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Le développement de l'habitat léger

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 412 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 30/05/2022
    • de EVRARD Yves
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Depuis quelques années, on relève l'émergence d'un nouveau type d'habitat dit « habitat léger ». Il se caractérise, en comparaison au logement traditionnel, par sa faible emprise au sol, son poids léger, son aspect réversible ou encore la possibilité de le déplacer.

    Mon collègue au Fédéral, Benoît Piedboeuf, figure parmi les précurseurs avec un projet-pilote d'habitat léger sur la Commune de Tintigny. Il s'agit de la première commune wallonne à raccorder à l'eau, aux égouts et à l'électricité un quartier uniquement composé d'habitats légers. Fondé sur un modèle de « Community Land Trust », ce projet vise à faciliter l'installation de plusieurs yourtes, roulottes et autres « tiny houses ».

    L'habitation légère sous toutes ses formes est une piste à exploiter afin de lutter contre la difficulté d'accès au logement, la précarité étudiante et le sans-abrisme. Monsieur le Ministre l'a d'ailleurs déjà dit : « la solution de l'habitation légère, via des logements modulaires, est d'ailleurs expérimentée actuellement dans le cadre des mesures d'aides aux communes et aux SLSP mises en place pour reloger les personnes sinistrées par les inondations de juillet dernier ».

    En outre, la Déclaration de politique régionale précise que le Gouvernement prendra une série de leviers en matière de soutien à des solutions innovantes dont fait partie l'habitat léger.

    Comment va-t-il mettre cette partie de la Déclaration de politique régionale en œuvre ? Va-t-il privilégier les habitats légers ou les coopératives d'habitants ?

    Quelles mesures concrètes va-t-il mettre en place afin d'inciter les pouvoirs locaux à développer des projets à l'instar de la Commune de Tintigny et ainsi développer concrètement cette filière de l'habitat léger ?
  • Réponse du 04/07/2022
    • de COLLIGNON Christophe
    Le développement de l’habitat léger est effectivement un objectif de la déclaration de politique régionale. Il implique de faire évoluer le cadre légal et réglementaire en la matière. Plusieurs mesures en ce sens ont déjà été prises ou sont en cours d’adoption.

    Tout d’abord, le 3 décembre 2020, le Gouvernement a définitivement adopté trois arrêtés en la matière. Le premier fixe des critères minimaux de salubrité pour les habitations légères. Ces critères sont d’application depuis le 1er juin 2021 pour les « nouvelles » habitations légères mais le seront seulement au 1er juin 2023 pour les habitations légères existantes, ce qui laisse le temps à leurs propriétaires de les adapter aux normes. Les contrôles se dérouleront essentiellement sur la base de plaintes, comme pour les logements, et ne commenceront effectivement qu’après le 1er juin 2023. Le deuxième arrêté est relatif au permis de location dorénavant applicable aux habitations légères données en location. Le troisième est relatif à la procédure de contrôle des critères de salubrité qui seront effectués par les agents du SPW Territoire, Logement, Patrimoine et Énergie.

    Parallèlement, plusieurs démarches réglementaires étaient nécessaires pour permettre le financement de ce type d’habitat dans le cadre des politiques régionales d’accès à la propriété et du logement public. Ainsi, un arrêté a été élaboré pour permettre un soutien financier régional au développement de ce type d’habitat par les opérateurs de logements publics. Cet AGW est soumis à l’avis du Conseil d’État et devrait être adopté définitivement d’ici à la fin de l’année.

    Par ailleurs, en séance du 18 mai, le gouvernement a adopté, en deuxième lecture, le projet de décret modifiant le Code wallon de l’habitation durable. Parmi les modifications importantes apportées figurent :
    - la reconnaissance institutionnelle du caractère adapté, adaptable ou accessible de l’habitation légère. Précisément, à l’article 5 du Code, modifié la dernière fois par le décret du 2 mai 2019, les modifications suivantes sont apportées : « 1° à l’alinéa 1er, les mots « de l’habitation » sont chaque fois remplacés par les mots « du logement » ;
    - l’adaptation de l’article 175.2 du CWHD pour donner la possibilité à la Société wallonne du crédit social d’octroyer un crédit pour l’habitation légère afin de favoriser l’accès à ce type d’habitat aux publics fragilisés ;
    - l’insertion, aux articles 29 et 59bis, d’une base légale au financement que pourrait accorder la Région aux opérateurs de logements publics en vue d’acquérir ou créer une habitation légère en raison :
    o d’événements exceptionnels imprévisibles ;
    o d’un programme spécifique approuvé par le Gouvernement ;
    o d’un programme spécifique visant la réinsertion par l’habitation de personnes sans-abri.

    S’agissant du déploiement effectif de l’habitat léger, les perspectives ont quelque peu évolué du fait des besoins urgents de relogement auxquels la Wallonie a dû faire face à la suite des inondations de juillet et de l’afflux de ressortissants ukrainiens.

    Ainsi, une première expérience a été lancée, dans l’urgence, pour le relogement de personnes sinistrées par les inondations. Réalisée via des accords-cadres de la SWL pour l’acquisition et la location, elle a été l’occasion de tester le modèle dans ses différents ces aspects. Si la filière industrielle développant l’habitat léger nous a montré l’étendue des solutions possibles, et particulièrement les logements modulaires, leur disponibilité rapide s’est avérée plus problématique. Les standards techniques et énergétiques pratiqués pour ce type d’habitat se sont, en outre, généralement, révélés incompatibles avec les normes en vigueur et les besoins liés à une occupation permanente. Enfin, l’accès à des terrains viabilisés s’est aussi avéré complexe. Cette première expérience a toutefois été enrichissante tant pour les industriels que pour les opérateurs, pour apprécier les potentialités de ce type d’habitat et les possibilités de le faire évoluer pour répondre de manière optimale à des situations bien précises, comme la prise en charge du relogement de populations dans une crise majeure ou pour des programmes de lutte contre le sans-abrisme.

    Une deuxième expérience est prête à être lancée sur l’ensemble du territoire wallon, construite sur une base volontaire de communes désireuses de développer ce type d’habitat. Dans un premier temps, ces logements devront répondre à un besoin de relogement plus stable des réfugiés ukrainiens. Une fois cette période passée, ces logements seront intégrés dans le parc communal de logements publics pour être requalifiés en logements de transit ou d’insertion, ou s’inscrire dans une dynamique d’« Housing first ».

    Sur la base de ces deux expériences, l’habitat léger pourra prendre sa place dans l’éventail des réponses à la question du logement, là où il s’avère efficient. Quant au modèle d’habitat à privilégier, je dirai être partisan de la multiplicité des modèles, qu’ils soient individuels ou collectifs. C’est, en effet, en misant sur la diversité des formes et des concepts d’habitats que nous pourrons espérer répondre aux besoins du plus grand nombre.