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Les maisons d’hébergement des 18-25 ans

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 338 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 09/03/2022
    • de SCHYNS Marie-Martine
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale et de l'Economie sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    Dans le cadre de nos travaux parlementaires en Fédération Wallonie-Bruxelles, j'ai interrogé l'homologue de Madame la Ministre, le Ministre de l'Égalité des chances, Monsieur Daerden, sur le projet des maisons d'hébergement des 18-25 ans. L'objectif consiste à créer un réseau de maisons d'hébergement en vue de viser l'autonomie des jeunes et de combattre ainsi le sans-abrisme.

    Ce projet s'inscrit dans le plan 0-25 ans initié en 2022 par le Gouvernement de la FWB ainsi que dans le Plan quinquennal pour la lutte contre la pauvreté, la pauvreté infantile et pour la réduction des inégalités sociales. En effet, ce dernier prévoit en son axe 2 « de prévenir les situations de vulnérabilité tout au long du parcours de vie des publics dans les compétences de la Fédération Wallonie-Bruxelles ». Cet axe se décline notamment par un renfort des actions spécifiques de prise en charge des publics vulnérables et l'amélioration de leur accompagnement lors des moments de transition.

    Une riche étude a été réalisée par l'ASBL « Réalisation Téléformation Animation » (ASBL RTA) ainsi que le Réseau de lutte contre la pauvreté intitulée « Logement et autonomie des jeunes dans le secteur de l'Aide à la jeunesse ». L'étude met singulièrement en exergue la réussite des interventions publiques qui réfléchissent et agissent en pensant à partir de la « chaîne d'institutions » dont ils font partie. Ce type de projet nécessite par conséquent une nécessaire intersectorialité entre les services de l'Aide à la jeunesse et l'aide sociale apportée par les CPAS.

    Par ailleurs, des projets de logement pour les jeunes en errance sont déjà portés par des services d'aide en milieu ouvert (AMO), des CPAS, des ASBL de logement et des agences immobilières sociales (AIS). Ils sont en cours de réalisation, par exemple à Seraing et à Visé.

    Madame la Ministre au vu des compétences qui sont les siennes, dans le champ de l'aide sociale et de l'égalité des chances, il nous semble essentiel qu'elle soit partie prenante à ce projet…

    Qu'en est-il de sa connaissance de ce nouveau projet qui ne figure ni dans la DPC ni dans la DPR ?

    Quelle part active, souhaite-t-elle prendre ainsi que le Gouvernement wallon au niveau de la Région wallonne ?

    Cette problématique est complexe et demande une concertation et une transversalité accrues avec l'aide sociale via les CPAS et le secteur de l'Aide à la jeunesse et de l'égalité des chances, qu'en est-il de ces concertations avec son homologue à la Fédération et ses différents services ?

    Des moyens seront-ils dégagés à cette fin ?
  • Réponse du 03/05/2022
    • de MORREALE Christie
    Des concertations entre les acteurs des secteurs de l’Aide à la jeunesse et de l’action sociale sont fort heureusement effectives et permettent de garantir une continuité dans le travail de suivi et d’accompagnement des jeunes en situation d’errance. Une dynamique intersectorielle est un des facteurs de réussite.

    À la demande de la « COCOREL » - association regroupant les Relais sociaux - un groupe de travail inter-relais s’est d’ailleurs constitué en 2019 pour investir la thématique relative aux « jeunes en errance » et dresser un état des lieux. Il en ressort que la plupart des Relais sociaux ont initié des groupes de travail portant sur cette thématique ou y participent activement.

    À titre d’exemple, en 2018, des tables rondes ont été organisées à Charleroi entre 25 structures issues des secteurs de l’Aide à la jeunesse et de la grande précarité pour réaliser un état des lieux complet, au travers de cinq thématiques : le logement, la mise en autonomie, la prévention, la santé et l’emploi. Un cahier de recommandations qui met en évidence la nécessité de décloisonner ces secteurs pour pouvoir envisager des politiques cohérentes dans la prise en charge des publics « jeunes en errance » a aussi été élaboré.

    Plusieurs projets existent à Charleroi autour du Relais social.

    Les « 3 Solid’R » (Solidarités Nouvelles) visent, à travers un logement collectif, à recréer du lien avec des jeunes en errance. L’objectif du projet est la mise à l’abri de ce public fragilisé, afin de pouvoir trouver des solutions durables de logement et plus globalement de soutenir un processus de réinsertion au sein de la société (emploi, formation, et cetera).

    Les « Kots Tremplins » (Relogeas & la Mado) sont des kots à vocation sociale pour les jeunes de 18 à 25 ans ayant pour finalité de lutter contre l’exclusion sociale et d’être un levier pour le passage vers l’âge adulte et une vie autonome. Avec un hébergement de 12 mois maximum, ils représentent une passerelle vers un logement plus stable et durable.

