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Les groupes ciblés évoqués par le dernier rapport du Conseil supérieur de l’Emploi

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 699 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 14/07/2022
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale et de l'Economie sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    Bien que le pays compte 433 000 demandeurs d'emploi, 196 000 postes sont vacants selon le Conseil supérieur de l'Emploi (CSE) pour qui la résorption des pénuries de main-d'œuvre ne pourra être rencontrée que par une action dynamique sur les groupes cibles moins présents parmi les actifs !

    Les femmes, les personnes faiblement ou moyennement diplômées, les personnes non européennes, les 20-24 et les 55-64 sont ainsi évoqués par le CSE.

    Madame la Ministre partage-t-elle l'analyse et fait-elle face à un constat identique au sein de la population wallonne demandeuse d'emploi ?

    Pour chacune des cibles susévoquées, quelle fut l'évolution en taux d'emploi sur les dix dernières années ?

    Quelle analyse fait-elle de ces chiffres et quelles conclusions en tire-t-elle ?

    Quelles sont les mesures prises depuis le début de la législature à l'égard de chacune desdites cibles ?

    Quel en est l'effet, l'éventuel succès ou échec rencontré et quelles sont les améliorations qui devraient intervenir ?

    À l'égard des cibles, quelles sont les mesures sur lesquelles elle travaille et quelles sont celles qu'elle espère pouvoir concrétiser avant la fin de la législature ?
  • Réponse du 03/04/2023 | Annexe [PDF]
    • de MORREALE Christie
    Selon les derniers chiffres publiés par Statbel sur base de sa « Job vacancy survey », la Belgique comptait 206 000 postes vacants au premier trimestre 2022, dont 40 000 en Wallonie (19,6 %). Au 30 juin 2022, le nombre de demandeurs d’emploi inoccupés s’élevait quant à lui à 195 000 personnes en Wallonie, selon les chiffres du FOREm et de l’Arbeitsamt der DG (Communauté germanophone).

    La solution de l’équation pourrait paraître simple. Pourtant les tensions sur le marché de l’emploi n’apparaissent pas seulement pour des raisons quantitatives, mais également en raison d’inadéquations entre les compétences attendues et celles portées par les candidats, entre les conditions de travail ou de rémunération proposées et celles recherchées par les candidats, entre l’image que certaines personnes se font de certains secteurs et leur contexte réel d’activité ou encore pour des raisons de mobilité.

    Les questions posées portent toutefois sur la problématique, non pas des fonctions critiques du point de vue du recrutement, mais sur les réelles pénuries de main-d’œuvre. Selon l’état des lieux du marché du travail et les recommandations du Conseil Supérieur de l’Emploi (CSE), ces pénuries menacent la création d’emploi et leur résorption passera par diverses mesures à prendre en aval d’un travail d’analyse préalable de la problématique, dont l’identification des métiers concernés et le monitoring des causes des pénuries sur base des apports des services publics de l’Emploi (dont le FOREm), des secteurs et des partenaires sociaux.

    Ces mesures de lutte contre les pénuries sont notamment celles annoncées par le Gouvernement fédéral en 2022 concernant la réforme du marché du travail. Parmi celles-ci, on retrouve notamment « la communication d’avis et de propositions de mesures aux entités fédérées ayant la compétence des politiques d’emploi (création d’une plateforme interfédérale) », « la possibilité de combiner un revenu issu d’un métier en pénurie ou situé dans une autre région et une allocation de chômage » ou encore « l’établissement d’un plan annuel de formation par les entreprises ».

    D’autre part, il y a lieu selon le CSE de renforcer la base de la population qui se présente sur le marché du travail. Ceci rejoint un autre objectif du Gouvernement fédéral qui est de porter à 80 % le taux d’emploi de la population belge (20 à 64 ans) d’ici 2030.

    Au-delà d’augmenter le taux d’emploi au niveau national, la création d’emplois s’avère un défi majeur pour le marché régional. Ainsi l’IWEPS précise dans un working paper paru en 2020, que la création d’un emploi n’implique pas automatiquement une hausse du taux d’emploi.

