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L'invasion de ratons laveurs en Province de Luxembourg

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 740 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 14/07/2022
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Dans un article de presse paru récemment, nous apprenions que la population de ratons laveurs en Province de Luxembourg avait explosé ces dernières années.

    Il semblerait que le DNF ait tiré la sonnette d'alarme avant cette invasion, mais que ses demandes soient restées lettre morte…

    Aujourd'hui, cet animal invasif perturbe l'équilibre de la biodiversité et nuit à la quiétude des habitants. Faute de prédateurs sa population est devenue incontrôlable.

    S'il ne semble pas menaçant, il attaque pourtant s'il se sent menacé, et s'en prend volontiers aux animaux de compagnie. Il peut également détruire les toitures, les isolations des maisons, etc.

    Mais le plus inquiétant réside dans sa capacité à transmettre des maladies graves susceptibles d'attaquer les vaisseaux sanguins, les muscles, le système nerveux et même le cerveau.

    Madame la Ministre peut-elle nous dire depuis quand la présence de cet animal dans cette région est considérée comme problématique ?

    Quelles mesures sont prises pour enrayer le risque de propagation aux provinces limitrophes ?

    Quelles sont les solutions préconisées par le DNF et qu'en est-il de leur faisabilité ?

    Enfin pense-t-elle qu'il y ait un risque que cet animal envahisse nos villes dans un futur proche ?
  • Réponse du 21/11/2022
    • de TELLIER Céline
    Le raton laveur est un carnivore opportuniste qui s’adapte à de très nombreux habitats naturels, mais également aux milieux urbanisés où il peut atteindre des densités très élevées. Ses capacités cognitives et reproductives font de ce mammifère une espèce exotique envahissante particulièrement difficile à gérer.

    Avant que les dégâts qu’il cause ne soient connus par la société, son apparence mignonne largement véhiculée par les médias l’a rendu sympathique auprès de la population, rendant difficile la prise de mesures visant la destruction d’individus par les pouvoirs publics. Ainsi, aucun pays européen ne dispose à ce jour d’une stratégie de gestion ambitieuse de cette espèce, et ce, malgré les messages d’alarme des personnes sur le terrain, dont certains agents du DNF.

    Observé pour la première fois en 1986, le raton laveur s’est propagé à partir de la frontière allemande et luxembourgeoise. Son expansion s’est fortement accélérée depuis les années 2010, avec aujourd’hui des densités d’observation particulièrement élevées au sud de la Wallonie (notamment dans le massif ardennais et en Gaume). Les densités en zone atlantique semblent pour l’heure beaucoup plus faibles, mais devraient malheureusement augmenter dans un futur proche. Ainsi, l’éradication du raton laveur à l’échelle de la Wallonie ne peut plus être raisonnablement envisagée au vu des fortes densités observées sur le terrain, en ce compris au niveau des zones frontalières qui agissent comme autant de populations sources.

    Longtemps considéré comme une espèce relativement inoffensive, de plus en plus d’études montrent que ce prédateur opportuniste peut constituer une menace sérieuse pour la survie de populations d’espèces menacées en Europe (bivalves d’eau douce, écrevisses, reptiles, oiseaux, chauve-souris, et cetera). Un nombre croissant d’observations tendent à montrer que le raton laveur exerce une pression de prédation importante sur plusieurs espèces d’oiseaux menacées, comme le cincle plongeur, l’hirondelle de rivage ou le gobemouche noir.

    Le raton laveur est aussi reconnu comme un réservoir important de zoonoses, incluant différents virus, des bactéries et des vers parasites. Parmi les mammifères exotiques installés en Wallonie, il est sans conteste l’une des espèces qui présente le risque sanitaire le plus important, en lien avec sa propension à fréquenter les abords immédiats des habitations. La transmission d’agents pathogènes peut s’effectuer par le biais de la consommation de fruits ou de légumes souillés par de l’urine ou par des excréments ainsi que par contact direct avec les animaux. Le raton laveur est également une importante source de nuisances domestiques comme en atteste la très forte augmentation de plaintes provenant de citoyens et d’agents communaux faisant état de multiples dégradations dans le sud de la Wallonie.

    Puisque l’éradication n’est plus un objectif réaliste, il y a lieu de réguler l’espèce afin de limiter ses dégâts. Ainsi et au vu de la situation actuelle alarmante, j’ai demandé à mes services de réaliser une identification des zones prioritaires d’intervention, tenant compte de la présence d’espèces sensibles, ainsi que la réalisation d’un plan de lutte détaillé. Ce plan pourra s’appuyer sur le test de lutte pilote qui a été mené en zone de peste porcine africaine durant les années passées.

    Le raton laveur étant une espèce de la liste des espèces exotiques envahissantes (EEE) préoccupantes pour l’Union européenne au sens du règlement européen 1143/2014, sa détention, son transport et son commerce sont déjà actuellement interdits. De plus, un arrêté du Gouvernement wallon sur les EEE en passe d’être adopté va permettre l’opérationnalisation d’un plan de lutte et la délivrance d’agréments pour permettre à des opérateurs d’intervenir chez les particuliers en cas de nuisance.

    Le raton laveur est déjà présent dans certaines villes européennes. Afin d’éviter que cette problématique ne se pose de façon importante en Belgique, au-delà des actions menées par l’administration, il est essentiel de sensibiliser les citoyens à la problématique du raton laveur, et notamment à l’importance de ne pas les nourrir. En effet, une densité élevée de ratons laveurs est favorisée par du nourrissage, intentionnel ou non, dans les zones anthropisées qu’il y a lieu de minimiser. Ce travail de sensibilisation est déjà bien mis en œuvre par mon administration qui insiste régulièrement sur cette problématique.