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L'augmentation des appels aux centres de prévention du suicide

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 279 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 11/02/2022
    • de SOBRY Rachel
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale et de l'Economie sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    Le nombre d'appels reçus sur la ligne du Centre de prévention du suicide (CPS) a de nouveau augmenté en 2021. Alors que 2020 avait vu une augmentation de 24 % par rapport à 2019, celle de cette dernière année écoulée est d'environ 20 % de plus que la précédente. Au total, en deux ans, l'augmentation est supérieure à 50 %, ce qui est énorme. Il s'agit d'une nouvelle confirmation préoccupante, alors qu'il y a peu certains de mes collègues interrogeaient Madame la Ministre quant à l'augmentation des pensées suicidaires chez les jeunes.

    Bien sûr, le sujet fait partie de nombreuses préoccupations, notamment de la part de son ministère, en attestent les questions qui ont été adressées à Madame la Ministre par le passé. Elle l'a rappelé, le Plan de prévention et de promotion de la santé comporte un axe relatif à la prévention du suicide à savoir la promotion d'une bonne santé mentale du bien-être global.

    Les initiatives en la matière sont nombreuses, et cela est évidemment réjouissant, bien qu'elles peuvent induire un certain flou pour la personne déboussolée qui cherche à entrer en contact avec un type de service précis.

    S'agissant d'une matière à cheval sur les compétences de plusieurs niveaux de pouvoir, j'ai quelques questions à lui adresser.

    Comment analyse-t-elle cette augmentation du nombre d'appels ?

    Une augmentation semblable est-elle observée du côté de l'ASBL « un pass dans l'impasse » ?

    Y a-t-il des concertations entre le Centre de la prévention du suicide, financé par les communautés et « un pass dans l'impasse », soutenus par l'AViQ ?

    La coexistence de ces deux entités est-elle justifiée ?

    Ne s'agit-il pas uniquement d'un reflet de la complexe répartition des compétences de notre pays ?

    Ne serait-il pas plus efficace de les rassembler en un service unique ?
  • Réponse du 31/05/2022
    • de MORREALE Christie
    Tout d’abord, je me permets de rappeler que le Centre de prévention du suicide (CPS) ne relève pas de ma compétence. Il m’est dès lors difficile d’interpréter les chiffres cités dans la question de l’honorable membre. Comme elle le sait, les statistiques dépendent de chaque contexte particulier (les heures d’ouverture de la ligne, le public cible de celle-ci, le personnel affecté pour répondre aux demandes, la méthode d’encodage, et cetera).

    De plus, le Centre bruxellois est agréé et subventionné par la COCOF uniquement pour exercer les missions d’un centre d’accueil téléphonique à savoir l’écoute 24h/7J et la mise en place de formations et de sensibilisations. Cette réalité diffère tout à fait du contexte wallon. Ainsi, les statistiques présentées par les deux services cités ne doivent à mon sens pas être comparées. Et ce pour plusieurs raisons.

    Tout d’abord, les missions principales du Centre bruxellois diffèrent significativement de celles de l’ASBL Un pass dans l’impasse. Les deux axes différentiels majeurs pourraient se résumer aux consultations psychologiques et à la ligne d’écoute gratuite.

    1) Le CPS réalise des consultations psychologiques, mais à moindre échelle en comparaison de l’ASBL Un pass dans l’impasse.

    L’ASBL Un pass dans l’impasse a, quant à elle, pour missions principales la consultation psychologique et la formation des professionnels. Aussi, en termes de consultations psychologiques, le CPS de Bruxelles couvre le territoire bruxellois alors qu’Un pass dans l’impasse couvre le territoire wallon où l’équipe oeuvre à fournir un service de proximité. L’ASBL dispose de 8 antennes de consultation en Wallonie. Le site de consultation principal se situe à Saint-Servais (Namur) et est accessible du lundi au vendredi de 8h30 à 17h. Des consultations ont également lieu à Tournai, Mons, La Louvière, Charleroi, Louvain-la-Neuve, Marche-en-Famenne et Liège. Pour l’année 2021, nous dénombrons 4 808 consultations réalisées au bénéfice de personnes en souffrance.