    En effet, le taux d’emploi n’augmente que si le nombre d’emplois augmente plus vite que la population en âge de travailler.

    Outre l’effet démographique avancé ci-dessus, la réflexion régionale doit tenir compte du fait que les emplois créés en Wallonie n’améliorent le taux d’emploi wallon que s’ils sont occupés par des personnes résidant en Wallonie.

    La mobilité de la main-d’œuvre est souvent avancée comme une des solutions aux problèmes d’inadéquations sur le marché du travail. Le Gouvernement flamand fait actuellement réaliser une étude (menée par Idea Consult en collaboration avec la KUL) sur la mobilité interrégionale de la main-d’œuvre et qui a pour objectif d’identifier dans quelle mesure les demandeurs d’emploi wallons et bruxellois sont prêts à aller travailler en Flandre, ainsi que les freins à cette mobilité de la main-d’œuvre.

    À cet égard, il convient de relever que l’un des freins majeurs à la mobilité est que ce sont souvent les mêmes métiers que l’on retrouve en pénurie dans les différentes régions. Mes équipes travaillent actuellement avec le Cabinet Brouns à la rédaction d’un accord de coopération entre la Wallonie et la Flandre concernant la mobilité entre les deux régions avec l’objectif, notamment, de renforcer les collaborations entre le FOREm et le VDAB dans les zones situées aux alentours de la frontière linguistique.

    Concernant les groupes-cibles, plusieurs catégories de personnes sont dites vulnérables sur le marché de l’emploi. Il s’agit des jeunes en général (et plus spécifiquement ceux qui quittent prématurément les études, et les NEETs), des personnes âgées d’au moins 50 ans, des personnes peu qualifiées, des personnes issues de l’immigration, des personnes malades ou souffrant d’un handicap. Selon certaines sources, on y recense aussi les femmes, dont la position sur le marché du travail est plus fragile, statistiquement parlant, du point de vue horizontal (secteurs et/ou métiers moins qualifiés, valorisés, moins rémunérés, à haute proportion de temps partiel) et vertical (plafond de verre qui limite l’accession aux plus hautes fonctions).

    Notons que ces caractéristiques correspondent aux critères sur lesquels se fondent les lois anti-discrimination. Mais bien que les pratiques discriminatoires soient fermement entravées par une législation solide, elles peuvent toutefois subsister, de manière indirecte et parfois presque imperceptible, sans qu’un critère protégé par la loi ne soit directement mis en cause.

    D’après le monitoring socioéconomique issu de la collaboration d’Unia, du Service public fédéral Emploi, Travail et Concertation sociale, du Registre national, de la Banque Carrefour de la Sécurité sociale, la position « défavorable » s’explique notamment par plusieurs caractéristiques structurelles de notre marché du travail impliquant des difficultés pour tous les groupes « à risque » :
    - l’accès difficile au marché du travail belge, en lien avec les exigences élevées des employeurs ;
    - la faible mobilité professionnelle, comparée au marché du travail d’autres pays, qui laisse peu d’opportunités aux nouveaux entrants, ce qui pourrait grever la croissance de la productivité et freiner l’innovation ;
    - la dualité ou segmentation que présente globalement le marché du travail. Les deux types de segments de marché connaissent peu de mouvements entre eux (ni a fortiori d’effet tremplin du moins au plus favorable). D’un côté, le marché primaire, fait d’emplois stables, offrant des conditions de travail favorables et des salaires élevés ; de l’autre le marché secondaire, aux contrats de travail et aux conditions plus précaires, aux salaires moins élevés.
    - s’y ajoute l’inégalité des chances dans l’enseignement, qui porte un préjudice plus notable aux personnes d’origine étrangère, surreprésentées dans les populations infra-qualifiées.

    En annexe de cette réponse, sont communiqués les taux d’emploi des 10 dernières années pour les groupes cibles mentionnés.