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L'obligation de réussir le réseau Natura 2000.

  • Session : 2005-2006
  • Année : 2006
  • N° : 202 (2005-2006) 1

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  • Question écrite du 22/08/2006
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme

    En date du 25 juillet 2006, six associations (la Société royale forestière de Belgique, l'Union des villes et des communes de Wallonie, Natagora, la Fédération wallonne de l'agriculture, Inter-Environnement Wallonie et « Nature, Terres & Forêts »), dont l'action est en lien direct avec l'environnement, ont adressé à l'ensemble des membres du Gouvernement wallon une lettre ouverte intitulée « De l'obligation de réussir Natura 2000 ».

    Ce qui s'apparentait initialement à un ambitieux projet de préservation de la biodiversité et donc de protection de l'environnement en Wallonie, s'avère aujourd'hui être une déception pour de nombreux acteurs de terrain tant les contraintes sont nombreuses sans que les moyens ne soient mis en œuvre en parallèle pour réussir Natura 2000.

    Les auteurs s'en expliquent. Les moyens pour réussir ce projet doivent provenir de la Région wallonne. Ceux-ci font pourtant cruellement défaut. Si des étapes importantes (point de vue administratif, juridique et scientifique) ont été franchies en terme de désignation et de cartographie des zones notamment, l'évolution du dossier semble depuis lors très coercitive et est perçue par les acteurs de terrain, celles et ceux qui doivent s'approprier le projet Natura 2000 et en faire une réussite, comme un fardeau particulièrement lourd à porter. D'une part, les mesures envisagées pour déployer le réseau Natura 2000 faisaient fi de toute analyse socio-économique de leur impact et, d'autre part, les acteurs de terrain, en l'occurrence les gestionnaires des zones concernées, se sentaient insuffisamment intégrés, voire exclus, de cette mise en œuvre.

    Si une ouverture de Monsieur le Ministre Ministre a pu être constatée en ce sens que le réexamen des mesures proposées est en cours dans le cadre d'une concertation multi-partenariale, il faut cependant constater que les résultats livrés par cette dernière seront inopérants si, par ailleurs, des réponses structurantes ne sont pas rapidement données par le Gouvernement wallon, ce qui ne semble pas être le cas aujourd'hui.

    Aussi, pour les compétences propres de Monsieur le Ministre, quelles sont les mesures prises et les moyens mis à la disposition des secteurs concernés pour rencontrer leurs préoccupations ?

    Quelles pistes le réexamen des mesures offre-t-il ? Sur lesquelles d'entre-elles Monsieur le Ministre va-t-il s'engager ?

    Dans quel délai la mise en œuvre de ces nouvelles pistes est-elle prévue ?

    Faut-il rappeler que le temps perdu nous éloigne chaque jour un peu plus de l'objectif de préservation de la biodiversité fixé par la Commission européenne. C'est à l'aune de la réalisation de cet objectif que certains Etats seront sanctionnés ou non par des mesures contraignantes prises au niveau européen.

    La réussite du réseau Natura 2000 étant étroitement liée à plusieurs compétences réparties sur l'ensemble du Gouvernement, quelles dispositions sont-elles prises par les Collègues ministres de Monsieur le Ministre en vue d'assurer au projet Natura 2000 les conditions de sa réussite, c'est-à-dire les réformes structurantes nécessaires dans les différents départements pour faire de Natura 2000 un succès pour l'ensemble des parties au projet ?

    Quand le Gouvernement wallon fera-t-il de Natura 2000 une de ses véritables priorités politiques en attribuant aux porteurs du projet les moyens nécessaires et indispensables à sa réussite ?

    Au-delà des paroles, ce sont des signes forts et des gestes très concrets dont les gestionnaires des milieux naturels concernés ont besoin.

    Quels sont-ils et quand viendront-ils ?

    C'est à cette condition que le projet Natura 2000 pourra être assimilé ou non à une réussite.
  • Réponse du 11/09/2006
    • de LUTGEN Benoît


    LUTGEN N° 202
    Réponse :

    L'instauration du réseau Natura 2000 est forcément un processus de longue haleine vu la surface couverte. Pour rappel, 13 % du territoire wallon est en effet concerné.

    Natura 2000 est pour moi une priorité et je ne peux pas me rallier à l'analyse pessimiste de l'honorable Membre de l'évolution de ce dossier. Il parle de nombreuses contraintes, d'une évolution du dossier coercitive alors que justement tout est en discussion actuellement avec nos partenaires. Il me semble donc qu'il est utile de lui rappeler la chronologie du dossier.

    Dans un premier temps, les scientifiques ont été chargés d'identifier les habitats et les espèces en Région wallonne concernés par les deux directives européennes. Ce travail scientifique a permis de rédiger des documents permettant, d'une part, d'identifier sur le terrain ces différents habitats et ces différentes espèces et, d'autre part, de mettre en évidence les menaces qui pèsent sur eux et les moyens de protection idéaux à mettre en œuvre pour assurer leur protection. Cette démarche était essentielle pour la bonne suite du projet et surtout pour avoir une base de discussion objective pour la suite. Parallèlement à cette démarche, des juristes ont rédigé un avant-projet d'arrêté de désignation.

    C'est de là, en effet, qu'est sortie une liste de mesures visant à assurer la protection des sites et un premier texte. Beaucoup de personnes se sont alarmées sur ces deux documents qui n'étaient que des documents de travail, une base pour la suite des discussions.

    J'ai personnellement demandé que tous les acteurs du monde rural soient associés à cette discussion. J'ai donc invité à la négociation les représentants des agriculteurs, des propriétaires forestiers, des communes, des environnementalistes, des naturalistes et des administrations. Cette négociation qui est en cours vise justement à prendre en compte les aspects économiques, sociaux et culturels. A la demande de ces partenaires un délai de réflexion leur a été donné. La prochaine réunion est programmée ce 20 septembre.

    Je pense qu'il faut saluer tous ces partenaires qui, malgré des vues parfois contradictoires, ont accepté de travailler de façon très constructive sur ce projet. C'est déjà une grande réussite et je ne doute pas que les résultats seront à la hauteur des ambitions de Natura 2000.

    Toute la suite du dossier est évidemment conditionnée par le résultat de ces négociations. Et ce n'est qu'une fois les mesures retenues qu'elles pourront être budgétisées pour l'ensemble de la Région wallonne. Je signale par ailleurs que deux études sont réalisées afin de pouvoir estimer l'impact budgétaire de certaines mesures. Ce travail sera également primordial pour l'évolution du dossier. Car c'est également une condition importante : toute perte éventuelle de revenus devra être compensée.

    Des gestes forts que l'honorable Mermbre réclame, j'en ai déjà posés :

    - une équipe de 20 scientifiques sillonne la Wallonie pour cartographier les sites Natura 2000 ;
    - les commissions de conservation ont été installées et je me suis engagé à leur donner des moyens financiers et humains afin qu'elles remplissent au mieux leur mission d'information auprès des propriétaires concernés par les sites ;
    - des conventions sont accordées annuellement à la Fédération wallonne de l'agriculture et à la Société royale forestière de Belgique afin qu'elles assurent des missions de vulgarisation et d'information auprès de leurs membres ;
    - des conventions sont passées avec les universités pour estimer les budgets nécessaires à la réalisation des mesures.

    Ce dossier est en bonne voie même si de nombreuses réponses doivent encore être apportées. Le Gouvernement wallon aura d'ici peu un dossier complet sur lequel il pourra travailler et s'engager à protéger les sites Natura 2000 tout en tenant compte des aspects économiques, sociaux et culturels.