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Les objectifs stratégiques n° 1 et 2 de la stratégie wallonne de politique répressive environnementale

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 168 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 22/11/2021
    • de MATAGNE Julien
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Le projet de stratégie wallonne de politique répressive environnementale a fait l'objet d'une présentation et d'un débat au cours de nos travaux en commission. Dans ce cadre, nous avons pu avoir une discussion générale et ainsi mettre en lumière certains éléments à améliorer avant la finalisation de cette stratégie. Récemment Madame la Ministre a par ailleurs confirmé qu'une analyse était en cours concernant les interventions des différents députés afin d'amender le projet.

    Comme j'ai déjà eu l'occasion de le souligner, cette stratégie est pour moi un instrument important en matière de préservation de notre environnement et en matière de lutte contre le sentiment d'impunité. Dans ces conditions, dans un esprit de co-construction et d'amélioration continue du projet, je souhaite lui faire part de différentes interrogations plus particulières qui se posent en ce qui concerne les objectifs stratégiques n° 1 et 2 de cette stratégie.

    Concernant le premier objectif.

    Concernant la difficulté du manque de personnel qui est abordée en page 33 dans la version qui nous a été présentée, il est indiqué que les effectifs ne sont pas suffisants actuellement pour permettre d'assurer « le suivi des remises en état imposées à la suite d'arrêts prononcés par les tribunaux ou par voie de sanctions administratives (…) dans des délais raisonnables. ».

    Quelles sont les solutions apportées par la stratégie pour répondre à ce besoin ?

    Comment va-t-on pouvoir accélérer ces vérifications dont dépend la réparation des dommages environnementaux ?

    Toujours en page 33, la stratégie évoque un « effectif d'une dizaine d'agents constatateurs » en ce qui concerne l'Unité du Bien-être animal. Nous savons que ce chiffre est totalement insuffisant compte tenu de l'ampleur de la tâche, notamment en fonction du territoire wallon. Dans une précédente intervention sur le sujet, elle avait indiqué qu'il y avait des mouvements prévus au sein de cet effectif. Pourrait-elle repréciser lesquels ?

    Par ailleurs, elle indiquait également que « un renfort complémentaire de ces services paraît, au vu de l'ampleur croissante de leurs missions, totalement indispensable ». Elle avait alors souligné que « pour ce type de services qui agissent sur le terrain, pour effectuer les missions essentielles des compétences de la Région et qui de plus sont en sous-effectifs criants, une solution globale doit pouvoir être mise en place au sein du Gouvernement. »

    Est-ce qu'une telle solution a pu être trouvée au sein du Gouvernement ?

    Est-ce que la stratégie va accélérer le recrutement dans ce service ?

    Après avoir évoqué les effectifs des agents constatateurs, la stratégie évoque ensuite le service du fonctionnaire sanctionnateur régional et souligne son importance dès lors qu'il prononce les sanctions administratives et impose les remises en état. En page 34, on indique que « le personnel disponible actuellement au sein de ce service a été multiplié par deux ». Néanmoins, la Stratégie ne précise pas quel en est son effectif actuel.

    Madame la Ministre pourrait-elle nous exposer la situation de ce service ?

    Dans ce même passage, on indique que cette évolution du personnel au sein du service du fonctionnaire sanctionnateur a certes évolué, mais qu'il n'a pas été multiplié suivant le même facteur que le nombre de procès-verbaux devant être traité. On indique alors que la conséquence est un « allongement du délai de recouvrement des amendes ».

    Pourrait-elle nous préciser le rôle de ce service et spécifiquement des fonctionnaires sanctionnateurs en matière de recouvrement ?

    Est-ce que ce recouvrement ne devrait pas être centralisé auprès d'autres services régionaux ?

    Dans ce premier axe, on parle beaucoup du personnel dédié à l'environnement et au bien-être animal, mais on ne parle pratiquement pas des effectifs consacrés aux missions dévolues à la compétence « Nature ». Après l'exercice d'une recherche sur les initiales « DNF » pour « Département de la Nature et des Forêts », il s'avère qu'il y a trois occurrences dans le texte, dont une dans la liste des abréviations.

    Comment peut-on expliquer que ce service ait si peu de place dans la stratégie qui concerne pourtant tout autant la biodiversité ?

    Cette absence a d'ailleurs été remarquée également par les pôles environnement et ruralité. Par ailleurs, quels sont ses effectifs en matière de contrôle ?

    Enfin, en page 39, plusieurs actions prioritaires à mettre en œuvre concernent la définition d'un plan de contrôle. Cela concerne à la fois l'environnement, la lutte contre la maltraitance animale et les activités de la criminalité environnementale grave. Je regrette qu'on se contente ici d'indiquer qu'il faut en adopter. Bien sûr qu'il faut en adopter, la stratégie n'apporte rien à ce sujet. Je m'attendais plutôt à ce qu'il y ait déjà des priorités d'actions fixées sur certaines infractions environnementales spécifiques et en matière de bien-être animal également.

