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Les différents types d’aires protégées en Wallonie

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 676 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 17/06/2022
    • de BASTIN Christophe
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    D'après les derniers chiffres que Madame la Ministre a communiqués, la Wallonie dispose de 22 580 ha bénéficiant d'un statut de protection (RND, RNA, RF, ZHIB, CSIS, RIF). L'un de ses objectifs est d'augmenter de 1 000 ha/an les surfaces des réserves naturelles domaniales (RND) et des réserves naturelles agréées (RNA), ce qui a bien été le cas en 2020 et 2021 !

    Cependant, je m'interroge quant aux autres statuts de protection. Le statut de « réserve forestière » (RF) ne concerne que 800 ha et semble très peu utilisé. Ce statut est-il voué à disparaître ?

    Quelle est la vision du Gouvernement quant à l'existence de ce statut ?

    Madame la Ministre va-t-elle opérer une refonte des statuts dans le cadre de la réforme annoncée de la loi sur la conservation de la nature (LCN) ?

    Ce statut ne doit pas être confondu avec le « nouveau » régime de réserve intégrale émanant du Code forestier de 2008. D'après celui-ci, le but est de classer 3 % de la surface totale des forêts feuillues publiques wallonnes en aires protégées (valorisation de peuplements des associations végétales rares ou typiques de régions biogéographiques, forte naturalité avec bois mort, arbres surâgés …).

    Depuis 2015, 5544 ha de forêts sont donc classés comme RI(F), dont certains sites bénéficiant déjà d'un autre statut. À l'instar des RND et RNA sur le territoire, la superficie est-elle amenée à évoluer dans le futur alors qu'elle représente 3,8 % de la surface totale de feuillus ?
    Sinon, des exceptions sont-elles prévues et/ou admises ?

    Un exemple concret me vient à l'esprit avec le Domaine de Chevetogne qui comporte notamment 400 ha de forêts non/peu gérées. Le Domaine étant globalement entouré de RND, la mise en réserve ne serait-elle pas possible et opportune (avec la collaboration des décideurs, bien sûr) ? Représentant un massif forestier colossal, quel serait pour elle, le statut le plus pertinent ? Comment une telle reconnaissance peut-elle se faire, sur initiative du Domaine ou à l'invitation de l'administration ?

    Peut-elle me rappeler le subventionnement octroyé pour la gestion et l'achat d'aires protégées (ex. RNA) ?

    Une aide financière est-elle prévue pour la gestion des RF ou les RIF ?
  • Réponse du 12/09/2022
    • de TELLIER Céline
    Concernant le statut de réserve forestière, il semble important de préciser sa définition actuelle et les avantages et inconvénients liés à ce statut.

    « Une réserve forestière est une forêt ou partie de celle-ci protégée conformément à la loi du 12/07/1973 dans le but de sauvegarder des faciès caractéristiques ou remarquables des peuplements d’essences indigènes et d’y assurer l’intégrité du sol et du milieu » (art. 20 de la loi du 12/7/1973). Ce statut a rapidement suscité des difficultés d’interprétation. Une circulaire du 23/07/1979 tente d’en préciser les contours et explicite la notion comme suit : « la réserve forestière est une forêt ou une partie de celle-ci dans laquelle se trouvent conservés ou peuvent se développer des peuplements-témoins des associations forestières typiques de la région. Une gestion particulière, prescrite par l’aménagement forestier leur est applicable, afin de les protéger et de les sauvegarder pour l’avenir ». Il est à noter que, selon la même circulaire, une réserve forestière « ne peut s’envisager (…) que sous le statut de la réserve dirigée, c’est-à-dire soumise à une gestion appropriée », dès lors notamment que les réserves forestières « remplissent une fonction de production non négligeable, bien que celle-ci soit accessoire et soumise à des règles strictes » et que certaines pratiques sylvicoles ainsi que l’exercice de la chasse restent autorisés.

    J’ai engagé une réflexion au sein de mon cabinet ainsi que de mon administration sur ce statut de réserve forestière. Je souhaite proposer une nouvelle circulaire interprétative de l’Arrêté Royal du 2 avril 1979. Cette circulaire interprétative a notamment pour but de préciser comment les enjeux en matière de protection de la faune et de la flore doivent être pris en compte dans les réserves forestières au regard de sa définition particulière, mais aussi au regard des connaissances scientifiques actuelles. Ceci est jugé nécessaire dans le but de limiter les risques de conflits autour de ces territoires aux enjeux multiples.

