/

Le développement du commerce en ligne

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 539 (2021-2022) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 31/03/2022
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Les opposants au commerce en ligne et à une forme de numérisation de l'économie soutiennent régulièrement que ce type d'activité économique aurait pour conséquence directe la destruction de l'emploi, notamment dans les commerces de détail !

    Monsieur le Ministre dispose-t-il d'études, de statistiques et d'informations qui permettent d'objectiver le débat et qui autorisent une comparaison entre les éventuelles pertes et créations d'emplois ?

    Quels sont les documents sur lesquels il se base et quelle lecture en fait-il ? 

    Des mesures spécifiques devraient-elles être prises pour limiter les pertes d'emplois et en maximaliser la création ? Lesquelles ? 

    Quel est le positionnement de la Wallonie dans l'e-commerce sur le plan belge et le plan européen ?
  • Réponse du 25/04/2022
    • de BORSUS Willy
    Déterminer exactement le nombre d’emplois lié à l’e-commerce est un exercice délicat. Sur la base du dernier Baromètre Entreprises de l’AdN (2020) et de l’enquête post Covid qui s’en est suivie à la fin du premier confinement (mars 2021), il apparaît que 22 % des entreprises régionales vendent en ligne sans que cela soit nécessairement visible dans leurs codes NACE. Il est également difficile de déterminer le poids économique de cet e-commerce dans les activités des entreprises qui le pratiquent.

    Sur la base des derniers décomptes BCE effectués par le cabinet conseil en e-commerce Retis au 31 décembre 2021, il y avait 7 831 assujettis belges actifs en commerce de détail en ligne (pure players B2C). Parmi eux, 7 436 étaient des indépendants seuls à titre principal ou complémentaire. Plus de 90 % de ces e-commerçants employaient moins de 5 travailleurs.

    La répartition entre les Régions était la suivante :
    - Wallonie 1 876/7 831(+431 par rapport à 2019) ;
    - Bruxelles : 664/7 831(+174 par rapport à 2019) ;
    - Flandre : 5 291/7 831 (+1819 par rapport à 2019).

    Selon ces chiffres, le commerce électronique est en progression au sein des trois régions et la Wallonie concentre 4,2 % du commerce en ligne pur player B2C belge. Par ailleurs, la grande majorité de ces entreprises sont unipersonnelles, et ce dans tout le pays.

    Si l’on se base maintenant sur le nombre d’e-shops, le nombre d’acteurs belges actifs en e-commerce grimpe à 29 000 unités. Cependant, moins de 1.000 boutiques en ligne belges réalisent à elles seules un total de 87 % des ventes. (Source : Baromètre 2020 de l’e-commerce publié par The House of Marketing et SafeShops)

    Pour l’e-commerce en B2B, selon le dernier Baromètre de la Société de l’information de Statbel, en 2020, 31,4 % du chiffre d’affaires des entreprises établies en Belgique provenait du commerce électronique, que ce soit via le site web de l’entreprise ou via l’échange de données informatisées (EDI). Cela représente une baisse de 1,2 point de pourcentage par rapport à 2019. Par ailleurs, 56 % du chiffre d’affaires total des entreprises réalisé via le commerce électronique étaient générés par les transactions de type EDI et 44 % provenaient des ventes via un site web classique.

    Concernant les effets sur l’emploi, dresser un bilan net en comparant les pertes et les créations d’emplois liées à l’e-commerce est impossible puisque la corrélation entre e-commerce et perte d’emploi ne peut être établie à grande échelle.

    En effet, à la lumière d’une revue de la littérature effectuée par BeCommerce en 2022, le commerce électronique peut simultanément stimuler et réduire le taux d'emploi dans de nombreuses professions et industries (Gherghina & al., 2021). Le commerce électronique crée de nouveaux emplois directement par exemple, dans le domaine des technologies de l'information et de la communication (TIC), mais aussi indirectement dans le secteur de la logistique - à travers l’augmentation du volume et de la diversité de la demande de produits (Cf. notamment Hecker (2001); Jocevski & al. (2020); Terzi (2011) ; Turban & al. (2018)).

    Le commerce électronique entraine en revanche la perte de certains emplois dans certains secteurs tels que la vente au détail en magasins physiques, les bureaux de poste et les agences de voyages (Cf. notamment Bilerman & al. (2017); Bram & Gorton (2017); Singh (2008) ; Terzi (2011)). Dans le secteur du commerce de détail, il est à préciser que des effets positifs et négatifs sur l’emploi se combinent, ce qui rend difficile l’analyse de l’impact net du e-commerce sur ce secteur.

    Cependant, des retombées positives sur l’emploi peuvent aussi être observées dans deux cas précis : lorsque les entreprises se saisissent des nouveaux canaux de ventes pour développer leurs activités et renforcer leur position sur le marché et lorsque l’approvisionnement en ligne entraine une baisse des coûts des intrants matériels, générant des gains de productivité ainsi que de nouveaux emplois.

    A contrario, les activités e-commerce peuvent remplacer les canaux de distribution traditionnels et donc, détruire l’emploi dans les magasins physiques. Aux créations et destructions d’emplois, s’ajoutent la transformation des emplois (avec de nouvelles compétences) et le déplacement d’emplois (plateformes numériques, économie de partage, et cetera).

    Les publications sont nombreuses et leurs conclusions parfois contradictoires, ce qui témoigne du fait que la création d’emplois liée à l’e-commerce pourrait se situer davantage dans des secteurs connexes tels que la logistique, le numérique, et cetera, mais pas forcément dans le commerce de détail.

    Selon Bruno Wattenberg, président du Comité d’Innovation d’Ernst & Young, Professeur d’économie à la Solvay Business School, l’e-commerce représente 11 000 emplois directs en Belgique. Et si l’on compte l'ensemble des freelances qui gravitent autour du secteur, on arrive globalement à 15 000 personnes dont le travail dépend directement ou indirectement de l'e-commerce. Cette déclaration a été confirmée par Dominique Michel, CEO de Coméos, la fédération sectorielle du Commerce et des services en Belgique en décembre 2021.

    Néanmoins, ces estimations sont imparfaites, car elles ne tiennent pas compte des emplois belges qui dépendent des activités des e-commerçants étrangers (Zalando, CoolBlue, Amazon, AliExpress, eBay, et cetera) et ils sont nombreux à envoyer des colis et rendre des services sur notre sol. Comme l’honorable membre le sait certainement, 63 % des achats en ligne en Belgique sont réalisés sur des e-shops transfrontaliers ou étrangers.

    Quant à la situation de la Belgique par rapport aux autres pays européens en matière d’e-commerce. Nous sommes à égalité avec la Finlande, pour ce qui est de la plus forte augmentation du nombre d'entreprises vendant en ligne en 2020 (ventes en ligne représentant au moins 1 % de leur chiffre d'affaires total). Une hausse de 5 % par rapport à l'année précédente (source : EuroStat).

    Par contre, si l’on se base sur le taux d’habitants réalisant des achats en ligne, nous sommes classés douzième sur les 37 pays analysés dans le dernier rapport de la Fevad. Ainsi, 73 % des Belges achètent en ligne alors que les Anglais sont en tête du classement avec 92 % de la population utilisant l’e-commerce.