à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
Le tir au pré, est encadré et réglementé par le Code du bien-être animal, lequel autorise à recourir à cette pratique d'une part pour l'abattage de certains animaux pour consommation domestique ou privée, d'autre part pour l'abattage de petites quantités de volailles ou de lapins en vue d'établir un approvisionnement en circuit court.
Cette pratique favorise le bien-être animal en évitant le stress du transport et l'arrivée à l'abattoir.
En février 2019, le prédécesseur de Madame la Ministre, en charge du bien-être animal, relatait à une collègue les résultats de la concertation avec l'AFSCA sur le développement de cette pratique en Wallonie. En effet, lui-même favorable à cette pratique, ce dernier mettait en exergue les obstacles réglementaires liés au règlement européen 853/2004 et à la législation sanitaire de compétence fédérale.
Madame la Ministre pourrait-elle m'indiquer si dès lors la concertation avec l'AFSCA s'est poursuivie et si des avancées significatives ont été réalisées pour permettre de développer la pratique du tir au pré en Wallonie ?
Réponse du 21/09/2022
de TELLIER Céline
Je suis favorable au développement de l’abattage sur le lieu d’élevage en Wallonie. Le tir au pré n’étant qu’une des techniques de mise à mort envisageables. Il consiste à appliquer, dans son environnement habituel, un tir par balle au niveau de la tête d’un animal qui n'est soumis à aucune contention. L’animal est ensuite saigné sur place puis sa dépouille est transportée vers l'abattoir à l'aide d'une remorque prévue à cet effet. C’est donc l’ensemble de la procédure qu’il faut envisager dans le cadre de ce dossier.
Depuis 2019, une partie des freins qui se trouvaient dans la règlementation sanitaire ont été levés. En effet, jusqu’à l’été 2021, le Règlement européen (CE) n° 853/2004 précisait que seuls des animaux vivants destinés à l’abattage pouvaient être introduits dans les abattoirs (exception faite des animaux abattus d’urgence ainsi que du gibier d’élevage et sauvage).
En octobre 2020, la Commission a adopté la révision de ce Règlement et une révision de l’annexe III a été publiée officiellement le 20 août 2021.
Depuis lors :
« Jusqu’à trois animaux domestiques de l’espèce bovine, autres que des bisons, ou jusqu’à six animaux domestiques de l’espèce porcine ou jusqu’à trois solipèdes domestiques peuvent être abattus à la même occasion dans l’exploitation d’origine, lorsque l’autorité compétente l’autorise ».
Lors d’une séance d’abattage, une seule espèce peut être abattue à la fois, et les animaux abattus doivent impérativement être issus de l’exploitation où se déroule l’abattage. Il convient de noter que la Commission n’a pas inclus les ovins et les caprins dans cette révision.
A la fin de l’année 2020, j’ai lancé, avec mon collègue Willy Borsus en charge de l’Agriculture, un appel à projets de recherche scientifique dont l’objectif était d’identifier concrètement les opportunités de développement de l’abattage à la ferme en Wallonie pour les bovins, ovins/caprins, porcs et volailles et les éventuels freins à leur mise en place. C’est l’Université de Liège qui a été mandatée et qui a travaillé sur le sujet du 1er mai 2021 au 31 janvier 2022. Le rapport final a fait l’objet d’une communication vers le secteur et le monde académique sous forme d’une journée-conférence qui a eu lieu le 29 avril dernier. Ce rapport est rendu public sur la page internet de l’administration dédiée au bien-être animal.
Les résultats de cette étude constituent une bonne base pour la concrétisation de futurs projets d’abattage à la ferme.
En synthèse, les recherches se sont concentrées d’une part sur le développement d’abattoirs mobiles, et d’autre part sur la mise à mort au sein de l’exploitation suivie du transport vers un abattoir agréé (fixe ou mobile). Elle s’est basée sur les expériences européennes actuelles ou passées en les appliquant au contexte wallon.
Différents scénarii à analyser ont été sélectionnés, sur base de ce qui est légalement et techniquement réalisable à l’heure actuelle. Pour chaque cas de figure, les aspects économiques, sanitaires, environnementaux, sociaux et relatifs au bien-être animal ont été envisagés. Les coûts réels d’un service d’abattage à la ferme ont été chiffrés et les conditions de mise en place identifiées. Chaque possibilité étudiée est à l’heure actuelle confrontée à certains freins qui sont plus ou moins surmontables.
La mise à mort à la ferme suivie par le transport de la dépouille à l’aide d’une unité mobile d’abattage et prise en charge par un abattoir agréé (fixe ou mobile), récemment légalisée pour les bovins, porcs et solipèdes se heurte à des difficultés liées aux exigences sanitaires et législatives. En effet, le délai maximal autorisé entre saignée et éviscération, plus strict en Belgique que les exigences européennes, limite sa possibilité de mise en place. De plus, la responsabilité prise par l’abattoir sur l’ensemble des opérations rebute l’implication des abattoirs wallons, qui ne sont pourtant pas opposés au principe de ce mode d’abattage.
Certaines pistes de solutions et recommandations ont été proposées pour pallier certains de ces freins, notamment, la mise en place d’un projet pilote permettant d’évaluer la faisabilité des différentes solutions en termes d’organisation. De même, des études complémentaires peuvent être nécessaires, notamment pour évaluer le risque sanitaire lié à une augmentation de délai entre la saignée et l’éviscération.
Au vu de ces résultats, j’envisage, avec mon collègue Willy Borsus en charge de l’Agriculture, de proposer la poursuite des recherches pour la mise en place d’un projet pilote comme proposé dans les conclusions de l’étude.