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"l’indice de bonheur" de l’ONU

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 149 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 05/05/2022
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à DI RUPO Elio, Ministre-Président du Gouvernement wallon
    Le « World Happiness Report » (WHR) créé par l'ONU mesure le bonheur à partir de six variables : revenu, liberté, confiance dans le gouvernement, espérance de vie en bonne santé, soutien social et générosité. L'idée est bien évidemment de relativiser le seul critère du PIB et de l'agrémenter d'autres indices tout aussi, si pas plus, importants !

    Si la Finlande est en tête du classement, devant le Danemark, l'Islande, la Suisse et les Pays-Bas, la Belgique se classe en 19e position !

    Quelle est l'appréciation du Ministre-Président relative au WHR ?

    La Wallonie dispose-t-elle des éléments qui permettent de la situer au sein de la Belgique et des autres entités régionales ? Quels sont-ils et quelle est la situation ?

    Après deux années de coronavirus, le recours à un indicateur comme celui du WHR ne paraît-il pas plus essentiel que jamais pour élaborer les politiques publiques ?

    Le réseau international Weall (well being economy alliance) travaille directement avec les gouvernements sur l'intégration des indicateurs de bien-être dans les politiques publiques et dans les finances publiques. C'est le cas de la Californie, la Finlande, l'Islande, l'Écosse… est-ce également le cas de la Wallonie ?

    À défaut, pourrait-elle rejoindre le train en marche ?

    Monsieur le Ministre-Président peut-il s'y engager et inscrire le point à l'ordre du jour d'un gouvernement ? Quels seraient les éventuels obstacles ?
  • Réponse du 23/06/2022
    • de DI RUPO Elio
    Permettant de mesurer les richesses créées dans un pays pour une période donnée, le PIB est un indicateur économique largement utilisé dans le monde. Il s’est donc imposé pour devenir une référence en matière statistique et économique pour développer et améliorer certaines politiques publiques. Cet outil est aussi utilisé pour comparer des pays et/ou des régions entre eux. Par cette comparaison, les autorités publiques peuvent identifier les politiques qui doivent être revues. Par exemple, identifier une sous-région ou un secteur économique qui mérite une attention particulière afin de la soutenir et de la relancer d’un point de vue économique.

    Toutefois, ces dernières années ont souligné à quel point cet indicateur économique fondé uniquement sur le PIB pouvait être réducteur et ne pas faire émerger les aspects plus positifs d’un pays et/ou d’une région. Ce constat est notamment posé par toute une série de chercheurs et d’économistes. Le seul critère du PIB est contesté puisqu’il ne prend pas en compte toute l’activité économique et exclut le travail bénévole de son analyse. D’autre part, il omet totalement les données sociales, environnementales ou encore basées sur le bien-être des individus. Des données qui sont essentielles face au monde et aux défis actuels. Il est donc reconnu que le PIB est un indicateur insuffisant pour juger de la situation du monde ou d’un pays.

    Parallèlement, la crise sanitaire a eu d’importantes conséquences sur les individus. Cette crise a souligné qu’il était plus essentiel que jamais de se préoccuper du bien-être. Par exemple, améliorer le cadre de vie et favoriser un bon équilibre entre vie privée et professionnelle. Les effets de la COVID nous obligent donc à être encore davantage attentifs à d’autres dimensions que celle basée uniquement sur l’économie.

    Face à ces constats, des alternatives multiples se sont développées pour prendre d’autres critères en compte. C’est le cas de l’Indice de Développement Humain (IDH) qui a été créé par les Nations Unies dans les années 1990. Cet indicateur prend en considération tant le PIB que l’espérance de vie et le niveau de formation. Toutefois, l’« indice de bonheur » va encore plus loin puisqu’il considère un plus grand ensemble d’indicateurs. De surcroit, il prend en compte davantage de données orientées sur les aspects sociaux, sociétaux et environnementaux.

    Concernant spécifiquement le « World Hapiness Report » (WHR), la Région wallonne et ses services administratifs n’ont pas été associés à la contribution et à l’élaboration de cet indicateur. La raison est qu’il s’agit d’un rapport externe aux travaux de l’ONU. En effet, ce rapport est établi par un groupe d’experts indépendants agissant sous leur propre responsabilité et à titre personnel. D’ailleurs, ce rapport est soutenu par un groupe de Fondations privées. De ce fait, les opinions exprimées dans le rapport ne reflètent et n’engagent pas les organisations, les agences ou les programmes des Nations Unies. Ce rapport ne porte donc aucun caractère officiel issu d’une organisation internationale.

