Problématique des rémunérations des mandats publics et absence de meures prises à ce jour par le Gouvernement.
Session : 2006-2007
Année : 2006
N° : 6 (2006-2007) 1
2 élément(s) trouvé(s).
Question écrite du 29/09/2006
de CHERON Marcel
à COURARD Philippe, Ministre des Affaires intérieures et de la Fonction publique
L'actualité n'a cessé de mettre au jour, depuis un an, un nombre important d'affaires, de scandales, de détournements ou d'estompements de la norme, plongeant notre Région dans un état de crise d'une gravité sans précédent.
La société apparaît déboussolée face à ces affaires à répétition. La confiance de la population dans ses institutions s'en retrouve ébranlée, alors même que la situation socio-économique ou environnementale de la Wallonie requiert la mobilisation des énergies du plus grand nombre.
La problématique des rémunérations et autres avantages liés à l'exercice des mandats publics a, notamment, été posée dans ce contexte. Les pratiques inadmissibles révélées à l'occasion de ces scandales ont effectivement démontré la nécessité d'une régulation régionale, afin d'organiser la transparence en la matière et de limiter les rémunérations des mandats publics, même si bon nombre de mandataires effectuent un travail dans le seul souci de l'intérêt général pour une rémunération tout à fait raisonnable.
Il ne me semble pas nécessaire de rappeler ici les excès rencontrés au sein de certaines sociétés de logement social ou au niveau des intercommunales ou asbl communales. L'enjeu est également valable pour les organismes d'intérêt public de la Région wallonne. A titre d'exemple, le président du conseil d'administration du Port autonome de Namur reçoit une indemnité forfaitaire de plus de 24.000 euros par an, lorsque le président du Port autonome de Liège, alors que l'organisme qu'il préside est d'une toute autre dimension, perçoit une somme deux fois moindre - et même récemment abaissée à 3.340 euros par an - et que la rémunération du président du Port autonome du Centre et de l'Ouest est tout simplement nulle.
Dans ce contexte, la majorité régionale a fini par admettre la nécessité d'une initiative de sa part en la matière.
Ainsi, le Gouvernement s'est vu attribuer, au travers du décret modificatif du Code de la démocratie locale et de la décentralisation du 8 décembre 2005, une habilitation lui permettant d'abroger, de compléter, de modifier ou de remplacer la législation existante afin d'organiser la manière dont sont éventuellement rémunérés les mandats dérivés des mandats de conseillers communaux ou de conseillers provinciaux lui.
Il était ainsi question de l'établissement d'un cadastre, de plafonds de rémunérations, d'un inventaire des avantages admissibles et de leur intégration aux plafonds susvisés et d'une procédure de sanction.
Le même texte a également établi un double système de déclaration de la part des mandataires, auprès du secrétaire communal et auprès du Gouvernement, quant aux mandats exercés et aux rémunérations perçues.
Enfin, le Gouvernement du même jour a décidé d'initier une consultation en vue de recevoir un appui méthodologique dans l'estimation des rémunérations et des divers avantages qu'il est raisonnable d'affecter à l'exercice des mandats dérivés d'une charge d'ordre politique, ainsi qu'à l'exercice de certains autres mandats publics comme, par exemple, administrateur public régional, administrateur public local, administrateur privé au sein d'une personne morale de droit public ou d'un organisme régional d'intérêt public, responsable de la gestion journalière, commissaire du Gouvernement, ...
Un an s'est écoulé depuis le commencement des affaires. Neuf mois sont passés depuis l'adoption de ces décisions. Rien ne bouge et rien ne semble troubler la sérénité de façade du Gouvernement.
Je vous ai interrogé Monsieur le Ministre, en date du 2 mars 2006, quant à l'application de la déclaration de mandats et des rémunérations y afférentes, en principe applicable, selon la volonté du législateur, pour la première fois au 1er avril 2006. Vous m'avez répondu que les mesures d'exécution à prendre par le Gouvernement conditionnaient la mise en œuvre de ce dispositif et qu'il vous était impossible d'indiquer dans quel délai ces mesures seraient arrêtées.
J'ai interrogé à une double reprise Monsieur le Ministre·Président, en date du 2 mars 2006 et du 15 mai 2006, quant à l'avancement de la consultation annoncée, quant aux constats posés et aux recommandations formulées. Les offres des consultants devaient être déposées pour le 22 décembre 2005 et la mission était prévue pour une durée de 60 jours. En date du 24 mars 2006, Monsieur le Ministre-Président m'indiquait que le marché avait seulement été attribué à la mi-février ... En date du 14 juin 2006, il ajoutait que la consultation n'était pas encore finalisée. Il semble que tel soit à présent le cas. Nous ne savons toutefois rien de son contenu.
Depuis un an, donc, depuis que le scandale a éclaté, aucune mesure n'a donc encore sorti ses effets
Il y a pourtant urgence !
Les élections communales et provinciales auront lieu dans moins de deux semaines. Il apparaîtrait irresponsable, de la part du Gouvernement, de retarder encore les mesures à prendre en cette matière, alors qu'elles pourraient constituer un signal important, à travers la définition de rémunérations raisonnables et équitables, pour jeter un pont vers la population, restaurer une part de confiance dans la politique et, pour tout dire, endiguer la menace préoccupante que constitue une possible entrée de l'extrême droite dans nos assemblées démocratiques, tant ce fléau est nourri des scandales qui sont intervenus, notamment quant aux rémunérations des mandataires publics et des lenteurs du système à les empêcher à l'avenir.