    Par ailleurs, comme l’honorable membre le souligne, l’opportunité de conserver le statut de réserve forestière doit être questionnée, et de manière générale une simplification des différents statuts liés à la conservation de la nature. Ceci rejoint les demandes exprimées depuis plusieurs années par les acteurs de la conservation de la nature et répétées lors des travaux de la « task force Aires protégées », ainsi que des organes d’avis puisque le Conseil supérieur wallon de la nature avait déjà émis un avis à ce sujet il y a de nombreuses années. Une étude est actuellement en cours dans mon Cabinet sur le sujet. Nonobstant ses conclusions et sa possible mise en œuvre sous forme d’une révision de la section concernée de la loi sur la conservation de la nature, j’ai demandé à mon administration d’entamer les démarches visant à évaluer les possibilités, au cas par cas, de changement de statut de réserves forestières vers celui de réserves naturelles au sens de la loi sur la conservation de la nature. À ce stade également, et dans l’attente des différentes clarifications sur l’évolution de la législation, j’ai demandé à mon administration de ne plus utiliser ce statut et je ne souhaite plus proposer au Gouvernement la reconnaissance de nouvelles réserves forestières.

    A côté des réserves naturelles ou forestières, vous mentionnez l’existence des réserves biologiques intégrales au sens du Code forestier (art 71). En effet, ce statut peut également se superposer avec des statuts prévus par la loi sur la conservation de la nature comme la réserve naturelle ou la réserve forestière. Concernant l’évolution de leurs superficies, celle-ci devrait continuer à évoluer positivement. De plus en plus de propriétaires, des communes notamment, utilisent ce statut pour protéger certaines de leurs forêts remarquables, leur permettant notamment d’avoir accès à des subventions dans le cadre de la Politique agricole commune pour des espaces inclus en zone Natura 2000.

    En ce qui concerne le Domaine de Chevetogne, une partie boisée de celui-ci fait actuellement partie d’une réserve biologique intégrale. Le Cantonnement de Rochefort a proposé d'inclure sous ce statut une grande partie du « Gros Bois », soit une étendue de 72 hectares d'un seul tenant. Cette zone boisée, située dans la partie orientale du domaine, au nord du vallon du Molinia, se compose principalement d'une chênaie-charmaie à stellaire. De plus, une surface de 10 ha 88 a 08 ca vient d’être désignée comme réserve naturelle domaniale le 10 février dernier. Celle-ci comporte essentiellement des milieux ouverts et forestiers humides.

    La volonté manifestée par le gestionnaire du domaine provincial d’étendre la protection intégrale de l’ensemble du massif dans lequel il s’intègre témoigne de son ambition de renforcer la conservation de la nature sur le site et d’augmenter son attractivité par la sauvegarde d’un grand site naturel. Toutefois, la procédure de mise sous statut de protection d’un espace naturel en Wallonie passe nécessairement par l’accord du propriétaire. Si ce dernier marquait son accord pour un tel projet, en fonction des opportunités et préférences, différentes possibilités s’offrent à lui et au gestionnaire pour introduire une procédure de mise sous statut.

    À propos du subventionnement octroyé pour la gestion des réserves naturelles agréées, celui-ci peut être sollicité par les gestionnaires reconnus au sens de l’AERW du 17 juillet 1986. La subvention est accordée soit sur un montant forfaitaire de 74,37 €/ha indexé, le montant pour 2021 est ainsi de 121,2 €/ha. Pour l’acquisition de terrains à ériger en réserve naturelle agréée, la subvention s’élève à 50 % maximum du montant total de l’achat. Les bénéficiaires sont tenus d‘introduire une demande d’agrément dans les 18 mois suivant la date de l’arrêté de subvention. Des subventions peuvent être octroyées pour la création ou la gestion des réserves forestières, mais celles-ci sont peu utilisées et seront questionnées tout comme l’existence du statut.

    En outre, dans le cadre du Plan de relance de la Wallonie, différentes actions sont menées pour le renforcement des aires protégées et des moyens mis à disposition des acteurs, administration et société civile, pour acquérir, restaurer ou valoriser des espaces à haute valeur biologique.
  • de TELLIER Céline