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Les mesures complémentaires wallonnes en vue de faire baisser la facture énergétique du gaz

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 469 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 15/02/2022
    • de GARDIER Charles
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    En date du 1er février dernier, l'Autorité fédérale a édicté certaines mesures en vue de lutter contre l'envol des prix de l'énergie au détriment des citoyens et de leurs portefeuilles. Parmi ces mesures figuraient le tarif social étendu à 1 million de ménages jusque fin juin, un chèque de 100 euros sous forme de réduction directe sur la facture d'électricité, mais également une réduction temporaire de la TVA sur l'électricité, passant de 21 % à 6 % entre le 1er mars et le 1er juillet.

    Si l'ensemble de ces mesures est à saluer tout à fait positivement, elles n'impacteront pas de la même manière tous nos concitoyens. En effet, parmi ces derniers, 47 % se chauffent au gaz, ce qui constitue par ailleurs la première source d'énergie utilisée en Belgique pour le chauffage domestique.

    La presse s'est à cet égard fait l'écho de la potentielle discrimination entre citoyens se chauffant à l'électricité et ceux qui se chauffent au gaz, car la TVA a été baissée sur la première source d'énergie et non sur la deuxième. Tout cela, sans évoquer la fluctuation des prix du gaz en raison de facteurs géopolitiques.

    Des leviers wallons existent cependant afin d'agir complémentairement aux mesures précitées et de manière ciblée au bénéfice des citoyens se chauffant au gaz. En effet, les coûts liés à la gestion du réseau gazier en Wallonie par les gestionnaires de réseaux de distribution (GRD) sont évidemment répercutés sur la facture des ménages, lesquels viennent s'ajouter aux hausses des prix précitées.

    Une concertation avec ces GRD a-t-elle été menée dans ce contexte de hausse des prix de l'énergie ? Dans l'affirmative, qu'en est-il ressorti ?

    Quel levier la Wallonie peut-elle actionner pour réduire les factures de gaz ?
  • Réponse du 12/05/2022
    • de HENRY Philippe
    Depuis le début de la législature, nous avons été confrontés à plusieurs crises, graves, qui ont généré des difficultés pour les ménages dans leur accès à l’énergie. La crise des prix constitue une nouvelle difficulté à laquelle nous devons faire face.

    Cette crise ne concerne pas que la Belgique. Tous les pays européens y sont confrontés. L’augmentation des prix du gaz provient d’une demande particulièrement élevée à la suite de la reprise post-Covid, notamment en Asie, où la demande en gaz naturel a explosé, faisant concurrence à l’Europe. La demande a également été influencée par un hiver 2020-2021 long et particulièrement froid, qui a contraint à puiser dans les stocks sans possibilité de les renflouer par la suite. La hausse du prix du CO2 et du charbon a également eu une incidence sur le recours au gaz pour produire de l’électricité. Cette demande a justement lieu à un moment où l’offre se fait rare, du fait d’une conjonction d’éléments :
    - les niveaux de stockage sont en deçà des normales saisonnières ;
    - l’offre de gaz en provenance de Russie et, dans une moindre mesure, de Norvège, par gazoduc est réduite ;
    - la date de démarrage du gazoduc Nordstream 2 est incertaine ;
    - sans oublier évidemment les tensions géopolitiques avec la Russie.

    Tous ces éléments combinés amènent à une hausse des prix du gaz, mais aussi de l’électricité qui en dépend en partie.

    La Belgique n’est pas dépendante du gaz russe. Elle importe la plus grande partie de son gaz naturel de la Norvège, des Pays-Bas et du Qatar. Seuls 5 % du gaz belge est importé de Russie.

    Cependant, la dépendance européenne au gaz russe a un impact sur l’intégralité du marché et la Belgique est donc vulnérable face aux augmentations des prix sur les marchés internationaux.