    Le « Housing First Jeunes » permet de développer des partenariats propres au milieu de la jeunesse. Le public-cible sont les jeunes de 18 à 30 ans (pour éviter une rupture supplémentaire dans l’accompagnement) avec des problématiques multiples d’assuétudes et/ou de santé mentale qui nécessitent un accompagnement intensif et multidisciplinaire.

    Le « Working First » est un projet de soutien à l’emploi qui s’adresse à des personnes en situation de grande précarité, avec un parcours de sans-abrisme et souffrant de problématique(s) de santé mentale et/ou d’assuétude. L’objectif visé par ce projet n’est pas prioritairement l’emploi (ou la formation), mais bien le rétablissement et le bien-être de la personne accompagnée.

    Pour La Louvière, le projet « Younited Belgium » a été relancé en octobre 2021 et bien que ce dernier ne soit pas uniquement destiné au 18-25, le public est composé à plus de 95% de cette tranche d’âge. Cette initiative permet la réinsertion des usagers par le sport et, plus précisément, le football. Le Relais social urbain de La Louvière coordonne l’ensemble du projet et avec la participation du RFC Houdinois, ils proposent un entrainement par semaine à toute personne désireuse de rejoindre le projet. Ce dernier est ouvert aux hommes et aux femmes sans restriction : personnes en situation de précarité, personnes réfugiées, personnes sans-abri, et cetera.

    Pour Namur, plusieurs projets ont été mis en place.

    Le Projet partenarial entre le Services « Droits des Jeunes » et le Relais social pour le (re-)logement des jeunes à Namur, en cours de construction, a pour missions de faciliter l’accès à un logement décent et accessible pour le public jeune (de 16 à 22 ans) en difficultés sociales et familiales et de contribuer à prévenir et lutter contre le phénomène du sans-abrisme chez les jeunes.

    Depuis novembre 2020, le projet « FISSA » - acronyme de « First In Street Support Assistant » - est un projet pilote d’accompagnement pour les personnes primo-arrivantes en rue (à comprendre comme une première arrivée en rue et dès lors à distinguer du public étranger primo-arrivant). Il s’inscrit dans la lutte contre le sans-abrisme et celle de l’exclusion au logement, en endiguant le flux des nouvelles arrivées en rue. Le public-cible du projet se porte principalement sur le public jeune en errance, étant donné la hausse de jeunes primo-arrivants en rue, mais aussi de la difficulté « d’accrocher » ce public.

    En outre, le premier dénombrement du sans-abrisme et de l’absence de chez soi s’est déroulé le 29 octobre 2021 à Namur, à l’Initiative de la Fondation Roi Baudouin, l’UCLouvain et la KULeuven. Il a été organisé, sur le terrain, par le Relais social urbain namurois, en collaboration avec le CPAS et la Ville de Namur. Parmi les 42 institutions participantes, plusieurs d’entre elles sont issues du secteur de l’Aide à la jeunesse. Ce projet témoigne de la collaboration du secteur social et de l’Aide à la jeunesse, afin de mettre en lumière le phénomène du sans-abrisme et de l’absence de logement chez les jeunes à Namur.

    Par ailleurs, le Projet Perce-Pierres, subsidié par le Relais social depuis 2021, s’adresse à toute personne de plus de 18 ans ayant été placée par le SAJ ou le SPJ
    Les finalités du projet sont :
    a) améliorer la qualité de vie de toute personne de plus de 18 ans ayant été placée par le SAJ ou le SPJ ;
    b) promouvoir l’entraide et la paire-aidance chez les jeunes ;
    c) renforcer les compétences de vie permettant de lutter contre la précarisation d’une partie de ces jeunes.

    Les objectifs généraux poursuivis par la mise en place de groupes de paroles à destination des jeunes - pour certains en situation d’errance - sont de briser le sentiment de marginalité et d’abandon et d’améliorer leurs compétences de vie.
    À travers son mémorandum « Fin du sans-abrisme à Namur : oui, c’est possible ! », le Relais namurois et ses partenaires plaident pour le renforcement des connexions entre les institutions dont celles issues du secteur de l’aide à la jeunesse et les institutions du secteur social spécialisées dans l’aide et le soutien aux personnes sans-abri, afin d’endiguer les nouvelles arrivées en rue, notamment du public jeune.

    Un groupe de travail « jeunes en errance » a aussi été mis en place à Tournai en 2015 à la suite de plusieurs constats venant du réseau :
    - beaucoup d’usagers entre 18 et 25 ans arrivent dans les structures d’accueil de jour et de nuit ;
    - beaucoup d’entre eux présentent des comportements difficiles à gérer dans ces structures ;
    - la transition des jeunes vers l’âge adulte est très complexe ;
    - le secteur de l’aide à la jeunesse se confronte à un nouveau public en difficulté : les 18 –21 ans ;
    - les intervenants éprouvent des difficultés à accrocher avec ce public et s’essoufflent rapidement.