Les élections communales et provinciales auront lieu dans moins de deux semaines. Cela signifie aussi que plusieurs milliers de conseillers communaux seront élus à cette occasion; plusieurs centaines de bourgmestres et d'échevins seront désignés dans la foulée; une série de mandats dérivés seront également renouvelés par la suite.
Il nous apparaît donc important de pouvoir établir ces nouvelles règles en matière de rémunération avant le renouvellement des organes communaux et provinciaux. Il est sain, en effet, que ces plafonnements puissent être établis avant cette échéance, que ces nouvelles règles du jeu soient définies avant que la partie ne commence.
Il y va également de la capacité du Gouvernement à agir de manière forte. Une telle problématique
occasionne naturellement l'exercice de pressions de divers ordres et de différents milieux. Nous avons la faiblesse de craindre que ne pas décider avant les élections renforcera ces pressions, en laissant la porte grande ouverte pour permettre à un certain nombre de mandataires nouvellement en place d'œuvrer, autour du Gouvernement, pour que la limitation soit, le plus possible, strictement cosmétique.
De la même manière, il apparaît opportun que l'opérationnalisation du double système de déclaration soit prête dès l'entrée en fonction des nouveaux mandataires locaux.
A ces éléments s'ajoute la circonstance selon laquelle les pouvoirs spéciaux conférés par l'habilitation susvisée prennent fin en date du 31 décembre 2006.
Monsieur le Ministre ne trouvera pas en moi un soutien à l'utilisation de cette technique. Je pense cependant que, dès lors que le Gouvernement a fait le choix de ce chemin pour légiférer en la matière, il lui appartient d'en assumer la responsabilité. Dès lors que cette habilitation a justifié l'ajournement de tout débat parlementaire en la matière, je ne voudrais donc pas que, un an plus tard, nous en revenions simplement à la case départ.
En conclusion, je souhaite donc adresser à Monsieur le Ministre un certain nombre d'interrogations.
A partir de l'étude qu'il a commandée et qu'il a dû recevoir depuis lors, j'imagine que le Gouvernement va établir sa propre appréciation sur le sujet, tenant compte de ce document, mais également de sa propre vision quant à ces enjeux. Monsieur le Ministre peut-il m'informer de l'état d'avancement des réflexions du Gouvernement en cette matière et m'indiquer dans quels délais le Gouvernement pourra arrêter ses orientations ? Le cas échéant, Monsieur le Ministre peut-il me faire part de ces orientations ?
Monsieur le Ministre peut-il m'informer dans quels délais le Gouvernement mettra en œuvre, à travers les arrêtés requis, l'habilitation qu'il a reçue pour établir un cadastre, définir les plafonds de rémunérations, inventorier les avantages admissibles et mettre sur pied une procédure de sanction ?
Monsieur le Ministre peut-il me préciser dans quels délais les mesures d'exécution nécessaires pour opérationnaliser le double système de déclaration des mandats et rémunérations seront adoptées par le Gouvernement ?
Monsieur le Ministre peut-il m'indiquer si le Gouvernement pourra adopter les mesures requises avant les prochaines élections communales et provinciales ?
Réponse du 24/10/2006
de COURARD Philippe
La question de l'honorable Membre a retenu toute mon attention. Mon interlocuteur m'interroge sur l'étude commandée par le Gouvernement au sujet des rémunérations et des divers avantages liés à l'exercice de certains mandats. Je note qu'il a déjà adressé une question sur le même objet au Ministre-Président du Gouvernement wallon et me permets de le renvoyer à la réponse lui adressée, à cette occasion, par le premier Membre de l'Exécutif.
Pour ce qui est de la mise en œuvre des règles adoptées par le Parlement le 8 décembre 2005, notamment au sujet des mandats dérivés pour lesquels le Gouvernement dispose d'une habilitation pour, entre autres, fixer les plafonds des rémunérations et déterminer les avantages en nature auxquels les mandataires peuvent prétendre, j'ai indiqué aux Membres de la Commission des Affaires intérieures, réunis le 17 octobre dernier, que je préfèrerai l'adoption d'un décret à l'exercice des pouvoirs d'habilitation.
Dans la mesure où je tiens, à la fois, à tenir compte des nouvelles orientations définies par le Gouvernement, notamment par le renforcement de la tutelle, mais aussi à mettre en place un mécanisme de déclaration et de contrôle efficace sans lourdeur administrative excessive, il me paraît juridiquement plus adéquat de proposer au Gouvernement un projet de décret sur cette thématique.
Quoi qu'il en soit, que l'honorable Membre soit assuré qu'il ne s'agit évidemment pas d'une manœuvre dilatoire de ma part. La volonté, tant du Gouvernement que du Parlement, exprimée par les décrets du 8 décembre 2005 d'instaurer de nouvelles règles de transparence, notamment à l'égard des mandats dérivés, restera ma ligne de conduite
Je m'en tiendrai donc à ces règles pour rédiger le projet de décret.
Ce projet est, par ailleurs, d'ores et déjà en voie de finalisation. Il sera soumis dans les prochaines semaines au Gouvernement.