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Le point sur l'accueil des réfugiés ukrainiens en Wallonie

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 391 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 16/05/2022
    • de DELPORTE Valérie
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Depuis plusieurs semaines maintenant, notre Région remplit son rôle de région hospitalière en organisant un accueil inconditionnel des réfugiés ukrainiens fuyant le conflit armé. Nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer dans cette commission la stratégie mise en place par la Wallonie, en collaboration avec les communes et l'Autorité fédérale en vue d'organiser au mieux et le plus dignement possible l'accueil des réfugiés. Toutefois, au vu de l'importance du sujet je me permets d'y revenir.

    Comme vous l'avez rappelé, la stratégie wallonne se construit autour de 5 axes :
    - miser sur l'accueil citoyen ;
    - le recensement d'hébergement collectifs ;
    - le recensement de terrains en vue d'accueil du logement modulaire ;
    - le soutien aux communes ;
    - en cas de nécessité, la réquisition.

    Il convient d'être particulièrement reconnaissant envers ces citoyens qui ont décidé d'accueillir à la maison des familles ukrainiennes. Toutefois, si le conflit dure, cette solution ne peut pas être structurelle. Il me revient d'ailleurs que beaucoup de communes et CPAS doivent reloger des familles initialement accueillies chez des hébergeurs.

    Monsieur le Ministre peut-il faire le point sur le déploiement de la stratégie wallonne d'accueil des réfugiés ukrainiens dans chacun des 5 axes ?

    Qu'est-ce qui est mis en place en vue de garantir des logements pérennes pour les réfugiés ukrainiens ?

    Quelles sont les dernières données chiffrées dont vous disposez ?

    Quel est l'état de ses contacts avec l'Autorité fédérale et les pouvoirs locaux ?
  • Réponse du 27/06/2022
    • de COLLIGNON Christophe
    Ainsi que le suggère l’honorable membre, je structurerai ma réponse autour des cinq axes de la stratégie du gouvernement.

    Le premier axe vise à stimuler et encadrer l’accueil des citoyens auxquels je veux, moi aussi, rendre une nouvelle fois hommage. C’était le premier niveau de notre stratégie et nous sommes intervenus pour le soutenir et l’encadrer, avec la plate-forme wallonne, avec le bail type, avec la convention d’occupation précaire, avec la charte de l’hébergeur, avec un éventail d’actions aux côtés des citoyens et des communes qui ont fait preuve d’une solidarité et d’un engagement remarquables.

    Aujourd’hui, la cellule régionale que nous avons créée organise la concertation avec Fedasil, pour améliorer sa communication avec les communes, et ce, en concertation quotidienne avec les gouverneurs. Elle est également active sur les questions liées à l’intégration, la santé et le vivre ensemble, en concertation avec l’AViQ, le SPW IAS, le SPW Économie-Emploi-Recherche, le FOREm, l’IFAPME, l’OTW et les services ONE, enseignement et aide à la jeunesse de la Communauté française. De nombreuses actions ont déjà été prises par les diverses parties et elle trouvera les informations pertinentes sur le site régional www.wallonie.be/fr/ukraine, qui comprend notamment une FAQ et des guides pratiques destinés aux réfugiés, aux citoyens wallons ainsi qu’aux pouvoirs locaux et aux services d’aide. Ces outils sont régulièrement mis à jour. Enfin, la cellule régionale travaille à la communication de l’offre de services aux réfugiés, via les centres régionaux d’intégration, les communes et les associations ukrainiennes. Un marché public en interprétariat est par ailleurs lancé afin d’aider les réfugiés dans leurs démarches.

    Concernant la répartition des Ukrainiens sur le territoire, nous pouvons dire que la Wallonie assume plus que sa part. On dénombrait à ce jour 4 813 places occupées chez l’habitant. Dans ce cadre, pour situer les réfugiés ukrainiens non encore inscrits au registre national et affiner les estimations sur l’accueil à prévoir, une enquête communale a été lancée en Wallonie, le 17 mai, en collaboration avec les gouverneurs et avec l’appui de l’IWEPS. Elle se déroulera tous les 15 jours, jusqu’à la fin juillet, et fera l’objet d’un rapport au Gouvernement wallon et aux gouverneurs.

    Le deuxième axe vise à utiliser ce qui existe déjà : les bâtiments publics, associatifs et privés. C’est la deuxième ligne. Au vu de la capacité d’accueil citoyen et de son évolution naturelle dans la durée, nous nous sommes attelés à développer la phase d’hébergement collectif.

    Nous avons donné pour mission aux gouverneurs de recenser les hébergements collectifs publics, associatifs et privés susceptibles d’être mobilisés. Nous allons les aborder progressivement. En bonne logique, nous allons commencer celles qui sont disponibles et non affectées puis, progressivement, en fonction des besoins, nous allons faire en sorte de dédier à l’accueil des réfugiés des logements collectifs existants et recensés par les gouverneurs.

    Pour être complet, il convient de rappeler qu’ayant accès à l’emploi ou à un revenu via le CPAS, les Ukrainiens pourront aussi trouver un logement par le circuit locatif privé classique.

    Donc, l’offre en logements pérennes, collectifs ou autres, permettra aux coordinateurs locaux d’orienter les réfugiés ukrainiens qui sortent d’un hébergement de crise.

