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Le rapport de la Conférence sur l’avenir de l’Europe et la réforme des traités européens

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 214 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 28/06/2022
    • de DI MATTIA Michel
    • à DI RUPO Elio, Ministre-Président du Gouvernement wallon
    Depuis plus d'un an, la Conférence sur l'avenir de l'Europe a permis aux citoyens européens, au travers de différents panels, de débattre des priorités et défis auxquels sera confrontée l'Union européenne. Le 9 mai dernier, un rapport comprenant 49 propositions et plus de 320 mesures a été publié pour permettre au Parlement européen, au Conseil et à la Commission d'y donner suite dans la limite de leurs compétences respectives.

    Le 9 juin dernier, le Parlement a approuvé l'une des principales propositions du rapport ayant trait à la réforme des traités de l'Union européenne et invitant les responsables européens à établir dans cette optique une convention constitutionnelle. Au regard de ces modifications souhaitées, il apparaît que la santé est largement au cœur des préoccupations. La pandémie de Covid-19 a largement contribué à abonder en faveur d'une compétence partagée entre les États membres de l'Union européenne. Outre cette compétence, les députés ont également voté en faveur d'une Europe plus unie en matière d'énergie, de défense et de politiques sociales et économiques.

    Dans une déclaration à la presse, la Présidente du Parlement européen, Madame Metsola, a fait part des réticences de certains pays membres à s'engager dans cette direction.

    Comment la Wallonie se positionne-t-elle par rapport à la proposition de réforme de ces traités pour les compétences qui la concernent ?

    Quelle est l'appréciation de Monsieur le Ministre-Président des impacts potentiels sur ces mêmes compétences régionales ?

    Quelle sera la position de la Région si ce point venait à être mis à l'ordre du jour d'une future CIM, auprès des autres niveaux de pouvoir, au regard des compétences transversales évoquées ?
  • Réponse du 13/09/2022
    • de DI RUPO Elio
    La Conférence sur l’Avenir de l’Europe s’est clôturée le 9 mai dernier à l’occasion de la journée internationale de l’Europe. Lors de la cérémonie de clôture au Parlement européen à Strasbourg, le rapport final des travaux a été présenté aux Présidents des principales institutions européennes (Commission, Conseil et Parlement).

    Le rapport comporte 49 propositions déclinées en 326 mesures réparties entre les 9 thèmes ouverts au débat citoyen. Pour rappel, il s’agissait du changement climatique et de l’environnement, de la santé, d’une économie plus forte, de la justice sociale et de l’emploi, de l’UE dans le monde, de la transformation numérique, de la démocratie européenne, des migrations et de l’éducation, la culture, la jeunesse et le sport.

    Lors de la cérémonie de clôture, les Présidents des principales institutions européennes ont réaffirmé l’engagement collectif pris au moment de l’adoption de la déclaration conjointe en 2021, d’assurer le suivi des propositions de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe dans les limites de leur propre sphère de compétence et conformément aux traités.

    Le 17 juin dernier, la Commission européenne a publié une communication intitulée « Transformer la vision en action concrète ». La Commission présente cette communication comme la première étape du processus par lequel elle entend donner suite aux propositions formulées dans le cadre de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe.

    Dans la communication, la Commission européenne fait un état des lieux des propositions qui sont déjà en cours de traitement au sein de ses services et des projets qui doivent être approfondis.

    Une première série de propositions devrait être annoncée dans le discours sur l’état de l’Union de la Présidente de la Commission en septembre 2022 et dans la lettre d’intention qui l’accompagnera.

    Ces propositions devraient figurer dans le programme de travail de la Commission européenne pour l’année 2023. Certaines propositions devraient également faire partie des priorités législatives communes convenues entre les institutions de l’Union européenne.

    Sur demande du Conseil de l’UE, le Secrétariat général du Conseil a produit une analyse préliminaire des propositions issues de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe. L’analyse relève que la grande majorité des mesures peuvent être mises en œuvre dans le cadre des traités existants.