    Le Gouvernement ne peut-il préciser davantage sa volonté et ses intentions dans cette stratégie en matière de plan de contrôle ?

    Concernant le second objectif, la stratégie pose une volonté du Gouvernement de réformer le décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement pour améliorer les mécanismes de sûreté bancaire et d'assurance couvrant le risque environnemental.

    Madame la Ministre pourrait-elle préciser le mécanisme actuel et les pistes envisagées pour cette révision ?

    Lorsque la stratégie indique qu'il est nécessaire de s'assurer que la norme adoptée est parfaitement contrôlable avant son adoption, nous sommes parfaitement sur la même longueur d'onde. C'est en effet le minimum qu'on peut attendre d'une norme adoptée par une autorité à savoir qu'elle puisse être pertinente sur le terrain et contrôlable.

    Pourrait-elle nous indiquer comment ce contrôle que l'on comprend comme étant « administratif » sera mené et par qui ?

    On sait également que lorsque le Gouvernement fait ses arbitrages sur un arrêté qu'il lui arrive de modifier le contenu des normes proposées par l'administration. Dans ces conditions, comment est-ce que ce contrôle préalable sera opéré ? Ou comment restera-t-il pertinent si des modifications sont opérées ?

    En page 45 de la stratégie dans la version qui nous a été présentée, une des actions prioritaires vise à rédiger les arrêtés d'exécution du Code du Bien-être animal. L'utilité de cette mention dans le cadre de la stratégie ne saute pas aux yeux. Sauf erreur, il existe bon nombre d'arrêtés déjà existants soit wallons soit encore issus de la compétence fédérale.

    Dans ces conditions, l'effectivité des normes existe d'ores et déjà. Madame la Ministre pourrait-elle expliquer les motifs de cette action prioritaire dans le contexte de la stratégie ?

    Par ailleurs, quels sont les arrêtés visés et suivant quelles priorités ?

    Le secteur de la protection animale se pose la même question dans son avis.
  • Réponse du 27/12/2021
    • de TELLIER Céline
    La stratégie de politique répressive a été adoptée définitivement par le Gouvernement le 16 décembre 2021.

    La plus grande collaboration voulue par la stratégie avec les pouvoirs locaux permettra de répondre à cette nécessité de contrôle des remises en état au travers du protocole d’accord.

    Au sujet des effectifs de l’UBEA, au cours des derniers mois, trois personnes sont venues renforcer l’équipe : un juriste, un agent administratif pour le suivi des dossiers entrants et la préparation de l’organisation des contrôles, et enfin un contrôleur de terrain. Par ailleurs, la procédure de recrutement d’un inspecteur « vétérinaire » débutera dans les prochaines semaines pour combler un poste libéré récemment. Le retour d’un agent en congé de maladie est aussi attendu. Une réflexion quant à l’éventuel rapprochement du service de contrôles et du service normatif est également en cours. Le service normatif abrite en effet des contrôleurs de terrain dont l’action pourrait venir compléter, voire renforcer, l’action répressive. Il s’agirait donc d’un gain potentiel par mutualisation des ressources.

    La stratégie de politique répressive n’a pas pour objet de modifier les règles applicables en matière d’engagement des agents, lesquelles demeurent régies par le code de la fonction publique. L’engagement d’agents est donc toujours tributaire de la capacité d’engagement du Gouvernement, de ses budgets et des procédures applicables. Néanmoins, je peux assurer à l’honorable membre que ma volonté exprimée au travers de l’action n°2 est bien réelle.

    Quant au Service du fonctionnaire sanctionnateur, ce service compte aujourd’hui trois Fonctionnaires sanctionnateurs de niveau A et un de niveau B, ainsi qu’un staff administratif de 7 personnes. Le plan de personnel 2022 prévoit un renfort administratif et un renfort juridique pour ce service si les moyens budgétaires le permettent.

    Le Service du fonctionnaire sanctionnateur, en ce qui concerne le recouvrement des sanctions administratives infligées, se limite à envoyer le 1er rappel au contrevenant, et à gérer les paiements spontanés, ainsi que les plans de paiements.

    Le recouvrement forcé est par contre délégué à des avocats désignés via un marché public dès lors que les premiers rappels de paiement émis par le service du fonctionnaire sanctionnateur n’ont pas abouti.