    Sur la base du recensement des gouverneurs, le Gouvernement wallon et le Gouvernement de la Communauté doivent s’accorder sur un ordre de priorité de mise à disposition des logements potentiels, et chiffrer le coût de ces mises à disposition. À ce sujet, 32 millions d’euros ont été dégagés dans le cadre des travaux du conclave pour permettre à la Wallonie de faire face aux dépenses inhérentes à l’aspect « hébergement ». Ces moyens doivent permettre de couvrir les deux premières phases d’activation d’hébergements collectifs.

    Concernant la salubrité, un outil d’analyse a été élaboré par le département du Logement sur la base de trois modèles existants : la grille d’évaluation de la salubrité des logements du SPW TLPE, la grille d’analyse utilisée par les services du gouverneur de la province de Namur (sur le site de Chevetogne), et la grille d’analyse utilisée par Fedasil. Le département du Logement du SPW a fait offre de service aux cinq cabinets des gouverneurs pour la mise à disposition d’enquêteurs de salubrité chargés d’assurer une visite préalable dans des bâtiments pressentis pour de l’hébergement collectif.

    Sur la question de l’urbanisme, une dispense de permis d’urbanisme, pour 36 mois, a été adoptée par modification du Code du développement territorial, pour permettre de créer ou d’aménager des structures destinées à accueillir des demandeurs de protection temporaire au sens de la directive 2001/55/CE. Une dispense de permis ne s’accorde pas : on en bénéficie si l’on remplit les conditions édictées par le CoDT, sans aucune démarche à faire.

    Enfin, une plateforme informatique est en préparation pour assurer la gestion des hébergements pérennes wallons pouvant accueillir des réfugiés ukrainiens. Elle devra permettre de cibler des hébergements pour certains profils plus vulnérables.

    Le troisième axe vise l’habitat modulaire. L’expérience nous a appris que la mise en œuvre de ce type de solution prend du temps. Le déploiement d’habitations légères se fera via un accord-cadre que la SWL parachève à ma demande. Parallèlement, un convenant à l’implantation de ce type d’habitat est en cours, et ce, suivant deux axes de recherche : des terrains du patrimoine de la SWL, hors zone ZACC ; et des terrains proposés par les communes sur la base d’un recensement piloté par le SPW TLPE. Plus de quarante terrains ont été proposés par les communes. Ces propositions sont en cours d’analyse sur une triple base : une évaluation de l’accessibilité aux différents services, transports, commerces, écoles, etc. ; la possibilité de pérenniser ces habitations une fois la période de gestion du relogement des réfugiés passée ; et les besoins locaux en matière de relogement. Chaque commune présélectionnée sera recontactée afin obtenir l’assentiment des autorités locales sur le site retenu et convenir du nombre d’habitations légères qui y seront implantées. La sélection finale sera transmise au Gouvernement pour approbation. Il convient aussi d’assurer la pérennisation de ces habitations légères au-delà de la crise ukrainienne. Dans ce but, il est proposé d’articuler cette mesure d’urgence avec l’engagement de la DPR 2019-2024 de soutenir le déploiement de solutions innovantes d’habitats et notamment l’habitat léger.

    Le quatrième axe concerne le subside aux communes. Dès le début du conflit, le Gouvernement a décidé d’octroyer une aide aux communes pour la mise en place d’un accueil et d’un hébergement coordonnés des ressortissants ukrainiens sur le territoire wallon. Elle n’est pas dérisoire, dans l’ensemble des mesures que nous déployons.

    Pour faciliter l’organisation concrète sur le terrain, nous avons décidé d’octroyer ce financement d’un euro par habitant aux structures supracommunales reconnues ; ainsi qu’à chaque commune non‑membre d’une telle structure. Les crises précédentes ont, en effet, montré que cette logique de mutualisation des moyens renforçait l’efficacité et l’efficience de l’action communale. J’ai eu l’occasion de rencontrer personnellement, par visioconférence, les treize structures supracommunales ainsi que toutes les communes non-membres. J’ai ainsi pu leur expliquer la décision du Gouvernement, mais aussi écouter les bourgmestres, échevins, présidents de CPAS et directeurs généraux. Ces rencontres ont confirmé tout l’intérêt de la dynamique supracommunale, mais aussi la volonté des communes d’utiliser ces moyens en mutualisation.

    Cette intervention est une première. À ce jour, tous les moyens dégagés n’ont pas encore été consommés. Ils couvrent, par exemple, des frais de transport, de traduction ou de matériel.

    Enfin, le cinquième axe vise les réquisitions. Des analyses et des documents-types ont été produits à ce sujet. Néanmoins, je le redis, à ce stade, et tant que nous ne sommes pas en phase d’urgence, l’activation de cette solution paraît juridiquement impossible.

    Notre intervention est donc pragmatique et graduelle. Chacun conviendra, je pense, qu’il est impossible de libérer d’emblée des milliers de logements en Wallonie. Nous avons donc, d’abord, opté pour la stimulation et l’encadrement de l’accueil citoyen.

    Le temps est venu de mettre en œuvre la deuxième phase de notre stratégie : celle de l’hébergement collectif. Nous nous y sommes préparés. Et, ainsi, nous pourrons proposer des solutions nouvelles d’accueil digne à ces personnes qui ont fui les combats dans leur pays.