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Le soutien aux personnes souffrant d'une forme précoce de la maladie d'Alzheimer et autres maladies apparentées

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 224 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 17/01/2022
    • de KAPOMPOLE Joëlle
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale et de l'Economie sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    J'ai récemment été interpellée par le « Collectif Auguste et les autres », qui représente la voix de personnes jeunes (- 60 ans) atteintes de troubles neurocognitifs majeurs (maladie d'Alzheimer et maladies apparentées). Ce collectif n'est pas une association, mais une formation spontanée de familles et de personnes malades jeunes francophones. À ce jour, en Wallonie, tout comme en Région bruxelloise, rien n'est prévu pour accompagner ces personnes sur base de leur profil spécifique et leur jeune âge. Il s'agit en effet de personnes avec un profil atypique comparativement à des personnes âgées.

    Au moment de l'apparition de la maladie, ces personnes ont moins de 65 ans :
    - sont dans la vie active (salarié ou indépendant);
    - sont parents d'enfants qui peuvent être relativement jeunes (âge scolaire, adulte en devenir, jeunes adultes);
    - sont dans un projet de vie;
    - peuvent avoir la charge d'un emprunt (remboursement de l'achat d'une maison par exemple);
    - ont des parents vieillissants qu'ils prenaient en charge
    - ont peu d'économies disponibles.

    Lorsque la perte d'autonomie devient sévère, dans des circonstances particulières (absence de conjoint, perte du lieu de vie, charge devenue trop lourde pour le proche aidant), certaines de ces personnes doivent être placées en institution, mais le problème est qu'il n'existerait aucun habitat alternatif ou adapté pour pouvoir les accueillir.

    Les personnes jeunes souffrant de démence précoce sont aiguillées vers les solutions d'hébergement et d'accueil pour les seniors. Elles sont alors « invisibles ».

    Existe-t-il, en Wallonie, des données chiffrées pour les personnes atteintes d'une démence précoce ?

    Madame la Ministre pourrait-elle également nous préciser si des discussions sont en cours avec les associations actives en la matière ?

    Que compte-t-elle mettre en place pour, d'une part, améliorer la prévention et la prise en charge des patients jeunes atteints pas la maladie et, d'autre part ?

    D'après le collectif, il n'y a pas de reconnaissance de la démence précoce en Belgique francophone, peut-elle le confirmer ?
  • Réponse du 10/02/2022
    • de MORREALE Christie
    La maladie de type Alzheimer touche à plus de 95 % des personnes de 65 ans et plus. Mais les personnes plus jeunes ne sont pas toujours épargnées. Dans certains cas extrêmes, heureusement peu fréquents, la démence se manifeste même chez des patients n'ayant pas atteint la quarantaine.

    Les neurologues s’accordent à dire que le diagnostic n'est pas forcément simple à poser, car le malade ne correspond pas au profil général du patient souffrant d'une maladie d'Alzheimer « classique ». Dans la grande majorité des cas, les symptômes dépressifs sont manifestes et la personne est principalement prise en charge en fonction de ces symptômes.

    Par ailleurs, l'épidémiologie de la démence précoce montre des chiffres très différents au regard du type de démence. En Belgique, nous ne disposons pas du nombre exact de personnes atteintes par une démence précoce. Cependant, la prévalence de démences neurodégénératives débutant entre 45 et 64 ans est estimée à 119 cas pour 100 000 habitants selon une étude italienne récente (Chiari A., « Epidemiology of early onset dementia and its clinical presentations in the province of Modena, Italy », Alzheimer's & Dementia,‎ juillet 2020) basée sur les patients consultant des centres équivalents aux Cliniques de la Mémoire en Belgique. Au regard de la littérature scientifique, nous savons aussi que 57 % des cas de démence précoce ont été directement attribuables à des dommages cérébraux liés à une consommation excessive d’alcool, suit le tabagisme ou l'hypertension artérielle.

    Parmi les jeunes personnes diagnostiquées, nombreuses sont celles qui exercent des responsabilités familiales, avec le plus souvent des enfants scolarisés ou aux études et des parents âgés et dépendants. Leur maladie neurodégénérative les contraint rapidement à renoncer à leur emploi, engendrant des pertes financières considérables. Raison pour laquelle, depuis 2008, pour répondre à leurs besoins de soins de santé évolutifs, ces personnes peuvent bénéficier du statut de ‘malades chroniques’.

    Cependant, l’honorable membre a raison de souligner le manque de soutien et de reconnaissance de cette frange de la population. Outre le « Collectif Auguste et les autres », la Ligue Alzheimer a aussi mis en place plusieurs groupes de paroles, dont « les Battants » qui permet à des adultes touchés par une démence précoce de partager leurs vécus.

    Deux propositions de loi fédérales, de Els Van Hoof, visant à conclure une convention relative à l’organisation d’un programme de prise en charge de patients souffrant de démence précoce et l’autre, de Catherine Fonck, demandant la mise en place par le Gouvernement fédéral d’un « Plan Alzheimer, démence et maladies apparentées », constituent une réelle opportunité pour la Wallonie qui pourra participer à l’élaboration et à l’exécution de ces objectifs au regard de ses compétences, de ses réalités et de ses besoins. Plus précisément :

    − La proposition de loi n° 1376/1 vise à conclure une convention relative à l’organisation d’un programme de prise en charge de patients souffrant de démence précoce à un stade modéré ou avancé. Il s’agirait de mettre en place un programme de prise en charge globale comparable à celle prévue dans le cadre de la maladie de Huntington où les centres de soins résidentiels et les hôpitaux sont intégralement financés par l’INAMI. Depuis 2019, le Gouvernement flamand a octroyé des moyens supplémentaires, dans le cadre du son plan Alzheimer, à 23 centres de soins résidentiels. Cette proposition de loi vise à harmoniser cette offre à l’ensemble de la population belge. Cette mesure n’aura dès lors aucun impact financier pour la Wallonie et permettra à des personnes souffrant d’une démence précoce et à un stade avancé de la maladie de bénéficier d’un accompagnement adapté lorsque l’encadrement et la coordination à domicile ne sont plus possibles.

    − La proposition de loi n°537/1 demandant la mise en place par le Gouvernement fédéral d’un Plan « Alzheimer, démence et maladies apparentées » propose 3 axes de travail : améliorer la qualité de vie des malades et des aidants, connaître pour agir et se mobiliser pour des enjeux de société. Ce programme est décliné en 36 actions. Il inclut des objectifs d’accompagnement à domicile des personnes présentant une démence précoce. Parmi ces objectifs, citons la mise en place d’activités spécifiques et adaptées visant à renforcer leurs capacités préservées et à retarder l’entrée en maison de repos et maisons de repos et de soins. La détection des symptômes spécifiques de la démence précoce ainsi que la formation des professionnels constituent aussi une priorité.

    Je ne manquerai pas de revenir vers l’honorable membre au cours de cette année en fonction des avancées qui auront été réalisées à cet effet.