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Le coût pour les citoyens de la transition vers des véhicules cent pour cent électriques

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 220 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 23/11/2021
    • de FREDERIC André
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie et de la Mobilité
    Le coût d'acquisition des véhicules électriques constitue un obstacle pour les ménages sans revenus, ou à revenus faibles ou moyens. L'électrification du parc de véhicules dans laquelle nous allons basculer va nécessiter aussi l'achat de matériels adéquats pour pouvoir recharger un ou plusieurs véhicules 100 % électriques à domicile.

    Pour ce faire, les ménages vont non seulement devoir s'équiper d'une borne de recharge (sans quoi il faudra de nombreuses heures pour recharger sur une simple prise) mais aussi adapter l'installation électrique de leur logement.

    Nous constatons malheureusement que même avec des logements récemment rénovés, les nouveaux coûts pour les ménages pourraient potentiellement être très importants. Dans le cas d'un ménage possédant une maison totalement rénovée en 2015, avec une installation de 40A en monophasé, si ce ménage n'a d'autre solution que d'acquérir un ou deux véhicules 100 % électriques, il devra demander au gestionnaire de réseau, une augmentation de puissance.

    En effet, le ménage ne pourrait pas concevoir, avec son raccordement actuel en monophasé, l'alimentation d'un ou deux véhicules électriques et une puissance de consommation nécessaire pour le ménage (lave-linge, sèche-linge, taques, etc.).

    Si ce même ménage fait augmenter la puissance électrique par son gestionnaire de réseau, il devra ensuite prévoir le rapport de mise en conformité électrique, le changement du câble qui alimente le logement, le changement du différentiel général, etc.

    Même si le ménage décidait de placer des panneaux photovoltaïques (encore un coût même si c'est rentable sur la durée), il ne parviendrait tout de même pas à combler la puissance électrique dont il aurait besoin pour tout.

    Les bornes de rechargement publiques ou sur le lieu de travail n'apporteront pas de solution : d'une part les employeurs ne seront pas en mesure d'installer des bornes équivalent au nombre d'employés, et d'autre part l'extension du télétravail ne permettra pas aux employés de recharger régulièrement leur véhicule sur le lieu de travail.

    Bien que les citoyens soient conscients de l'enjeu de cette transition, l'addition et la complémentarité des démarches vont engendrer des coûts significatifs pour la plupart des ménages.

    Monsieur le Ministre peut-il m'indiquer ce qu'il compte faire pour permettre aux ménages de faire face à ces coûts ?

    Des mesures d'accompagnement vont-elles être prises ?

    Une étude de l'impact de la transition sur la facture des ménages a-t-elle déjà été réalisée par son administration ?
    Dans l'affirmative, peut-il nous communiquer les résultats ?
  • Réponse du 16/12/2021
    • de HENRY Philippe
    Les questions que l’honorable membre relève sont essentielles dans le cadre de la transition vers un transport moins impactant en termes d’émissions. Vous soulevez d’ailleurs l’équation idéale qui consiste à lier la production photovoltaïque et l’électromobilité.

    Tout d’abord, en ce qui concerne le coût des véhicules. Il est une évidence que celui-ci est jusqu’ici supérieur à des véhicules plus conventionnels. Certaines études montrent que si on tient compte de la consommation en carburant et l’entretien, les véhicules sont déjà plus intéressants actuellement sur leur durée de vie. Il est cependant évident que peu de personnes ont actuellement les moyens de s’offrir un véhicule électrique.

    Les constructeurs ont systématiquement privilégié, historiquement, des gammes de véhicules plus luxueuses avec une recherche de l’autonomie, au détriment du prix. Très récemment, certains constructeurs ont étoffé leur offre en vue d’intégrer des modèles moins onéreux, ce qui offre, dès lors, des perspectives de démocratisation assez rapide du parc électrique. Ajoutez à cela l’apparition d’un marché de l’occasion et un réel marché du véhicule électrique pourra se mettre en place.

    Le développement de ces véhicules passera sans doute par une fiscalité adaptée en rappelant, à ce niveau, la vigilance d’usage afin de maintenir les trajectoires budgétaires de la Région.

    En ce qui concerne les investissements à considérer, il semble évident que quelque chose doit pouvoir être envisagé pour que nos concitoyens investissent dans une borne de chargement domiciliaire. Ne serait-ce que pour des raisons de sécurité. À ce niveau, l’Europe devrait probablement réviser la Directive PEB afin d’intégrer de nouveaux éléments de nature à renforcer l’ancrage de l’électromobilité. En fonction, nous pourrons prendre des mesures spécifiques.

    Je rappelle cependant que tout le monde ne dispose pas d’un parking ou d’un garage et là aussi, il sera important de se pencher sur la question afin d’offrir un service universel à prix attractif.

    J’en viens justement au prix. Comme je l’ai signalé, l’équation photovoltaïque - électromobilité est probablement la meilleure. Avec une électricité à bas coût et la garantie d’être décarbonée, on est bien dans un schéma vertueux et abordable.

    Je tempérerai néanmoins son propos. Avec une consommation moyenne d’environ 8 kilowattheures, une installation photovoltaïque est totalement à même de répondre aux besoins en électromobilité. De même, un raccordement standard permettrait en deux heures et demie de recharger le véhicule, même sans devoir recourir à du triphasé.

    Par contre en cas de chargement sur le réseau électrique, l’augmentation des coûts aura clairement un impact sur l’approvisionnement des véhicules. Des dispositifs existent déjà puisque l’Europe autorise une dissociation des contrats de fourniture pour en disposer d’un spécifique pour les véhicules électriques.

    La question deviendra par contre plus sensible pour les personnes tributaires des infrastructures publiques ou privées de chargement sur lesquelles il sera impératif que le Fédéral puisse intervenir dans le cadre de la protection des consommateurs.

    En ce qui concerne l’impact de la transition sur la facture énergétique, la question est effectivement importante. Elle se marquera sur le productible et non tant sur les charges annexes. La toute récente étude d’ELIA « Road to net zero » montre une évolution vers un réseau de plus en plus flexible avec des déplacements de charge pour optimiser la consommation en fonction de la disponibilité en énergie renouvelable à très bas coût.

    Vu avec le standard actuel, donc avec un compteur bihoraire, il est évident que l’impact serait conséquent. Mais avec, d’une part, une demande énergétique « classique » (comme le chauffage) en diminution, une industrie plus efficiente, une partie des consommations actuelles s’orientant vers la production d’hydrogène ou l’électromobilité et, d’autre part, une part croissante d’énergies renouvelables à coûts nettement mieux maitrisés, l’impact sur la facture pourrait être équilibré. Pour autant, évidemment, que les investissements soient faits raisonnablement sans que la charge pour nos concitoyens soit écrasante, sans quoi, nous raterons une partie de cette transition par manque de clairvoyance.