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La déclaration d'indépendance de la République serbe de Bosnie

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 62 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 17/12/2021
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à DI RUPO Elio, Ministre-Président du Gouvernement wallon
    Il y a 30 ans, le monde regardait avec inquiétude l'embrasement des Balkans. Aujourd'hui, le spectre d'un nouveau conflit semble se profiler à l'horizon. En effet, la République serbe a mis ses menaces à exécution en faisant adopter par son Parlement, le vendredi 10 décembre, des lois la séparant de l'État central de Bosnie-Herzégovine. Annoncées par l'élu serbe à la présidence tripartite de Bosnie, Milorad Dodik, ces lois, applicables dans un délai de six mois, concerneraient la défense (armée et services de renseignements), la justice et la fiscalité. Si elles étaient appliquées en juin 2022, cela mènerait de facto, le camp nationaliste bosno- serbe à faire sécession de Sarajevo. Rappelons que la dernière fois qu'un tel plan serbe a été mis en œuvre, il y a 30 ans, cela a mené à la guerre.

    Les Balkans, nous le savons, sont source de tensions, mais aussi d'enjeux géopolitiques importants. Et si, autrefois, l'URSS pouvait avoir un rôle d'acteur, aujourd'hui, nous devons intégrer un changement de paradigme au niveau des influences avec l'arrivée de la Chine qui elle a tout intérêt à voir se fragiliser l'est de l'Europe pour étendre son influence politico-commerciale.

    Monsieur le Ministre-Président dispose-t-il de davantage d'informations sur le risque d'un conflit dans cette partie du monde ?

    De quels leviers ou moyens dispose-t-il dans le cadre d'une éventuelle coordination avec l'État fédéral et avec l'Union européenne en vue de désamorcer cette situation ?

    Enfin, qu'en est-il des négociations concernant l'adhésion de la Serbie à l'Union européenne ?

    En mai dernier, il me répondait que les progrès engrangés par Belgrade montraient qu'ils étaient très insuffisants et que la Commission déplorait des retards importants dans les domaines suivants : l'indépendance de la justice, la lutte contre la corruption, la liberté des médias, le traitement interne des crimes de guerre et la lutte contre le crime organisé.
  • Réponse du 21/12/2021
    • de DI RUPO Elio
    Les tensions aux portes de l’Europe, dans un pays candidat à l’adhésion, sont très graves.

    Qu’elles menacent le processus d’adhésion, c’est une évidence. Elles font également peser une menace sur la stabilité aux frontières orientales de l’Union européenne.

    La fédération de Bosnie-Herzégovine et de Serbie risque aujourd’hui d’éclater.

    Milorad Dodik, le dirigeant serbe de la fédération tripartite conteste une résolution sanctionnant la glorification ou la négation des crimes de guerre.

    M. Dodik ne respecte pas les accords de Dayton. En 1995, ces accords ont mis fin au conflit meurtrier en Bosnie-Herzégovine et Serbie. Il conteste également la légitimité du haut représentant international nommé par le Conseil de Sécurité, à l’unanimité moins la voix de la Russie. Et enfin, il a fait voter une résolution pour la création d’une armée serbe et d’un système judiciaire propre à l’entité serbe de la Bosnie. C’est une menace de sécession très claire.

    Cette menace survient à l’approche des élections générales en 2022. Or, la loi électorale est en cours de révision et les tensions entre les parties sont extrêmes.

    Aux menaces de M. Dodik, s’ajoutent les revendications du camp nationaliste croate de Bosnie-Herzégovine. Son leader, M. Dragar Covic, veut en effet renforcer le caractère ethnique du vote.

    La rencontre de M. Dodik avec les dirigeants russes, dont Vladimir Poutine, a levé la tension d’un cran supplémentaire. M. Dodik a en effet demandé au chef de la diplomatie russe, M. Sergei Lavrov, de le soutenir militairement en cas de sécession.

    La position de la Belgique, exprimée en Conseil Affaires générales, est claire : ce qui est en train de se passer sous nos yeux est inacceptable. La Wallonie s’est bien évidemment jointe à cette position.

    Les réformes revendiquées vont creuser les divisions ethniques et ceci est contraire aux valeurs prônées par l’Union européenne.

    En ce qui concerne les négociations d’adhésion avec la Serbie, elles se poursuivent et se heurtent aux mêmes problèmes que ceux décrits en mai.

    Un de ceux-ci était l’indépendance du système judiciaire. Un référendum doit se tenir le 16 janvier 2022 en vue de réformer le pouvoir judiciaire. L’Union européenne y est très attentive.

    Entretemps, les négociations ont été élargies aux aspects liés au « Green Deal » et à la connectivité. Le Premier Ministre serbe a annoncé que son pays aurait besoin d’un milliard d’euros pour s’aligner sur les standards environnementaux de l’Union européenne.
    Lors des derniers échanges avec la Serbie, le Commissaire en charge de l’élargissement, M. Oliver Varhelyi, a déclaré que le respect de l’État de droit et la normalisation des relations avec le Kosovo étaient des éléments indispensables à la poursuite à la conclusion des négociations. Il s’agit d’un point de vue que je soutiens.