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Les difficultés des parents solos en matière de logement

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 258 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 07/03/2022
    • de BEUGNIES John
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    La Ligue des familles a très récemment réalisé une enquête en ligne auprès de parents solos - à savoir des parents qui vivent seuls avec leurs enfants. On y apprend que 82 % de ces parents solos sont des mamans.

    On apprend aussi que dans les situations de parents solos causées par des séparations (ce qui constitue la grande majorité des cas), les parents solos passent par un hébergement temporaire avant de retrouver un logement propre. 2 % d'entre eux se retrouvent temporairement sans-abri, 3 % logent dans un squat et 5 % doivent recourir à des solutions coûteuses comme une chambre d'hôtel ou un AirBnB. Enfin, la majorité loge temporairement chez un proche.

    La Ligue des familles note justement qu’« on remarque que le genre du parent influence la solution d'hébergement temporaire ». Les hommes sont par exemple bien plus nombreux à avoir recours à la colocation, tandis que les femmes sont plus nombreuses à se loger chez un proche. La rapidité à laquelle on retrouve une situation stable est manifestement déterminée par le genre ; lui-même conditionné par les inégalités de revenus. Par exemple, si 45 % des locataires parents solos ont eu des difficultés pour constituer leur garantie locative, il s'agit en fait de 49 % de mères contre 27 % de pères.

    Une fois de plus les chiffres démontrent la facilité avec laquelle on peut se retrouver dans une situation précaire, et à quel point c'est d'autant plus vrai pour les femmes. Les logements manquent.

    Comment le Gouvernement compte-t-il s'y prendre pour lutter contre la réalité des inégalités de genre dans l'accès au logement démontré par cette étude de la Ligue des familles ?

    En plus de la création de nouveaux logements, pourquoi ne pas apporter des changements dans l'ordre de priorité d'accès aux logements sociaux par exemple ?
  • Réponse du 13/04/2022
    • de COLLIGNON Christophe
    Ce constat de la Ligue des familles est une confirmation : la précarité des familles monoparentales, conjuguée aux inégalités de genre, est une réalité. Elle est d’ailleurs étayée par plusieurs études récentes sur le logement wallon, telles l’Enquête sur la qualité de l’habitat (2012-2013), l’Étude sur le logement des familles nombreuses (2017) et l’Observatoire des loyers (2020) du CEHD.

    Ainsi, 76,4 % des familles nombreuses (trois enfants ou plus) conduites par une femme sont locataires, contre 55,1 % celles emmenées par un homme. De même, le taux d’effort (ce taux d’effort correspond aux coûts du logement (loyer/crédit), les charges (charges locatives/charges de propriété), la facture énergétique et la facture d’eau rapportées au revenu total net du ménage) lié au logement des mères de familles nombreuses monoparentales est de 44,4 %, ce qui est supérieur de trois points de pourcentage au taux d’effort des pères de familles nombreuses monoparentales, et beaucoup plus élevé que celui de tous les autres types de familles. Par ailleurs, en 2020, 21,4 % des ménages monoparentaux avec une mère seule locataires dans le secteur privé étaient demandeurs d’un logement social, contre 13,3 % si le ménage est dirigé par un homme.

    Concernant l’intérêt d’un changement de l’ordre de priorité d’accès au logement public pour répondre à cette réalité, je rappelle que la composition des ménages n’est pas prise en compte par les règles d’attribution. Les seuls éléments qui donnent droit à des points de priorité sont relatifs aux difficultés de logement des candidats (ménages sans domicile ou contraints de quitter un logement insalubre ou surpeuplé, ménages victimes d’événements calamiteux…) ou à des difficultés personnelles (victimes de violences intrafamiliales, revenus modestes, ménages dont un membre est handicapé…). La logique du système est que la priorité d’accès au logement public dépend des difficultés effectives rencontrées par les ménages et non de leur composition.

    Une étude du CEHD sur le système d’attribution du logement public met en évidence que certains types de ménages accèdent plus facilement que d’autres au logement public. Ainsi, les familles avec enfants (qu’il s’agisse de couples ou de « parents solos ») sont surreprésentées dans les attributions, par rapport à leur part des candidatures. Plus précisément, sur la période étudiée (2015-2019), les mères avec enfants sont le type de ménage qui s’est vu attribuer le plus de logements (29,4 % des attributions en 2019). À titre de comparaison, le deuxième type de ménage le plus représenté au sein des attributions sont les couples avec enfants (21,7 %). Le troisième type le plus représenté concerne les hommes isolés, avec 16,9 % des attributions. Il apparaît donc que le logement public est largement ouvert aux mères isolées. Les pères avec enfants ne représentent que 9,5 % des attributions, ce qui s’explique aussi par leur faible présence au sein des candidatures (4,5 %).

    L’étude du CEHD montre, en outre, que les familles monoparentales obtiennent plus rapidement un logement public que les autres types de ménage. Ces ménages sont donc ceux qui obtiennent le plus rapidement un logement public. Il semble dès lors que la création d’une priorité particulière pour favoriser ces ménages serait de peu d’utilité.

    Enfin, je signale que la dernière édition des chiffres clefs du logement public, réalisée en 2017 par le CEHD, indiquait que 22 % des locataires de ce secteur étaient des femmes avec enfants. Il s’agissait du deuxième groupe le mieux représenté au sein des locataires, derrière les femmes isolées sans enfants (27 %).