dans l'air ainsi qu'auprès des industries qui l'émettent dans le cadre de leurs activités.

    Afin de défendre en Wallonie une réelle plus-value écologique dans la gestion du CO2, Monsieur le Ministre a-t-il proposé la mise en place d'un réseau permettant d'avoir accès à ces émetteurs de CO2 tels que des verriers ou des cimenteries ?

    Quelles autres plus-values souhaite-t-il développer ?

    L'hydrogène constitue quant à lui la difficulté du projet. Il devrait être vert, mais le produire à partir d'énergies renouvelables nécessite beaucoup d'énergie et l'offre du renouvelable actuelle est insuffisante.

    Pour la production d'hydrogène, ce sont 900 MW de puissance électrique qui seront nécessaires en continu

    Comment compte-t-il agir pour ces projets alors que la Belgique tend à fermer ses centrales nucléaires et que le renouvelable ne peut aujourd'hui répondre entièrement aux exigences ?

    Face à la diminution de puissance électrique à venir, quelles actions mène-t-il pour ouvrir des voies à ces projets ?
  • Réponse du 11/01/2022
    • de HENRY Philippe
    Je suis évidemment au courant des projets de production de kérosène synthétique en Wallonie, dont celui de Liège.

    Dans ce type de projet, le kérosène sera probablement en grande partie décarboné.

    L’honorable membre le mentionne, ce projet s’axerait soit sur de la capture atmosphérique de CO2, soit en complément d’entreprises émettrices.

    Les divers projets de production de kérosène ayant été remis dans le cadre des compétences de recherche et innovation, il sera sans doute plus simple de se tourner vers le Ministre en charge de cette compétence pour savoir comment il entend soutenir cette filière particulière.

    Je confirme, par contre, que la décarbonation du secteur aérien est une priorité essentielle pour le secteur.

    Il semble évident, et même acquis, que le kérosène à faible impact de carbone est une étape nécessaire à la transition climatique dans le secteur aérien. Plusieurs technologies sont actuellement en compétition. Je pense plus particulièrement aux algae fuels développées depuis plusieurs années déjà et qui offrent des perspectives prometteuses et le kérosène synthétique qui a acquis une certaine notoriété ces derniers temps avec l’attention portée sur l’hydrogène et ses perspectives.

    Comme j’ai déjà eu l’occasion de le rappeler, la transition énergétique et climatique passera par l’hydrogène.

    Je ne suis par contre pas convaincu que de fonder tous les espoirs sur l’hydrogène de manière aussi rapide sera de nature à réellement permettre son développement dans des conditions saines. Surtout énergétiquement.

    Ce sera encore pire avec les technologies de capture atmosphérique existante. Ce CO2 risquerait d’être produit dans des conditions énergétiques désastreuses en termes d’efficacité.

    Il ne faut en effet jamais oublier de rappeler que chaque étape de transformation, de l’eau à l’hydrogène, de l’hydrogène à un combustible de synthèse, a un impact énergétique important qui s’accroît avec la chaîne de carbone. Lorsque la capture de CO2 se fait dans l’atmosphère, le cycle devient difficilement soutenable économiquement dans les conditions technologiques actuelles.

    J’insiste donc sur un point très important, trop souvent ou trop rapidement oublié. Le développement de carburants de synthèse à bas impact en carbone en est toujours à des étapes de prototypage pré-industriel ; laisser croire que le cap est à une industrialisation à grande échelle trop rapide, sans respecter les chaînes de développement, serait probablement de nature à contraindre ces technologies plutôt qu’à réellement les soutenir efficacement.

    Pour conclure, je suis donc bien favorable au développement d’une filière responsable et intégrée avec des acteurs qui connaissent les enjeux énergétiques, climatiques et soucieux des intérêts économiques des filières qu’ils souhaitent soutenir.
    Cette remarque est également valable pour d’autres filières de valorisation, comme la production de gaz de synthèses, d’ammoniac, la minéralisation du CO2, le développement de la chimie des polycarbonates …

    De plus, comme l’honorable membre le mentionne, il y a aussi des ressources importantes en CO2 à valoriser au niveau des cimenteries et dans les fours à chaux. Ce sont des secteurs économiques qui ont besoin de voir des solutions développées.

    Enfin, dans ce contexte, la mise en place d’une logistique du CO2 sera importante si une valorisation du CO2 n’est pas envisageable sur site. Nous avons déjà eu des contacts avec FLUXYS sur le sujet, surtout dans le cadre de leur projet CO2-backbone.