    D’autre part, le « World Hapiness Report » est alimenté par les données issues du sondage mondial Gallup de 2019 à 2021, où plusieurs questions sont posées à des individus de différents pays. Ce rapport est donc basé sur l’auto-évaluation, la perception que l’on a « soi-même » de la notion de « bonheur ». Les classements réalisés par ce rapport sont issus d’échantillons représentatifs au niveau national pour les années 2019-2021. Ils sont entièrement basés sur les scores du sondage, en utilisant les pondérations de Gallup pour que les estimations soient représentatives. Ces données sont alors analysées sur base de 6 critères : niveaux de PIB, espérance de vie, générosité, soutien social, liberté et corruption. Au vu de ces éléments et obstacles, il est important de considérer cet indicateur en ayant un avis critique et une attention mesurée.

    Aujourd’hui, le 10e rapport est présenté dans le contexte du COVID-19, avec toutes les conséquences que cette pandémie a pu avoir notamment sur le niveau de liberté et d’espérance de vie. Dans ce contexte, le rapport se focalise sur le passé, sur la situation particulière des individus et des pays face à la pandémie ainsi que sur l’avenir pour analyser comment la science du bien-être et les sociétés étudiées sont susceptibles d’évoluer.

    Du côté de la Belgique, elle se classe en 19e position sur 146 pays. Il s’agit de son meilleur classement. Malheureusement, le rapport se focalise sur une approche basée sur les capitales et les pays. En d’autres termes, des données régionales ne sont pas disponibles.

    Pour ma part, je suis pleinement convaincu de l’utilité de disposer et de prendre en compte d’autres indicateurs que l’unique critère basé sur le PIB. La diversité des indicateurs nous permet de mieux nous rendre compte des situations réelles de certains de nos territoires et/ou de nos secteurs économiques. Ainsi, notre connaissance s’améliore et s’affine pour pouvoir prendre les meilleures décisions possibles, correspondant aux constats posés par ces nouveaux indicateurs.

    Au niveau wallon, lors des prises de décisions, chaque politique publique fait l’objet d’une attention particulière pour rencontrer certains des Objectifs de Développement Durable (ODD). Ces objectifs onusiens permettent déjà d’être attentifs à certaines dimensions humaines, sociétales et environnementales. Par ailleurs, le Gouvernement reste très attentif à la dimension du bien-être. Dans cette optique, le Plan de Relance wallon reprend un volet spécifique à cette dimension dans son axe 4 (« Soutenir le bien-être, la solidarité et l’inclusion sociale »). Très récemment, le Gouvernement a acté le projet 258 du PRW visant à « créer des guichets d’accompagnement spécialisés pour les familles monoparentales ». Les points relais familles monoparentales constituent un nouveau dispositif expérimental d’aide et de soutien à l’accompagnement des familles monoparentales via 19 centres de services sociaux des mutualités et d’ASBL. Ce projet permettra de faciliter les démarches administratives des familles monoparentales souvent plus en difficulté. Ceci devrait participer à l’amélioration du niveau de bien-être de ces familles. Avec ce projet, un échange d’informations entre les différents acteurs référents actifs sur un même arrondissement sera encouragé de manière qu’il y ait, au sein de cette zone, une couverture géographique maximale et, en toutes hypothèses que les communes avec un ISADF les plus faibles soient couvertes. L’ISDAF est un indicateur synthétique d’accès aux droits fondamentaux qui est élaboré par l’IWEPS à la demande du Gouvernement wallon dans le cadre de la réforme du Plan de cohésion sociale. Il prend en compte plusieurs dimensions sociales importantes comme le droit à une alimentation saine et à des revenus suffisants.

    La Région wallonne reste attentive à prendre en compte une multitude d’indicateurs économiques, sociaux, sociétaux et environnementaux pour élaborer ses propres politiques. Elle reste ouverte au développement de nouveaux outils diversifiés en la matière, plutôt qu’un focus essentiel sur l’indicateur lié au PIB.