    Ce groupe de travail, composé d’intervenants des secteurs de l’Aide à la jeunesse et de l’action sociale, a ainsi abordé des vignettes cliniques sur le thème des parents en errance ou encore des contacts avec leurs enfants. Quelques projets ont également vu le jour :
    - des rencontres intersectorielles sous forme de « portes ouvertes » ont été organisées à deux reprises, afin de faciliter les collaborations entre les intervenants de ces deux secteurs ;
    - des capsules vidéo ainsi que deux débats ont été tournés au sein de la télévision locale tournaisienne sur les thématiques des jeunes en errance et du maintien du lien enfant-parent à travers l’errance ;
    - deux colloques ont été organisés : le premier sur la problématique des parents souffrant d’assuétudes et le second sur les liens familiaux à l’épreuve de l’errance ;
    - sept séances sont actuellement animées par le Professeur Longneaux, Docteur en philosophie, sur le thème : « Les liens parentaux à l’épreuve et son dilemme éthique ».

    En outre, une maison d’accueil à Tournai accueille spécifiquement le public de 18 à 25 ans.

    À Verviers, en vue d’améliorer la prise en charge de ce public fragilisé, une recherche exploratoire a été menée par le Relais social et ses partenaires. Celle-ci avait pour objectif de récolter la parole de ces jeunes sur les difficultés rencontrées lors de leur passage à la majorité et leur prise d’autonomie. Sur la base des conclusions de cette recherche, deux pistes d’actions ont été retenues. Celles-ci ont donné lieu à des projets partenariaux.
    À titre exemplatif, le projet « Rendez-vous en terres inconnues/terrains connus » est un projet partenarial entre le Relais, le Résme, Réalism, le C.V.P.S, la Fédération Wallonie-Bruxelles et le Rassaef, qui a pour objectif de favoriser les synergies entre les professionnels du secteur de la jeunesse et du secteur adulte. L’ensemble des partenaires ont créé des matinées d’échanges et des conférences entre ces deux secteurs permettant le partage d’outils, de connaissances et de compétences, afin de renforcer la collaboration.
    Pour le Dispositif 17-25 ans, un ensemble de partenaires ont élaboré un modèle de prise en charge spécifique pour les jeunes en errance présentant des difficultés multiples (assuétude, troubles de santé mentale, isolement social et familial…) sur le territoire verviétois. En effet, sur la base des constats effectués par les différents intervenants du secteur de l’Aide à la jeunesse et de l’action sociale sur la problématique des jeunes en errance, les différents partenaires ont souhaité collaborer en vue d’assurer une prise en charge efficace et de qualité de ce public.

    Dans ce modèle, lorsqu’un travailleur social rencontre un jeune en difficulté et que la prise en charge dépasse les missions de son service, il peut faire appel à un « groupe ressources » via l’intermédiaire d’un « coordinateur ». Ce groupe ressources, constitué de professionnels de différents services (secteur jeunesse et secteur adulte), propose des pistes d’action. L’innovation principale est la possibilité de désigner un intervenant de transition qui accompagne le jeune dans son processus d’autonomisation.

    Depuis 2020, le Projet « Primo-SDF » a pour objectif d’intervenir immédiatement auprès des personnes privées d’un toit « depuis peu de temps », en les relogeant et en leur fournissant un accompagnement spécifique, notamment, un suivi intensif, afin d’éviter que les situations s’aggravent et que leurs situations ne se chronicisent. À Verviers, ce projet innovant s’articule avec le projet « Interface » (lancé par le Relais et ses partenaires en matière de logement et d’hébergement, actif depuis 2013 et qui vise le maintien et l’accompagnement dans le logement des personnes en situation de grande précarité). Le projet accorde une importance au public jeune en errance au vu des difficultés qu’il éprouve en termes de logement et de relogement.

    Ainsi, par le développement des projets visant l’autonomie des jeunes et leur accompagnement pour une sortie d’institution d’aide à la jeunesse réussie, par la mise en place de concertation entre acteurs des deux secteurs, par le soutien à des projets innovants ou par toute autre alternative permettant de proposer une offre de logement dédiée, assortie d’un accompagnement personnalisé, les actions portées par les deux secteurs constituent une réponse adaptée aux enjeux que constitue le phénomène toujours d’actualité de l’errance chez les jeunes.

    Enfin, l’exposé succinct de ces projets démontre que la concertation intersectorielle s’opère et qu’elle est primordiale. Comme l’honorable membre, j’encourage tous les acteurs à poursuivre en ce sens et à renforcer la collaboration, de façon à optimaliser l’accompagnement des jeunes et notamment la phase de transition. L’Observatoire wallon de lutte du sans-abrisme qui verra le jour dans les prochaines semaines a également vocation à réunir toutes les parties prenantes, dont l’Aide à la jeunesse.