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La gestion des frais et des contrats énergétiques au sein d’une communauté énergétique

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 606 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 29/03/2022
    • de DOUETTE Manu
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    La directive européenne relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables stipule que les Etats membres garantissent que les autoconsommateurs d'énergies renouvelables, à titre individuel ou par l'intermédiaire d'agrégateurs, sont autorisés à produire de l'énergie renouvelable, y compris pour leur propre consommation, stocker et vendre leur production excédentaire d'électricité renouvelable, y compris par des contrats d'achat d'électricité renouvelable, via des fournisseurs d'électricité et des arrangements portant sur des échanges de pair à pair.

    Monsieur le Ministre peut-il confirmer l'hypothèse d'un autoconsommateur d'énergies renouvelables qui pourrait exclusivement consommer de l'énergie au sein ou via la communauté énergétique ?

    Comment le GRD du réseau où se situe la communauté va-t-il obtenir le paiement des frais de réseau qui lui sont dus ?

    Les GRD seront-ils contraints de travailler avec chaque communauté ou son gestionnaire si pareille situation venait à apparaître ?

    Quelle est la position des GRD wallons sur ce point ?

    Cette charge de travail supplémentaire est-elle prise en compte dans l'estimation des frais de réseau ?

    L'autre point de la directive mentionne que les ménages et les communautés qui se livrent à l'autoconsommation d'énergies renouvelables devraient conserver leurs droits en tant que consommateurs, y compris le droit de conclure un contrat avec un fournisseur de leur choix et de changer de fournisseur.

    Dès l'instant où les membres d'une communauté énergétique sont libres d'intégrer et de quitter la communauté à tout moment, le point de la directive empêche-t-il à une communauté énergétique d'imposer à ses futurs membres la participation à un achat groupé d'énergie ?

    Empêche-t-il à une communauté énergétique d'imposer un fournisseur d'électricité à ses futurs membres ou encore d'imposer la consommation exclusive de l'énergie de la communauté ?
  • Réponse du 21/04/2022
    • de HENRY Philippe
    L’honorable membre m’interroge, tout d’abord, sur le cas d’un client actif qui consommerait exclusivement de l’énergie au sein ou via la communauté d’énergie, et ce sans être fourni en électricité via un fournisseur commercial.

    Je me permets de lui rappeler que le partage d’énergie ne peut avoir lieu que via le réseau public. Dès lors, la réglementation prévoit l’obligation pour chaque utilisateur du réseau de disposer d’un contrat de fourniture avec un fournisseur classique. Ce fournisseur fournira de l’énergie au client actif « autoproducteur » en cas de défaut de son autoproduction, et assurera également la charge de responsable d’équilibre ainsi que de facturation des frais de réseaux, tant pour l’électricité qu’il fournit que pour l’électricité partagée transitant par le réseau ainsi que les différentes taxes et surcharges applicables. Notons néanmoins si la communauté d’énergie détient une licence de fourniture, elle pourrait être le fournisseur commercial de certains de ses membres pour l’électricité consommée « hors partage d’énergie ».

    Le cas de figure d’un client actif qui consommerait exclusivement de l’énergie au sein ou via la communauté d’énergie, et ce sans être fourni en électricité via un fournisseur commercial est par ailleurs théorique. En pratique, cela ne sera pratiquement jamais le cas en termes d’autosuffisance énergétique. En effet, cela signifierait qu’en tout temps, à chaque période de règlement des déséquilibres, soit chaque quart d’heure de l’année, son autoproduction éventuelle couplée à l’énergie qui lui est attribuée au sein de l’opération de partage de la communauté d’énergie, permettrait de couvrir l’ensemble de sa consommation. Dans les faits, cette situation est relativement hypothétique étant donné que les énergies renouvelables sont par nature intermittentes, qu’il y a toujours des pics de consommation difficiles à couvrir, que des périodes de maintenance des outils sont à prévoir et que des pannes peuvent survenir.

    L’électricité partagée transitant sur le réseau public, les gestionnaires de réseaux seront toujours contraints de travailler avec les communautés, et ce, simplement du fait qu’il est dans leur mission d’entretenir, de développer et de garantir la sécurité du réseau. Il leur revient également dans le cadre de leur mission de comptage de déterminer les volumes d’électricité partagée consommés par chacun des participants sur base de la production totale, de la consommation de chacun et de la clé de répartition applicable fixée dans la convention.

    En ce qui concerne les coûts des frais de réseau, il revient à la CWaPE, dans le cadre de sa compétence exclusive d’établir la méthodologie tarifaire et d’approuver les coûts des gestionnaires de réseaux de distribution. Le projet de décret de transposition modifie, à cet égard, le décret tarifaire en insérant une nouvelle ligne directrice permettant à la CWaPE de prévoir, si elle le juge indiqué, une rémunération pour le gestionnaire de réseau de distribution liée à l’activité de comptage spécifique dans le cadre d’une activité de partage d’énergie. Le décret en projet prévoit que des frais de réseaux, taxes, surcharges et autres frais régulés sont applicables à l’énergie partagée et sont facturés par le détenteur d’accès. Dans les avis rendus, les GRD ont montré leur satisfaction que le décret assure le financement solidaire du réseau.

    L’honorable membre m’interroge, ensuite, sur la possibilité pour une communauté d’énergie de conditionner la participation de ses futurs membres à un achat groupé ou de faire appel à un fournisseur spécifique.

    Tant le projet de décret que la directive 2019/944/UE confirment le droit de tout client actif de participer à une activité de partage d’énergie sans être soumis à des exigences ou traitements discriminatoires et tout en conservant ses droits et obligations de client final, donc y compris son droit à l’éligibilité impliquant le droit de choisir et de changer librement de fournisseur.

    Le décret ne peut donc pas conditionner la participation à une activité de partage d’énergie à la conclusion d’un contrat avec un fournisseur résiduaire unique, car cette condition serait contraire à la directive.

    Toutefois, cette désignation pourrait intervenir sur base volontaire des participants, comme le prévoit l’article 34 du projet de décret adopté en 3e lecture qui modifie l’article 31 du décret « électricité ».

    Cet article stipule que « les participants à une communauté d’énergie peuvent mandater la communauté à exercer, en leur nom et pour leur compte, leur éligibilité pour la partie d’électricité consommée qui ne leur a pas été allouée suite au partage d’énergie au sein de la communauté ».

    En effet, la désignation d’un fournisseur commun pourrait peut-être procurer un avantage commercial étant donné qu’il aurait sans doute une facilité de gestion de son portefeuille notamment en termes d’équilibrage. Dans tous les cas, il ne s’agirait cependant pas d’un interlocuteur unique de la communauté d’énergie, mais bien du fournisseur de chaque participant avec qui il devra conclure un contrat de fourniture individuel ; il ne s’agit donc pas d’une simplification du modèle en tant que tel.

    Par ailleurs, les conditions de participation et de retrait devant être fixées dans les statuts, rien ne semble empêcher qu’une communauté conditionne l’entrée de ses membres à certaines conditions. Cependant, ces critères ne peuvent pas être discriminatoires.