    La possibilité de rassembler les missions de recouvrement au sein d’un seul et même service du Service public de Wallonie pourra être étudiée avec les Ministres compétents. Dans le contexte de la mise en place future de la nouvelle application informatique de gestion des infractions environnementales, le dispositif informatique envisagé permettra la gestion des recouvrements par le biais des services du SPW Finances. Cette application devrait aussi faciliter le travail du Service du fonctionnaire sanctionnateur, qui pourra se recentrer sur ses tâches principales.

    Par ailleurs, le Service du fonctionnaire sanctionnateur exerce d’autres missions en parallèle de ses missions de sanctions administratives. D’une part, les Fonctionnaires sanctionnateurs participent à la formation des agents régionaux et communaux, en matière de législation environnementale, d’autre part, ils participent à différentes plateformes, telles qu’une plateforme d’échange avec les Fonctionnaires sanctionnateurs communaux et provinciaux, mais aussi une plateforme d’échange d’information et de coordination avec les Parquets.

    Enfin, avec le nouveau décret, les Fonctionnaires sanctionnateurs se voient confier de nombreuses tâches supplémentaires, notamment assurer la gestion de la saisie administrative des biens pouvant être source d’une infraction ou ayant servi à commettre l’infraction, mais aussi recourir à des modes alternatifs de sanctions et veiller à leur bonne exécution. En outre, ils disposeront d’un ensemble de nouveaux pouvoirs, tels que la sollicitation des devoirs complémentaires auprès des agents de constat, la demande de production de document, l’audition de toute personne dont l’entente pourrait être utile, se rendre sur les lieux des faits, etc. La mise en place et la mise en œuvre de ces pouvoirs et des obligations qui en découlent dans le chef des Fonctionnaires sanctionnateurs, nécessitera un soutien en ressource humaine fort. Il sera donc bien répondu à ce besoin nouveau, comme je l’ai détaillé lors des débats en commission environnement sur la Stratégie.

    Pour ce qui est du nombre d’occurrence de l’abréviation « DNF » dans la stratégie, celui-ci n’est pas révélateur de manque d’intérêt pour la forêt ou la nature. Tout au contraire puisqu’une stratégie propre à ces thématiques est en cours d’élaboration par l’administration : la stratégie « Biodiversité 360° ». Il est également important de souligner que toutes les améliorations portées par la Stratégie de politique répressive bénéficieront à tous les services du SPW et aux nombreux acteurs locaux chargés de la recherche et de la constatation des infractions.

    Il me faut préciser que le Département de la Nature et des Forêts est un département hybride en ce qu’il est à la fois un département normatif dans certaines matières (Nature, Forêts et Chasse), un département qui s’occupe d’une gestion patrimoniale de différentes problématiques, mais également un département composé d’agents et d’officiers de police judiciaire chargés de rechercher et constater les infractions à différentes législations.
    Le nombre d’agents ou officiers de police judiciaire du DNF peut-être évalué à environ 550 agents (en cas de cadre complet 489 OPJ et 142 APJ), mais qui ont d’autres missions que celle de recherche et constat d’infraction (par exemple Directeur, Chef de Cantonnement, gradué cartographe, attaché Natura 2000) sur l’ensemble du territoire. Parmi ces autres missions sur le territoire wallon, citons la gestion forestière (martelage, vente de bois ...) ou encore cynégétique (plan de tir ...).

    D’autre part, une partie importante des missions de recherche et de constat d’infraction des agents du DNF dépend de compétences d’autres Ministres (Chasse, pêche, urbanisme).

    Si le DNF peut sembler être moins pris en compte dans la stratégie de répression environnementale, c’est donc dû à son rôle hybride et à ses compétences multiples.

    Si effectivement le Gouvernement n’a pas besoin d’une Stratégie pour pouvoir adopter un plan de contrôle, il était important que ce plan ait une existence au travers de la Stratégie. Notamment pour que ce plan puisse faire l’objet d’une évaluation au travers de l’évaluation globale de la stratégie, et puisse, finalement, engager les Gouvernements.

    Le plan de contrôle en matière d’environnement déterminera des priorités. À cet égard, citons la mise en œuvre de l’exécution des contrôles liés aux obligations européennes (comme les contrôles des entreprises IPPC/IED par exemple), le suivi par l’administration des plaintes relatives aux établissements classés au sens de la législation sur le Permis d’Environnement, de classe 1 et 2, le suivi répressif des accidents de pollution, et aussi la réalisation de contrôles additionnels thématiques répondant à des préoccupations environnementales conjoncturelles spécifiques ou sociétales.