    Les ménages sont évidemment affectés par la hausse des prix de l’énergie, mais de manière fortement hétérogène. Pour rappel, l’indexation automatique protège le pouvoir d’achat du “ménage moyen” (avec toutefois un effet retard : les prix augmentent d’abord, et les revenus sont corrigés par la suite). Mais nombre de ménages ne subissent pas le même niveau de compensation, en particulier :
    - ceux dont les revenus ne sont pas (ou pas complètement) indexés ;
    - ceux qui ont des contrats désavantageux (notamment à tarifs variables) ou qui perdent un tarif avantageux (échéance du contrat à tarif fixe, perte du droit d’accès au tarif social, faillite du fournisseur d’énergie) ;
    - ceux qui se chauffent au gaz et/ou à l’électricité (le prix du gasoil et des pellets, notamment, ayant augmenté moins fortement jusqu’ici) ;
    - ceux qui habitent des logements à faibles performances énergétiques (grands et/ou mal isolés et/ou sans énergies renouvelables installées) ;
    - ceux pour qui les dépenses énergétiques représentent une plus large part de leurs revenus (c’est plus souvent le cas des ménages précaires qui risquent de voir leur situation s’aggraver).

    Par ailleurs, un certain nombre de ménages pourraient se retrouver fragilisés au moment de leur facture de régularisation (surtout si leurs acomptes n’ont pas été suffisamment adaptés), ce qui pourrait générer un « bill shock » en 2022.

    Sur base de récent rapport circonstancié de la CWaPE sur l’évolution des prix de l’électricité et du gaz pour les différents segments de consommation, il est estimé sur base de différentes hypothèses qu’un ménage sous tarif variable pourrait connaitre une augmentation de son tarif de 135 % (par rapport à 2019) à 150 % (par rapport en 2020) en électricité. L’évolution en gaz serait quant à elle de +175 % (par rapport à 2019) et +200 % (par rapport en 2020) en gaz.

    Comme je l’ai déjà rappelé à de nombreuses reprises, la compétence d’aide sociale aux ménages en matière d’énergie est principalement une compétence fédérale.

    Les dispositifs régionaux s’inscrivent dans la complémentarité : statut de client protégé conjoncturel, soutien via les CPAS, aides Mebar, et cetera. Par ailleurs, d’ici la fin de l’année, le décret « juge de paix » entrera en vigueur, et plus aucun ménage en situation de défaut de paiement ne pourra être coupé de manière administrative.

    À propos des contributions de type surcharges ou redevances de voiries, plusieurs éléments doivent être pris en compte. Les redevances de voirie ont été décidées par le Parlement wallon pour soutenir financièrement les communes (électricité et gaz) ainsi que, pour le gaz, les provinces et la Région. Cependant, l'impact est faible sur le coût de l'énergie (de l’ordre de 1 %).

    En ce qui concerne la surcharge, celle-ci ne concerne que le vecteur « électricité » et n’offre dès lors pas de piste d’action concrète pour le gaz.

    En ce qui concerne les tarifs des GRD, ceux-ci n’ont pas augmenté et ne sont donc en rien responsables de la hausse des prix de l’électricité et de gaz. Pour que les investissements nécessaires à une transition énergétique au moindre coût puissent se faire sans impacter les tarifs de la distribution, le GW a mobilisé dans le cadre du plan de relance des moyens à hauteur de 195 M d’euros d’ici 2024. Il s’agit de subventions allouées aux différents GRD pour moderniser leur réseau, les rendre « intelligents » (notion de smart grid) pour répondre aux nouvelles contraintes liées à l’augmentation des énergies d’origine renouvelable, l’introduction de nouveaux usages plus efficients en électricité et autres contraintes liées à la transition. Cette modernisation pourra donc se faire sans impacter le portefeuille du citoyen et lui garantira à l’avenir un approvisionnement plus sûr, plus durable et moins sujet aux tensions internationales.

    Enfin, comme cela a déjà été dit, en complément des mesures d’urgence déjà adoptées par le fédéral et en cours d’analyse au niveau régional, il est absolument essentiel de pouvoir soutenir les ménages dans leurs démarches de rénovation de leur logement. La seule manière de soutenir les ménages pour faire face dans la durée à l’augmentation des prix de l’énergie, c’est réduire leur facture de manière structurelle. L’isolation de la toiture, le remplacement des châssis, de la chaudière sont autant de moyens de réduire fortement la consommation du logement.

    Nous savons que de nombreux ménages font face à des difficultés pour enclencher ces travaux. Soit qu’ils ne disposent pas des moyens nécessaires pour les préfinancer, soit qu’ils n’ont pas accès au crédit, soit qu’ils ne disposent pas des biens sur le logement, car ils sont locataires. Lever ces difficultés figure dans mes priorités de travail pour l’année 2022.