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Le projet du Gouvernement flamand de limiter la durée d'occupation d'un logement social pour tout locataire apte au travail

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 181 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 28/01/2022
    • de de COSTER-BAUCHAU Sybille
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Depuis quelques années la construction de logements sociaux en Flandre avance au ralenti. Au rythme actuel (2 600 logements par an), il faudra en effet des décennies pour satisfaire les 170 000 ménages actuellement sur liste d'attente. Les propositions de remède foisonnent mais se télescopent sans faire l'unanimité. L'an dernier, le Gouvernement flamand avait débloqué, sous forme de prêts à taux réduit, 1,1 milliard d'euros pour les sociétés de logement, mais celles-ci n'en ont finalement utilisé que 600 millions d'euros.

    Le Ministre flamand des Finances et du Budget avait, dès lors, proposé de transférer les 500 millions d'euros inutilisés au secteur privé qui pourrait bénéficier de ces prêts avantageux à condition de construire des logements privés certes, mais loués en dessous du prix du marché afin de réduire quelque peu la liste d'attente. En charge des Affaires intérieures au Gouvernement flamand, le Ministre Bart Somers annonce poursuivre le même objectif et propose de limiter à neuf ans la durée d'occupation d'un logement social pour tout locataire apte au travail. Durant cette période, ces derniers seraient accompagnés et soutenus professionnellement afin de constituer suffisamment d'économies pour pouvoir trouver un logement sur le marché privé.

    Quel regard porte le Gouvernement sur ce projet mené par le nord du pays ?

    Afin de réduire les délais d'attente des candidats locataires, ne serait-il pas porteur de développer un dispositif semblable en Région wallonne ?
    Dans l'affirmative, Monsieur le Ministre compte-t-il prendre contact avec son homologue flamand en ce sens ?

    Bien que des SLSP participent à des dispositifs de réinsertion professionnelle notamment à travers les Régies de quartier, compte-t-il prendre des initiatives afin de favoriser la réinsertion professionnelle au sein de la population de logements publics ?
  • Réponse du 02/03/2022
    • de COLLIGNON Christophe
    Comme l’Honorable Membre, j’ai pris connaissance, par la presse, du souhait de certains membres du Gouvernement flamand de compenser le faible nombre de créations de logements par l’éviction, après neuf ans d’occupation, de tout locataire jugé apte au travail.

    Indépendamment des questions concrètes que peut soulever la mise en pratique d’un tel dispositif, il apparaît qu’une telle mesure ne correspond en rien à la réalité de notre région. Depuis 2007, la Wallonie a déjà fait le choix d’un bail à durée déterminée de neuf ans pour la location des logements sociaux et l’un des critères qui permettent à une SLSP de mettre fin au bail à cette échéance est le dépassement du plafond de revenus à l’admission. Pour justifier qu’il soit mis fin au bail, il est en effet beaucoup plus pertinent de se fonder sur la notion globale du revenu disponible pour s’acquitter d’un loyer au prix du marché, que sur une éventuelle aptitude au travail. Tirer argument de l’origine des revenus (et encore davantage d’une supposée capacité à obtenir des revenus plus élevés) pour mettre fin à un bail pourrait d’ailleurs être considéré comme discriminatoire.

    Telle que décrite, la mesure conduirait, en outre, à priver de leur logement à loyer modéré des ménages ne disposant pas toujours de possibilités réelles d’obtenir un emploi sur le marché local du travail, des salariés dont les perspectives d’emploi restent précaires, des titulaires de contrats de courte durée ou d’intérim, des travailleurs à temps partiel aux revenus très limités, voire des familles nombreuses souvent en peine de trouver un logement adéquat à un prix abordable.

    Priver les locataires de leur logement social dès lors qu’ils trouveraient, voire seraient considérés comme susceptibles de trouver un emploi, me semble donc contre-productif, a fortiori dans le contexte actuel qui s’avère particulièrement insécurisant pour les ménages. On imagine d’ailleurs sans mal les effets pervers de ce type d’annonce, notamment en termes de piège à l’emploi.

    À l’inverse, la Wallonie a développé, en collaboration avec un réseau de partenaires spécialisés, un accompagnement des locataires sociaux en fonction de leurs besoins et demandes, pour renforcer les actions sociales préventives qui favorisent la cohésion sociale et la lutte contre l’exclusion. Il s’agit de développer des politiques transversales qui permettent de faire du logement une clef d’accès à d’autres droits : la santé, la sécurité, l’insertion socioprofessionnelle, la culture…

    Concernant l’accompagnement vers la formation et l’emploi, les besoins détectés au sein des quartiers fragilisés ont amené les sociétés de logement à collaborer avec divers partenaires, dont les régies de quartier, les maisons de l’emploi et les entreprises de formation par le travail, afin de favoriser l’insertion socioprofessionnelle dans une approche transversale. Leurs missions de proximité en matière d’insertion socioprofessionnelle et de redynamisation de quartiers ont un impact très positif sur les habitants des communes où elles sont créées, en fonction des besoins.

    Enfin, l’engagement de référents sociaux au sein de toutes les SLSP, avec le soutien régional depuis 2012, a permis de consolider et de renforcer la diversité des initiatives au bénéfice de tous, en appui des habitants qui restent les principaux acteurs de leur trajectoire de vie.

    La Wallonie entend donc continuer à soutenir ces politiques transversales pour lutter contre le fléau de la précarité avec l’ensemble des acteurs.