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La reconnaissance de la yourte comme habitat permanent et les conséquences en aménagement du territoire

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 262 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 21/01/2022
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Simultanément au fait que l'habitat évolue, l'accès au logement est devenu un des enjeux majeurs de notre époque. Ainsi des citoyens ont recours à des solutions alternatives comme l'habitat léger, type « tiny house » ou yourte.

    Concernant cette dernière, le Conseil d'État a rendu un avis favorable pour un citoyen d'Antoing qui s'est vu reconnaitre comme habitat permanent et donc autorisé à y élire domicile, une yourte, et ce après 5 ans de combat juridique. Cette décision ouvre la voie à d'autres volontaires pour ce type d'habitat, ce qui demandera aussi des adaptations en termes d'aménagement du territoire.

    Mes questions visent à savoir quelles suites vont être données à l'avis du Conseil d'État concernant l'habitat léger.

    Monsieur le Ministre a-t-il été sollicité par des citoyens ou des collectifs défendant ce type d'habitat comme le collectif Halé et quelle suite y est donnée ?

    S'est-il concerté avec son homologue ayant en charge le logement pour la création de ce type d'habitat en Wallonie ?
  • Réponse du 15/02/2022
    • de BORSUS Willy
    Le Conseil d’État, par son arrêt du 13 janvier dernier, a rejeté le recours en annulation de l’arrêté de mon prédécesseur, par lequel il avait octroyé, sur recours, la régularisation d’une yourte en zone d’habitat à caractère rural, destinée à une habitation, sur le territoire de la Commune d’Antoing.

    En résumé, il était alors reproché le fait que l’arrêté ministériel s’écartait d’avis et de décisions émis précédemment ce qui, en soi, ne constitue pas une erreur manifeste d’appréciation. Des éléments complémentaires avaient, en effet, été apportés par le demandeur pour permettre à l’autorité de recours de s’assurer de l’intégration du projet dans son environnement bâti et non bâti.

    Sur la base de ces compléments, il a été démontré que la yourte s’intégrait au cadre urbanistique environnant au sein duquel il s’implante.

    En réponse aux interrogations quant aux suites qui sont réservées à ce nouveau type d’habitat, il convient de rappeler qu’au travers de la DPR, le Gouvernement wallon s’est engagé, entre autres, à soutenir « des solutions innovantes », tel que l’habitat léger (p.50).

    Par ailleurs, dans le rapport des experts de la « task force » environnement de « Get up Wallonia! » figure une action prioritaire intitulée « création d’un outil de massification des opérations de rénovation énergétique des bâtiments » qui se décline en huit projets. Parmi ceux-ci, figure la volonté de « favoriser les nouvelles formes d’habitats modestes et solidaires : tiny house, habitats solidaires/groupés/intergénérationnels, résidences services sociaux, habitats convertibles, etc. dans des zones accessibles aux transports en commun. »

    L’habitation légère, sans être la seule, constitue vraisemblablement une solution à la lutte contre l’artificialisation pour autant que son implantation soit envisagée là où existe une logique de densification, au cœur d’une centralité, à proximité de services et commodités ; qu’en outre, elle réponde aux caractéristiques favorables à la réduction de l’artificialisation en particulier quand il s’agit d’une emprise au sol limitée, déplaçable, démontable et sans fondations.

    Néanmoins, comme je l’ai déjà affirmé précédemment et le répète, il n’entre pas dans mes intentions de réformer le CoDT en vue d’y intégrer des règles spécifiques à ce type d’habitation.

    Dans le cadre d’une demande de permis d’urbanisme, d’une manière générale, la première question à se poser est de savoir si les dispositions de l’article 1er, §1er, du CoDT sont respectés et donc de s’assurer que le projet contribue au développement durable et attractif du territoire ; qu’il s’intègre dans son contexte bâti et non bâti.

    Le plan de secteur, les schémas locaux, les guides d’urbanisme déterminent, selon la nature des outils, les zones qui permettent l’établissement d’habitations légères et les prescriptions urbanistiques auxquelles elles sont soumises, notamment en termes de gabarit, de matériaux, de tonalités, etc.

    Les dispositions d’aménagement et d’urbanisme, selon qu’elles soient indicatives ou normatives, permettent des écarts ou des dérogations pour autant que les décisions soient justifiées au regard des caractéristiques du projet et de son intégration dans son contexte bâti et non bâti.

    En ce qui concerne les habitations légères, sont à encourager les approches coordonnées au travers des permis d’urbanisation, des schémas de développement communaux, voire pluri-communaux ou encore des schémas d’orientation locaux ou des guides d’urbanisme. Ces outils permettent, en effet, aux autorités communales d’avoir une vue d’ensemble quant à l’équipement, à la gestion et à l’intégration de ces constructions à plus grande échelle plutôt qu’au « cas par cas ».

    Pour en finir, outre les dimensions écologiques de durabilité de ce nouveau type d’habitat, il convient tout de même de souligner qu’il ne peut être considéré comme étant la panacée pour pallier le manque de logements, ni même les problèmes liés à la limitation de l’étalement urbain et à la densification de l’habitat vu qu’il s’agit de volumes « 4 façades » et qu’il est complexe de superposer plusieurs « modules »…

    Une interpellation a été initiée par un collectif intitulé « Projet Wwah », projet qui voudrait s’inspirer et combiner deux « concepts », à savoir le BIMBY (Build In My Back Yard) et les STECAL (secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées).

    D’un point de vue urbanistique, le concept du BIMBY est intéressant vu qu’il permet, outre de créer un petit logement pour un parent âgé ou un jeune, de limiter l’étalement urbain et l’artificialisation du territoire en densifiant le tissu déjà bâti.

    Cette démarche pourrait être encouragée et développée dans certains quartiers résidentiels caractérisés par un bâti discontinu et/ou semi-continu peu dense et au cœur desquels une urbanisation plus forte serait acceptable. Idéalement, ces quartiers, pour constituer des endroits propices à la densification, doivent être situés dans des centralités urbaines ou rurales, c’est-à-dire, à proximité des services et équipements et doivent être accessibles aisément en transport en commun depuis le centre-ville. L’objectif serait de densifier en comblant des interstices entre les maisons et d’éviter l’urbanisation en seconde zone.

    Des STECAL, qui relèvent de dispositions légales françaises qui ont été insérées dans la Loi pour l’Accès au Logement et un Urbanisme Rénové, dès lors qu’ils auraient pour objectif de faciliter l’urbanisation des terrains inscrits en zone agricole ou naturelle au plan de secteur, iraient à l’encontre des engagements du Gouvernement wallon repris dans la DPR et des objectifs du SDT, visant la réduction de l’étalement urbain et l’artificialisation du territoire wallon.

    L’installation d’habitations légères dans les zones non destinées à l’urbanisation induira le mitage de ces espaces ouverts. En cas de demandes isolées, les risques de pollutions pourraient être difficilement contrôlables (traitement des eaux usées, groupes électrogènes, impacts visuels, etc.). En outre, l’élaboration d’un schéma d’orientation local ou d’un schéma de développement communal, en vue de développer de l’habitation légère dans ces zones, n’aurait aucun sens, au vu des investissements nécessaires et des impacts induits.