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La future réglementation européenne en matière d'azote et ses conséquences en Wallonie

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 652 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 14/06/2022
    • de DESQUESNES François
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Le Parlement européen a adopté une nouvelle réglementation relative à la commercialisation des engrais. Une série de matières organiques et minérales, qui étaient jusqu'à présent considérées comme des déchets en Wallonie, vont, du fait de cette nouvelle législation, basculer dans la catégorie « fertilisants ». Sur cette base, les effluents d'élevage et matières organiques exogènes à la Région n'étaient pas autorisés à être transférés en Wallonie, pour être épandus en agriculture. Ce ne sera plus cas, suivant ce cadre législatif en construction au niveau européen à l'avenir.

    Que pense Madame la Ministre de cette nouvelle législation européenne ? A-t-elle pris contact pour faire valoir son point de vue ? Avec quels résultats ?

    Son collègue, le Ministre Borsus, indiquait dernièrement que la Direction de la protection des sols du Département du sol et des déchets préparait, en collaboration avec le CRA-W, un nouvel arrêté du Gouvernement wallon « Utilisation des matières fertilisantes ». Il devrait ainsi tenir compte de la nouvelle législation européenne, tout en protégeant les sols wallons. Où en est-on dans l'élaboration de ce dispositif qui tombe dans vos compétences ?

    Quel est son calendrier ? Quelles seront les mesures envisagées pour protéger les sols, nos masses d'eaux et notre environnement en général ? Quels sont les contacts qu’elle a à cet égard avec son collègue le Ministre Borsus ?

    Dernièrement, la Cour des comptes jugeait que la Wallonie n'était pas pleinement en conformité avec la directive-cadre sur l'eau en matière agricole, avec une qualité de l'eau dégradée essentiellement au nord du sillon Sambre-et-Meuse à cause des pesticides, d'engrais azoté et d'effluents d'élevage. Qu'en est-il exactement ?

    Quelles sont les mesures prises ?
  • Réponse du 14/09/2022
    • de TELLIER Céline
    Depuis 2002, les effluents d’élevage étaient considérés comme des déchets, et les transferts en vue d’un épandage en provenance d’une autre Région que la Région wallonne interdits, à l’exception des mouvements d’effluents au sein d’exploitations transfrontalières. Cette situation faisait suite à la volonté politique ferme d’interdire l’épandage de tout effluent ou déchet organique exogène à la Région wallonne, pour y maintenir le plus grand potentiel d’épandage possible pour les effluents wallons et d’éviter la contamination des sols.

    Le Règlement 2019/1009, dit Règlement ‘fertilisants’, fait voler en éclat cette notion de déchets en lui substituant une approche de ‘produits’.

    Parmi ces ‘produits’, on compte certaines matières organiques ou recyclées, en particulier des fertilisants produits à partir de digestats et d’effluents d’élevage transformés, ce qui constitue un défi pour la Wallonie. En effet, ces matières sont produites de manière excédentaire par les régions/pays limitrophes, faisant de la Wallonie un exutoire potentiel de premier plan.

    Cette inquiétude, plusieurs fois exprimée par l’administration wallonne en groupe de travail sur le sujet, n’étant pas partagée par les homologues flamands, n’a pas permis d’influencer le processus à l’échelle européenne à l’époque de l’adoption du Règlement en 2019.

    Au niveau wallon, il est prévu de faire évoluer la réglementation relative aux sols afin de mieux encadrer l’utilisation de l’ensemble des matières valorisées sur les sols, indépendamment de leur statut de produit ou de déchet.

    Pour ce faire, le CRA-W travaille en ce moment sur une convention consacrée au Règlement ‘fertilisants’ et un arrêté relatif à l’utilisation des matières organiques et fertilisants sur et dans les sols, sur base de l’article 4, 2° du Décret du 1er mars 2018 relatif à la gestion et à l’assainissement des sols, est en cours d’élaboration. Le travail a débuté en avril.

    Le projet d’arrêté s’articulera de façon cohérente avec les autres dispositions du décret sols, et tiendra également compte des dispositions décrétales et réglementaires existantes pour des thématiques connexes (décret déchets, code de l’environnement y compris code de l’eau, code de l’agriculture, code forestier…).

    Concernant spécifiquement la problématique du suivi de l’azote, le Programme de gestion durable de l’azote en agriculture (PGDA) actuel contient déjà des dispositions qui s’appliquent aux fertilisants « UE ». En effet, les termes utilisés pour désigner les matières soumises aux dispositions du PGDA sont assez génériques et similaires à ceux employés dans la classification des fertilisants au sein du Règlement 2019/1009.

    Dans sa version actuelle, le PGDA ne permet toutefois pas de fournir une traçabilité de ces ‘produits’ (fertilisants) propice à protéger entièrement les sols et les nappes phréatiques wallons de toute éventuelle pollution en nitrates que leur utilisation à grande échelle engendrerait.

    La révision du PGDA, actuellement en consultation à l’enquête publique, prévoit de remédier à ce point. Cette révision prévoit en effet, pour les exploitants agricoles, de tenir un registre de fertilisation dans lequel seront consignés notamment les apports de fertilisants « UE ». Pour vérifier les données relatives aux fertilisants « UE », les données compilées issues de ce registre devront pouvoir être comparées avec celles issues des déclarations de vente des fournisseurs d’engrais.

    La Cour des comptes, dans son rapport transmis au Parlement wallon en octobre 2016, pointait en effet la recommandation suivante au sujet de la pression agricole sur l’état des masses d’eau : « Relever de manière significative le niveau d'ambition des Plans de Gestion des Districts Hydrographiques (PGDH), particulièrement en matière agricole, en ciblant davantage les mesures sur les masses d'eau critiques. »

    Au terme de ces deuxièmes Plans de gestion, une centaine de masses d’eau de surface restaient dégradées par les effluents agricoles (nutriments et pesticides). Des mesures supplémentaires ont donc été prévues dans le cadre de l’adoption des projets de PGDH3. Ceux-ci sont en cours d’élaboration et seront soumis à l’enquête publique dans les prochains mois.

    Des mesures ciblées tant sur l’assainissement, que le secteur industriel et du secteur agricole sont prévues afin d’améliorer la qualité des masses d’eau d’ici 2027, date d’échéance de la Directive cadre du l’eau pour l’atteinte du bon état de l’ensemble des masses d’eau wallonnes.