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Le ralentissement des investissements étrangers en Wallonie

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 709 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 13/06/2022
    • de DESQUESNES François
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    À l'heure où les économies européennes tentent de se rassurer dans un contexte géopolitique difficile, c'est avec intérêt que nous avons pris connaissance des résultats d'une étude du consultant EY indiquant que la Belgique reste une région intéressante pour les investisseurs étrangers.

    En effet, on aurait enregistré l'année dernière une hausse de 8 % du nombre d'investissements directs étrangers.

    Malheureusement, cette lecture positive doit, semble-t-il, être tempérée en ce qui concerne la Wallonie.

    Si ces dernières années, la Région wallonne a pu bénéficier des investissements chinois dans la logistique, ceux-ci ont quasiment chuté de moitié en raison de la crise du secteur aérien.

    Les investisseurs semblent d'ailleurs considérer la Wallonie généralement moins attractive que la Flandre. La consultante EY, pointe notamment la rapidité avec laquelle la Flandre, l'Allemagne ou la France ont lancé des Plans de relance. « En Wallonie, on étudie encore des plans de relance au lieu d'agir », ajoute-t-elle.

    Le manque de compétences linguistiques et la réputation de climat social difficile ont aussi un impact négatif sur la Région wallonne, selon l'étude.

    Comment Monsieur le Ministre réagit-il à cette étude ? Confirme-t-il les chiffres avancés ?

    Que répond-il à l'argument lié à la lenteur de la mise en œuvre du Plan de relance wallon ?

    Quelles actions sont déjà menées ou entend-il entreprendre pour corriger cette image négative par rapport à la vision à l'international de potentiels investisseurs étrangers ?
  • Réponse du 04/07/2022
    • de BORSUS Willy
    Le baromètre de l’attractivité belge 2021 présenté par EY montre effectivement une augmentation de 8 % des projets d’investissements directs étrangers (IDE) pour l’ensemble du pays, et ne mentionne que 46 projets pour la Wallonie.

    Je tiens tout d’abord à préciser qu’en ce qui concerne les investissements étrangers, les conditions préalables à la création d’un indicateur de type benchmarking ne sont pas rencontrées sur le plan méthodologique. En effet, contrairement aux données d’exportations wallonnes et flamandes qui proviennent de la Banque Nationale de Belgique, Institut statistique fédéral garant d’une neutralité méthodologique, il n’existe aucune méthodologie partagée de comptabilisation des dossiers d’investissements étrangers entre la Wallonie et la Flandre, et de fait avec tous les autres pays européens voisins.

    Pour des motifs liés aux différentes stratégies d’attractivité des régions et du traitement de l’origine géographique des dossiers, nous constatons que diverses méthodologies de comptabilisation des dossiers d’investissements étrangers coexistent actuellement sur le « marché » (cf. ici l’étude E&Y, mais notons encore celles de IBM/OCO, ou encore les analyses propres des agences régionales comme l’AWEx et le FIT) qui rendent très difficiles toutes comparaisons internationales.

    C’est pour ces raisons que nous n’avons jamais défini et utilisé des indicateurs de type benchmarking pour les investissements étrangers.

    Ainsi de son côté, l’AWEx en partenariat avec le SPW a annoncé les chiffres de 72 dossiers conclus en 2021, pour 989,9 millions d’euros et 1 026 emplois. EY ne comptabilise pas, par exemple, comme l’AWEx les dossiers flamands et bruxellois, ni les investissements étrangers sans création d’emploi, et cetera. Cela représente donc pour la Wallonie une trentaine de dossiers non comptabilisés.

    Ce score tout à fait acceptable reste cependant en deçà de celui des années précédentes qui, elles, furent exceptionnelles. Pour rappel, 2020 avait vu une chute sévère de tous les IDE dans le monde et particulièrement en Europe, avec malgré tout 85 projets conclus en Wallonie, pour 677,4 millions d’euros et 1 801 emplois.

    Effectivement, le rebond de début 2021 n’a pas permis de vraie reprise, et nous avons assisté à un décalage ou du retard dans les dossiers d’investissement, essentiellement industriels. Les raisons en sont nombreuses : prolongation de la crise sanitaire, problèmes de main-d’œuvre, goulots d’étranglement dans les chaînes d’approvisionnement, et cetera. Il est vrai que la Flandre, les Pays-Bas, la France et les pays de l’Europe de l’Est restent de forts concurrents quand il s’agit d’attirer un investisseur étranger.

    La Wallonie doit encore travailler à améliorer son image et faire connaître ses atouts qui sont encore trop méconnus à l’étranger, y compris par les pays limitrophes. Nous pâtissons en effet d’une réputation qui n’est pas justifiée or nous avons encore la possibilité d’accueillir (même de manière limitée) de grands projets en « greenfield ». Nos coûts immobiliers restent les plus bas d’Europe de l’Ouest. Nous vivons dans un écosystème riche et dense où l’innovation et la recherche abondent. Nous pouvons aussi nous targuer d’une position logistique centrale qui fait de la Wallonie une terre prisée de beaucoup, encore aujourd’hui.

    Quant au climat social, celui-ci s’est globalement apaisé depuis quelques années.

    Il existe une vraie nécessité d’adapter les processus de formation pour les filières scientifiques et techniques. La priorité donnée par le Gouvernement wallon à la formation en alternance, notamment dans les STEM, qui est pour moi une priorité, est une décision qui va dans le bon sens.

    Si nos Gouvernements (fédéraux et régionaux) ont mis en place de nombreuses mesures fédérales et aides régionales - il est en revanche évident que la complexité de nos règles, les changements incessants, l’instabilité de notre système fiscal peuvent desservir la Wallonie.

    L’AWEx recommande les différents axes suivants afin de faire la différence dans l’attraction d’investissements directs étrangers :
    1. Entretenir la relation de confiance avec les investisseurs déjà établis en Wallonie, et le suivi du développement de l’entreprise pour son inclusion dans l’écosystème wallon. De fait, sur les 72 dossiers de 2021, 35 sont des extensions (à l’opposé d’une nouvelle création d’entités) ;
    2. Investir dans les compétences numériques (entre autres la collaboration avec Digital Wallonia et les hubs digitaux), qui dotent la Wallonie d’une attractivité moderne et connectée au monde, critère indispensable pour les entreprises multinationales. Ce critère est prépondérant pour le manufacturing (biotech et industrie du futur 4.0) et l’e-logistique, autour des entrepôts connectés, des modes de transport autonomes et moins polluants, comme le chemin de fer et la voie fluviale ;
    3. Davantage miser sur la force d’attraction des programmes européens, nécessitant une localisation sur le sol de l’Union européenne ;
    4. Davantage contrer les effets NIMBY par une éducation citoyenne au vivier d’emplois et aux opportunités de carrière internationale qui caractérisent les IDE, rassembleurs d’écosystèmes de taille mondiale ancrés en Wallonie ;
    5. Mettre le développement durable et la haute technologie industrielle comme cœurs de cible. Les critères ESG deviennent toujours davantage des éléments différenciants des choix de localisation. Les filières Hydrogène, l’économie circulaire et la Reverse Metallurgy sont des options gagnantes.
    6. Établir et maintenir un système fiscal stable et fiable avec l’appui du fédéral ;
    7. Simplifier les procédures et les règles inhérentes aux coûts salariaux et aux permis de travail pour les résidents hors UE ;
    8. Prendre soin de nos talents par une région accueillante, ouverte au monde, culturelle et touristique.