    Le Secrétariat général du Conseil souligne également qu’il existe un potentiel inexploité dans les traités actuels qui pourrait contribuer à répondre aux propositions de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe. Par exemple, les « clauses passerelles » (Art. 48 §7 du Traité sur l’Union européenne) pourraient être activées pour passer du vote à l’unanimité au vote à la majorité qualifiée dans certains domaines politiques tels que l’énergie, la fiscalité ou encore certains volets de la politique étrangère et de sécurité commune.

    Les clauses passerelles sont un mécanisme qui permet d’introduire des modifications de nature très particulière aux traités européens. Elles modifient les règles de prise de décision qui s’appliquent aux actes du Conseil, permettant, par exemple, de remplacer le vote à l’unanimité par un vote à la majorité qualifiée, ou de passer d’une procédure législative spéciale à une procédure législative ordinaire. Elles nécessitent l’accord des États membres pour être activées.

    Le Secrétariat général du Conseil indique que seul un nombre très limité de mesures spécifiques listées dans le rapport final de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe nécessiterait une modification des traités pour être pleinement mises en œuvre. Le Secrétariat général du Conseil en identifie 18 parmi lesquelles on peut retenir : faire de la santé et des soins de santé ainsi que l’éducation une compétence partagée de l’UE ; établir dans l’UE un droit au mariage et à l’adoption pour les couples de même sexe ; faire du 9 mai (Journée de l’Europe) un jour férié supplémentaire ; introduire la possibilité de référendum à l’échelle européenne, déclenchée par le Parlement européen ; modifier l’article 7 du Traité sur l’Union européenne établissant une procédure pour le respect de l’Etat de droit dans les États membres ; passer de l’unanimité à la majorité qualifiée au Conseil pour les situations où les « clauses passerelles » ne s’appliquent pas (ex : les questions de défense) ; l’élection directe du Président de la Commission par les citoyens européens ; ou encore conférer au Parlement européen et/ou aux parlements nationaux/régionaux un droit d’initiative législative au niveau de l’UE.

    Dès le 4 mai 2022, le Parlement européen s’est prononcé en faveur de la convocation par le Conseil européen d’une convention. Cette convention serait chargée de réformer le fonctionnement de l’Union européenne (activation de l’article 48 du Traité sur l’Union européenne) et donc de réviser les traités existants.

    Cet appel du Parlement européen a été réitéré le 9 juin dernier par le biais d’une deuxième résolution qui précise les domaines où des améliorations institutionnelles sont souhaitables. Par exemple, la pérennisation des initiatives prises en commun en matière de santé, de croissance économique et de cohésion sociale durant la crise sanitaire ; la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux ; l’octroi d’un droit d’initiative législative au Parlement ; ou encore la fin des prises de décision à l’unanimité au Conseil. Un courrier en ce sens a d’ailleurs été adressé par la Présidente du Parlement européen au Conseil.

    La position du Parlement européen s’explique par le souhait de jouer un rôle moteur dans le suivi et la mise en œuvre des propositions issues de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe.

    De son côté, le Conseil des Affaires générales assurera le suivi des propositions issues de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe, au titre de ses compétences de coordination générale des travaux du Conseil et de préparation des réunions du Conseil européen. Il a déjà tenu un premier débat de fond lors de sa session du 21 juin dernier. Il s’est appuyé sur l’analyse technique préliminaire de son Secrétariat général et sur la communication de la Commission. La discussion a très peu porté sur le contenu même des priorités à mettre en œuvre parmi les 49 recommandations, mais plutôt sur l’éventuelle révision des traités.

    Lors du Conseil informel du 15 juillet dernier, la Présidence tchèque du Conseil de l’UE a invité les États membres à partager leurs vues, notamment sur l’élargissement du vote à la majorité qualifiée et sur le développement de la démocratie participative.