    En ce qui concerne le régime actuel de la sûreté bancaire : ce régime, qui a été mis en place par la législation relative au permis d’environnement, précise que l'autorité compétente peut, sur proposition de l’administration, imposer à l'exploitant de fournir, avant la mise en œuvre du permis d'environnement, une sûreté au profit du Gouvernement. Elle est destinée à assurer l'exécution des obligations de l’exploitant en matière de remise en état du site (donc enfin d’exploitation) et dont le montant est équivalent aux frais que supporteraient les pouvoirs publics s'ils devaient faire procéder à la remise en état. Cette sûreté est en tout cas toujours exigée pour les opérations d’extraction en carrière et pour les centres d'enfouissement technique visés au décret du 27 juin 1996 relatif aux déchets.

    Dans le cas où une sûreté est requise, le permis n'est exécutoire qu'à partir du moment où l’administration reconnaît que la sûreté a été régulièrement constituée. Ainsi, il s’agit bien d’une condition préalable à tout début d’exploitation.

    La sûreté consiste, au choix de l’exploitant, en un dépôt à la Caisse des Dépôts et Consignations, ou en une garantie bancaire indépendante, ou en toute autre forme de sûreté que le Gouvernement détermine, à concurrence du montant précisé dans le permis.

    L’administration est tenue de constater la remise en état dans un délai de soixante jours à dater de l'introduction par l'exploitant de la demande de constat. À défaut de décision dans le délai requis, la remise en état est réputée conforme.

    À l'expiration d'un délai de trois mois à dater du constat de remise en état, et en l'absence de réserves de l’administration, la sûreté est libérée et les intérêts éventuels produits sont restitués.

    Néanmoins, il est apparu, par le biais de quelques dossiers récents, que l’administration maîtrisait imparfaitement le processus dans son ensemble. Des améliorations s’imposent donc.

    Dans le plan de projets 2021 du Contrat d’Administration 2020-2025 du SPW-ARNE, figure un projet (SPW-J00126) destiné à améliorer le mécanisme du cautionnement.

    Le Comité de direction du SPW-ARNE a approuvé l‘exposé de projet qui est articulé autour de 3 axes principaux :
    - revoir les critères de fixation du montant du cautionnement afin de les rendre plus transparents ;
    - vérifier les conditions de mise en œuvre des permis afin de s’assurer que, sur le terrain, les travaux ne commencent pas aussi longtemps que la sûreté n’a pas été constituée ;
    - maîtriser le processus dans la durée afin que le montant des sûretés soit régulièrement réévalué de telle sorte que, en fonction notamment de l’évolution des prix du marché, elles correspondent le plus fidèlement possible à la somme que la Région devrait débourser si elle devait effectuer elle-même les travaux de réaménagement.

    Les bénéfices attendus de cette réforme sont :
    - pour l’exploitant, avoir une vision transparente de la manière dont les sûretés sont calculées et adaptées ;
    - pour l’administration, calculer au plus juste (dans le temps) le montant de la sûreté pour le cas où elle devrait y faire appel.

    En ce qui concerne l’assurance, il s’agit de rendre obligatoire la conclusion d’une police d’assurance couvrant le risque environnemental et industriel de l’exploitation d’une activité classée. Une étude préalable, et des discussions avec les secteurs seront menées afin que la proposition soit soutenable pour les entreprises wallonnes qui seront concernées (cela ne concernera pas toutes activités classées, mais certaines uniquement).

    La vérification de la contrôlabilité des normes est effectuée au sein de l’Administration par la relecture, systématique, des projets de normes à vocation de contrôle par le Département de la Police et des Contrôles.

    La modification des textes proposés par l’administration au stade de l’arbitrage du Gouvernement n’est pas concernée. Le Gouvernement étant responsable des modifications éventuelles qu’il apporte, il devra rester attentif à veiller à la contrôlabilité de la norme, le cas échéant en consultant le Département de la Police et des Contrôles, quant aux modifications envisagées.

    Enfin, l’indication de la nécessité de compléter, ou modifier l’arsenal réglementaire en matière de bien-être animal a vocation à engager le Gouvernement dans cette démarche. Il s’agit d’ailleurs d’un élément repris dans la déclaration de politique régionale 2019-2024. Ainsi, le précédent Gouvernement a adopté un Code wallon du Bien-être animal qui ne peut être complet sans les arrêtés nécessaires à son exécution. L’arsenal réglementaire n’est en effet pas complet puisque certains animaux sont encore « oubliés » de la réglementation, il en allait ainsi par exemple pour les dindes. C’est la raison pour laquelle ce 9 décembre dernier, le Gouvernement a adopté, sur ma proposition, un arrêté fixant leurs conditions d’élevage, sur base de l’avis du Conseil wallon du Bien-être animal. Le Conseil s’est également prononcé sur les conditions de détention des chevaux, pour lesquels aucune norme de détention n’est encore édictée. Je ne manquerai pas de préparer aussi un arrêté pour transposer cet avis.