    2) En outre, Un pass dans l’impasse ne dispose pas d’une ligne d’écoute gratuite 24h/24 et 7j/7.

    Le numéro d’Un pass dans l’impasse est essentiellement destiné à la prise d’un rendez-vous ou de contact avec un(e) psychologue. Évidemment, en fonction de la situation, l’équipe répond à des questions de professionnels par téléphone ainsi qu’à la demande d’aide d’une personne en détresse suicidaire.

    N'oublions pas les 5 centres de Télé-Accueil qui offrent une ligne d’écoute accessible 24h sur 24h et qui relayent vers les professionnels ou les structures nécessaires à une prise en charge.

    Aussi, la ligne téléphonique 0800 de Bruxelles est parfois décriée par les professionnels car elle n’apporte pas nécessairement un suivi post-appel en cas d’absence de réponse de l’opérateur. Ce qui peut engendrer un stress supplémentaire pour l’appelant. C’est pour cette raison qu’Un pass dans l’impasse ne souhaite pas, sur avis de leurs experts, mettre en place une ligne 0800.

    En ce qui concerne une éventuelle augmentation du nombre d’appels semblable à celle observée au sein du CPS de Bruxelles, je peux lui dire que même si les lignes téléphoniques existent pour des raisons différentes, l’ASBL Un pass dans l’impasse a constaté une augmentation des appels en 2020, notamment lors des périodes de reconfinement.

    Quelques chiffres en attestent :
    - 2019 : 10 974 appels, dont 2 316 appelants uniques ;
    - 2020 : 12 746 appels, dont 2 204 appelants uniques ;
    - 2021 : 10 722 appels, dont 2 463 appelants uniques.

    De surcroît, l’équipe a pu constater combien la pandémie de la Covid-19 a eu un effet délétère sur la santé mentale des jeunes comme des moins jeunes. La prise en charge de ces situations s’est traduite par une augmentation substantielle du nombre de consultations et des nouveaux patients rencontrés en 2021. Cette situation a pu engendrer temporairement une saturation de certains sites de consultation.

    C’est pourquoi, afin de maintenir sa capacité de réponse dans un délai rapide, il a été décidé d’élargir les plages horaires des sites de consultation concernés. L’ASBL a donc pu assurer la continuité de l’ensemble des prises en charge et le bon fonctionnement de ses différents sites de consultation.

    En 2021, 429 nouveaux patients (soit un total de 4 177 patients depuis la création du Centre) sont à signaler. Aussi, l’ASBL totalise 4 808 consultations, soit une augmentation de plus de 23 % par rapport à 2020. Au total, 561 patients ont bénéficié d’un suivi psychologique au cours de l’année 2021, soit une augmentation de plus de 22 % par rapport à 2020.

    En termes de concertations, Un pass dans l’impasse a concerté le CPS de Bruxelles et son pendant néerlandophone afin de mettre en place, en 2019, la première campagne nationale commune en prévention du suicide. La crise de Covid-19 les a toutefois empêchés de renouveler l’expérience tel que souhaité.

    Durant cette période de crise et dans le cadre du dispositif de soutien psychologique pour indépendants en détresse, Un pass dans l’impasse a proposé au CPS de Bruxelles de dispenser les formations en prévention du suicide pour les psychologues bruxellois conventionnés. Des collaborations existent donc bien entre les deux structures.

    Il est certain que poursuivre les collaborations et prendre en compte les activités de prévention du suicide au sein de toutes les compétences des Gouvernements est une nécessité. Je le rappelle souvent, mais avant la crise et cette mise en lumière des problématiques de santé mentale et de prévention du suicide, ces difficultés n’étaient pour certains, pas nécessairement une priorité ni de prise en charge ni budgétaire.

    Au niveau de la centralisation des compétences, les services s’attèlent sans cesse à décentraliser leurs activités afin d’être au plus près des citoyens, ce qui, pour une meilleure prise en charge des soins en santé publique au niveau de la population, est d’ailleurs prôné par l’OMS.

    Enfin, n’oublions pas que les approches différentes amènent également l’enrichissement d’un savoir en réseau et une amélioration des pratiques pour les soignants et travailleurs sociaux.