    Afin de tenir les citoyens informés et maintenir l’élan, un événement de « restitution » sur la Conférence sur l’Avenir de l’Europe sera organisé en novembre 2022 par la Commission européenne. Cet événement permettra de communiquer sur le suivi donné par les 3 institutions sur les propositions de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe et faire le point sur les progrès réalisés à ce stade du processus.

    La Wallonie a soutenu la mise en place de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe. Cet exercice de démocratie participative à l’échelle européenne est une opportunité pour améliorer et faire évoluer le projet européen. C’est indispensable vu les défis auxquels nous devons faire face et le contexte géopolitique actuel.

    À travers les nombreuses et intéressantes recommandations émises à l’égard des institutions européennes, la Wallonie a toujours indiqué que cette Conférence sur l’Avenir de l’Europe devait permettre de retisser des liens avec les citoyens européens et répondre à leurs préoccupations et aux réalités de terrain.

    La Wallonie accueille de manière favorable la nouvelle forme de participation permanente en ligne, instaurée par la Commission européenne dans le cadre de cette Conférence. Toutefois, la Wallonie sera attentive à ce que tous les citoyens puissent avoir accès à de tels moyens. En effet, tous les citoyens européens n’ont pas de connexion internet et certaines générations d’Européens (ex : les personnes âgées) n’ont pas facilement recours à ce genre de pratique moderne. Toute personne en Europe doit pouvoir donner son avis.

    La Wallonie a également régulièrement insisté sur l’importance d’assurer un suivi et une mise en œuvre des recommandations issues des panels citoyens. Dans ce cadre, il est nécessaire de préserver la place centrale qu’ont occupée les citoyens lors de cet exercice. Ces derniers doivent être tenus régulièrement informés des travaux menés par les institutions européennes pour répondre aux mesures proposées via la Conférence sur l’Avenir de l’Europe.

    La Wallonie est ouverte à toutes les possibilités permettant d’appliquer les recommandations du rapport final de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe.

    Il est crucial d’avancer le plus rapidement possible avec les dispositions des traités européens qui permettent de rencontrer les recommandations des citoyens européens.

    L’ouverture d’une convention européenne doit aussi être possible pour revoir le fonctionnement de l’UE et mettre en œuvre les recommandations nécessitant la révision des traités européens.

    Sous l’appel de l’Allemagne, la Belgique a décidé de co-signé un « non-paper » allemand relatif aux suites à réserver à la Conférence sur l’Avenir de l’Europe. Ce « non-paper » rencontre les positions exprimées par les différentes entités belges. Il permet de laisser toutes les portes ouvertes afin de mettre en œuvre les recommandations finales de la Conférence : que ce soit dans le cadre existant des traités et/ou par le biais de l’ouverture d’une nouvelle convention révisant le cadre institutionnel européen.

    Les pays nordiques et les pays baltes, rejoints par des délégations telles que Chypre, Malte et la Croatie, ont clairement exprimé leurs réticences à se lancer dans un processus de révision des traités européens. Ces pays préfèrent que les efforts fournis pour mettre en œuvre la grande majorité des propositions puissent l’être à traités constants.

    D’autres délégations, dont la Belgique et appuyé par la Wallonie, se sont montrées ouvertes à poursuivre le débat sur cette question tout en soulignant, comme la Commission, que la modification des traités n’est pas un objectif en soi. La question de l’opportunité de lancer un processus institutionnel dans le contexte géopolitique actuel a également été posée.

    Le suivi de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe sera à l’ordre du jour du prochain Conseil européen d’octobre. Le Parlement européen souhaite que la question d’une ouverture ou non d’une convention européenne y soit discutée.

    En ce qui concerne l’impact d’une réforme des traités sur les compétences propres à la Wallonie, il est trop tôt pour pouvoir le déterminer.

    Le cas échéant, une discussion intra-wallonne devra avoir lieu pour déterminer la position de la Wallonie si une CIM devait être convoquée à ce sujet.