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L'interprétation de l'arrêté du Gouvernement wallon du 4 juillet 2002 arrêtant la liste des projets soumis à étude d'incidences sur l'environnement

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2021
  • N° : 240 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 20/12/2021
    • de JANSSEN Nicolas
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    L'annexe I de l'arrêté du Gouvernement wallon du 4 juillet 2002 arrêtant la liste des projets soumis à étude d'incidences, des installations et activités classées ou des installations ou des activités présentant un risque pour le sol, dresse la liste des projets nécessitant la réalisation d'une étude d'incidences sur l'environnement.

    La sous-rubrique 52.10 de cette annexe définit ce qu'est un commerce de détail en magasins non spécialisés de la manière suivante : « Commerce de détail en magasins non spécialisés : tout magasin présentant à la vente une large gamme de produits tels que habillement, meubles, quincaillerie, cosmétique, jouets, appareils électroménagers, livres, denrées alimentaires, journaux même si un type d'article est prédominant et qui n'est pas constitué de la juxtaposition de différents magasins spécialisés ».

    L'entité 52.10.02 de la même annexe précise qu'une étude d'incidences sur l'environnement est requise pour les commerces de détail en magasins non spécialisés dont les locaux de vente et les locaux attenants à ceux-ci et servant de dépôt de marchandises ont une surface totale supérieure à 2 500 m², y compris la surface occupée par les comptoirs et autres meubles. Cette entité est libellée comme suit : « magasin pour la vente au détail dont les locaux de vente et les locaux attenants à ceux-ci et servant de dépôt de marchandises ont une surface totale supérieure à 2 500 m², y compris la surface occupée par les comptoirs et autres meubles ».

    La rubrique 52.10 précise qu'un ensemble commercial qui est constitué d'une juxtaposition de différents magasins spécialisés n'est pas considéré comme commerce non spécialisé. Il n'est toutefois pas précisé, lorsqu'au sein d'une même unité d'exploitation, plusieurs commerces non spécialisés sont envisagés, qu'il n'y aurait pas lieu de comptabiliser la superficie de chaque magasin non spécialisé pour vérifier le seuil de 2 500 m². À cet égard, il peut être lu, à la rubrique 52.10, « commerce de détail en magasins non spécialisés » (nous soulignons), au pluriel. 

    Dans un arrêt du 15 septembre 2021, le Conseil d'État considère néanmoins qu'il résulte du libellé de la rubrique 52.10.02 que « le seuil de 2 500 m² retenu doit être atteint par magasin non spécialisé et non en cumulant la surface de plusieurs commerces » (C.E., n° 251 494, 15 septembre 2021, S.A. Foncière Hornu et S.A. Hornu 2). Cette interprétation semble vider totalement la règle de sa substance. Il paraît par conséquent important qu'il puisse être confirmé qu'il est nécessaire de prendre en compte toutes les surfaces des commerces de détail en magasins non spécialisés constituant une même unité d'exploitation pour déterminer si le seuil de 2 500 m² est atteint et, dès lors, si une étude d'incidences sur l'environnement doit être réalisée.

    A contrario, si la thèse du Conseil d'État devait être suivie, cela signifierait qu'un projet de complexe commercial composé de plusieurs magasins non spécialisés ne requerrait pas obligatoirement la réalisation d'une étude d'incidences sur l'environnement alors que les superficies cumulées de ces magasins non spécialisés atteignent 2 500 m². Si par exemple un projet commercial comptant trois magasins non spécialisés dont la superficie respective de chaque magasin atteint 2 000 m², soit une superficie totale de 6 000 m², est envisagé, aucune étude d'incidences sur l'environnement ne devrait être réalisée sur base de la rubrique 52.10.02 si la thèse du Conseil d'État devait être suivie. Cette interprétation ne paraît pas respecter la volonté du législateur qui vise à faire connaître les incidences d'un tel projet sur l'environnement et à envisager les éventuelles mesures à mettre en place afin de contrebalancer les effets néfastes qu'implique un tel projet.

    Une étude d'incidences sur l'environnement doit-elle donc être effectuée si un projet de développement commercial compte plusieurs commerces de détail en magasins non spécialisés dont la superficie atteint 2 500 m² ?
  • Réponse du 11/01/2022
    • de TELLIER Céline
    Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Conseil d’État n°251.494 du 15 septembre 2021, la situation se présentait comme suit :
    Une demande d’extension d’un ensemble commercial a été introduite, portant notamment sur deux magasins de meubles (Jysk et Foir’Fouille).

    Un permis intégré a été octroyé sans que la demande ait fait l’objet d’une étude d’incidences, celle-ci étant obligatoire pour les magasins non spécialisés d’une surface totale supérieure à 2 500 m², comme le prévoit la rubrique 52.10.02.

    Un recours ayant été introduit devant le Conseil d’État contre ce permis, le Conseil d’État a dû se pencher sur la question de savoir si, à supposer que les deux nouveaux magasins faisant l’objet de la demande d’extension puissent être considérés comme des magasins non spécialisés, l’extension autorisée était ou non visée par la rubrique 52.10.02, sachant que :
    - pris séparément, les deux magasins ont une surface commerciale inférieure à 2 500 m² ;
    - si l’on additionne les deux surfaces, la surface totale est supérieure à 2 500 m².

    Eu égard à la formulation de la rubrique précitée (« Magasin pour la vente au détail dont les locaux de vente et les locaux attenants à ceux-ci et servant de dépôt de marchandises ont une surface totale supérieure à 2 500 m2, y compris la surface occupée par les comptoirs et autres meubles »), le Conseil d’État a conclu de la manière suivante :
    « Il résulte du libellé de cette rubrique que le seuil de 2 500 m² retenu doit être atteint par magasin non spécialisé et non en cumulant la surface de plusieurs commerces. Or, à supposer même que le magasin Jysk puisse être considéré comme un magasin non spécialisé, ni sa surface commerciale ni celle de l’enseigne Foir’Fouille, en ce compris leurs locaux attenants respectifs, n’atteignent individuellement le seuil des 2 500 m². Pour le surplus, il suffit de constater que l’interdépendance entre ces deux magasins n’est pas établie. »

    Toutefois, je partage les préoccupations de l’honorable membre quant aux conséquences que cette interprétation du Conseil d’État peut induire. Je pense également que cette interprétation ne correspond pas à la volonté du législateur et que l’objectif de la disposition doit être de connaître l’ensemble des incidences réelles sur l’environnement lorsqu’un complexe commercial composé de plusieurs surfaces de commerce de détails en magasins non spécialisés voit le jour.

    J’ai donc chargé mon administration d’examiner avec attention l’arrêt du Conseil d’État et de proposer un projet d’arrêté du Gouvernement wallon modifiant l’arrêté du Gouvernement wallon du 4 juillet 2002 susvisé permettant de prendre en compte au mieux l’ensemble des incidences d’un tel projet sur l’environnement tel que voulu par le législateur au regard des objectifs du décret du 11 mars 1999 relatif au permis d’environnement.

    Ce projet d’arrêté du Gouvernement wallon modificatif devrait me parvenir dans les meilleurs délais et j’y donnerai l’attention et la suite appropriées.